Appel de la revue ESPRIT pour le vote en faveur d’Emmanuel Macron !


Au second tour des élections présidentielles, Emmanuel Macron sera opposé à Marine Le Pen, candidate du Front National. Cet affrontement inédit, né de la faillite des deux grands partis qui dominaient la vie politique en France depuis cinquante ans, crée le trouble et l’incertitude chez beaucoup, qui renvoient dos à dos les deux candidats, jugeant que c’est blanc bonnet et bonnet blanc, et prônent l’abstention, le vote blanc ou le vote nul. Pour Esprit, cette équivalence est fausse et irresponsable : nous appelons sans restriction à voter Emmanuel Macron et à rejeter Marine Le Pen.

S’abstenir le dimanche 7 mai, voter blanc ou nul, camper sur un « ni ni » qui ne fait pas de différence entre les candidats serait irresponsable, une faute politique majeure. Quelles que soient les réserves que certains peuvent avoir envers Emmanuel Macron, son ouverture à la discussion et aux libertés fondamentales, son attachement aux garanties de la démocratie et aux droits humains sont incontestables. Son engagement pour l’Europe ne plaît pas à tous, du moins a-t-il le mérite d’être clair – et de ne pas régler le problème en l’esquivant ou en le supprimant. Son programme économique peut être jugé trop libéral ou trop timide, mais les accusations qui font de lui le représentant des banques (Rothschild, bien sûr !), du grand capital, des riches, de la « France d’en-haut »…, sont outrancières. Tant qu’elles n’ouvrent pas à un débat sérieux sur la nature et les effets réels de la financiarisation mondialisée, elles demeurent au niveau du cliché et relèvent au mieux de la polémique électorale, au pire de l’insulte personnelle. Et elles ne valent en aucune façon excuse pour s’abstenir de voter pour lui.

À l’inverse, les conditions de toute démocratie qui se respecte sont absentes au Front National de Marine Le Pen. Nous le redisons : le FN n’est pas un parti comme les autres. L’élection de Mme le Pen, ou même un score élevé dans les urnes, signifierait un recul des libertés publiques, des conditions aléatoires pour la démocratie, une politique sécuritaire dangereuse, dont nul ne voit les limites. Elle mettrait en cause directement des droits universels accordés aux étrangers par tous les pays démocratiques. Tout cela nous le savons car c’est le fond de commerce inépuisable du Front National depuis ses débuts. On l’a vu encore à la fin de la campagne du premier tour : alors qu’elle semblait en difficulté, la rhétorique violente de Marine le Pen contre les étrangers et les réfugiés, mais aussi contre les musulmans français, a repris le dessus. Sa démagogie, qui consiste à dire tout haut ce que, selon le FN, les Français pensent tout bas, y compris de plus vil, alimente la xénophobie. Elle doit être encore et encore combattue. Quant à son programme économique, hostile à la construction européenne (hostilité qu’elle manipule d’ailleurs à souhait), replié sur l’hexagone, finançant beaucoup (avec des discriminations affichées) mais n’indiquant pas ses recettes, il serait une catastrophe pour la France, et d’abord pour les pauvres et la « France d’en bas » qu’elle prétend défendre.

Dans ce contexte, voter pour Emmanuel Macron ne veut pas dire adhérer à son programme. Cela signifie notre attachement à la démocratie. Dès le 8 mai, la confrontation des idées reprendra ses droits, et d’abord à l’occasion des débats qui auront lieu durant la campagne pour les élections législatives. Mais en attendant, un score élevé en faveur de Marine Le Pen l’encouragerait dans sa rhétorique sécuritaire, dangereuse pour les libertés publiques, et dans ses dénonciations xénophobes.

Il se peut que l’ère des totalitarismes soit derrière nous, mais il se pourrait aussi que même en Europe de l’Ouest, l’ère des populismes autoritaires et des « démocraties illibérales » soit devant nous. On en voit les symptômes dans de nombreux pays. Comme hier face à l’imposture totalitaire, la première tâche intellectuelle qui s’impose désormais sera d’en faire une critique sans merci, mais l’urgence aujourd’hui est de leur faire barrage politiquement.

La position d’Esprit est donc claire : pour la sauvegarde des libertés fondamentales, il importe, ce dimanche 7 mai, d’apporter massivement nos voix à Emmanuel Macron, et de ménager la plus large défaite possible à la candidate Marine Le Pen. Nous vivons un moment ou plutôt une épreuve historique : se comporter en simples spectateurs, sans engagement, serait le pire des comportements.

En lien (Revue Esprit) ici.

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Commentaires (4)

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    Anna

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    Comme beaucoup j’irai voter Macron, résignée et sans autre espoir que celui de retarder l’explosion. Mais je ne supporte plus ces appels bien-pensants et ce refus absolu de voir ce qui produit le vote Le Pen. La désindustrialisation, je l’ai vécue dans le nord de la France. Et la réponse des pseudo-élites locales, c’était comme autant de perroquets : « Innovation, innovation ». Pas pour les habitants des cœurs de villes abandonnés (ils ne manquent pas non plus dans le Midi), ni pour les ouvriers (« illettrés » je suppose). Je ne parle pas non plus des illusions de la société multiculturaliste (avez-vous lu « Rue Jean-Pierre Timbaud », de Géraldine Smith ?).

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      Michel Santo

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      J’ai écrit hier ce que je pensais des comportements et « appels » du monde du spectacles et de certains intellectuels « spectaculaires » pour ne ne Mas partager vos remarques. Mais celui-ci m’a paru se démarquer sur la forme et sur le fond de tous ceux auxquels vous faites référence. Et face au silence et aux justifications d’un vote blanc ou de l’abstention qui cachent mal un désir de renverser la table en permettant à madame Le Pen d’engranger un surcroît de légitimité voire de frôler la victoire, comme vous, lucide, conscient que l’élection de Macron ne suffira pas loin de là à résoudre tous les problèmes qui sont devant nous, il m’a semble nécessaire d’en rajouter, permettez moi l’expression, une couche, à trois jours d’une échéance capitale… Bien cordialement !

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    Dengis

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    Bonjour Michel,
    Tu me déçois par tes propos « bobos » à courte vue, es-tu jamais aller te promener dans certains quartiers? Le désarroi des Français est bien plus profond que tu ne le crois.
    Cordialement, JD

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      Michel Santo

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      Mais Dengis, je suis bien conscient de l’état de notre pays. Et on ne peut qu’en rendre responsable les gouvernements de droite et de gauche qui se sont succédés jusqu’ici. De plus, franchement, dire que, malgré tout ce qui me sépare de Macron, en conscience et pour dimanche, je voterai pour lui, et tiendrais des propos « bobos », ou à courte vue, me paraît lourdement exagéré. Mon soutien est lucide et critique, et il est hors de question pour moi de favoriser et de légitimer directement ou indirectement par l’abstention ou un vote blanc madame Le Pen. Il ne s’agit pas pour moi d’entrer dans un « front républicain » plein de « bonne morale », ma position est politique avant tout ! Comme je crois l’exprime cet appel sans intimidation inbetllectuelle et morale. Il te faut lire cet « appel » en relisant aussi ce que j’écrivais hier sur ces deux impostures des « discours du peuple » et de l’indignation morale, pour avoir une idée de qu’est ma pensée… Bien cordialement ! PS : Mais je vais m’expliquer tout à l’heure quand j’aurais un moment !

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