« Pas pleurer », de Lydie Salvayre. Extrait!

salvayre-2764895-jpg_2397667_652x284

En préambule, je tiens à préciser que toute interprétation de ce texte en réaction à  l’évènement télévisuel (!) d’hier soir sur TF1 serait fort éloigné de mon intention première qui n’était autre que de rendre un hommage appuyé à cette auteure de talent dont la lecture, jadis, des aventures extravagantes, en autobus, d’un beau fragment d’humanité me fit beaucoup rire – jaune souvent!

Un soir, il prend le frais à la terrasse du café L’Estiu sur les Ramblas. Il est seul. Il boit une manzanilla. Il regarde les passants. Il prête une attention distraite aux conversations qui se tiennent alentour. À une table proche, deux hommes sifflent cul sec plusieurs verres d’eau-de-vie. Ils parlent à voix si forte qu’il ne peut que les entendre. Ils sont hilares. Ils rotent. Ils s’entrecongratulent. Ils sont extrêmement contents d’eux-mêmes et se décernent réciproquement des brevets d’héroïsme. Ils ont fait un de ces putains de coup ! Après avoir cueilli deux prêtres morts de peur terrés dans une cave, ils ont flingué le premier d’un coup de revolver pam en pleine poire, puis ils ont dit au deuxième qui se chiait au froc de décamper en vitesse et ils l’ont flingué dans le dos pam pam lorsqu’il s’est mis à courir. Deux curés butés dans la même journée ! Eux qui croyaient rentrer bredouilles ! Pas mal le tableau de chasse ! Il fallait les voir se chier de trouille, les curaillons ! Impayables !

Ils se croient drôles.

Ils s’étonnent que Josep ne partage pas leur allégresse. Serait-il un franquiste ou quoi ?

Josep passe la main sur son front, comme un dormeur qui s’éveille d’un cauchemar. Il est terrassé, comme Bernanos est terrassé au même moment à Palma, et pour des raisons similaires. Il reste figé sur sa chaise, paralysé d’effroi, plus mort que vif. On peut donc tuer des hommes sans que leur mort occasionne le moindre sursaut de conscience, la moindre révolte ?

On peut donc tuer des hommes comme on le fait des rats ? Sans en éprouver le moindre remords ? Et s’en flatter ?

Mais dans quel égarement, dans quel délire faut-il avoir sombré pour qu’une « juste cause » autorise de telles horreurs ?

No os arrodilléis ante nadie. Os arrodilláis ante vosotros mismos.

Quelle abjection sautera au visage de ces deux meurtriers s’ils s’agenouillent un jour devant eux-mêmes ? Josep ne peut plus fermer les yeux devant la vérité qu’il a tenue soigneusement écartée de son esprit et qui, soudain, gesticule, vocifère, et violemment l’apostrophe : chaque nuit, des expéditions punitives de miliciens assassinent des prêtres et des suspects prétendument fascistes. Moins qu’à Majorque, peut-être, bien que je n’aie pas fait le décompte des crimes, mais la question ici n’est évidemment pas le nombre. Josep, tout comme Bernanos à Palma, découvre qu’une vague de haine ronge ses propres rangs, une haine permise, encouragée, décomplexée, comme on le dirait aujourd’hui, et qui s’affiche fière et contente d’elle-même.

Josep n’aspire plus qu’à rentrer chez lui le plus vite possible. Sa décision est prise. Il ne s’engagera pas dans la guerre. On va peut-être le traiter d’embusqué, il s’en fout. Il rentrera au village avec Joan et Rosita. Montse, qui refuse de partir, restera avec Francisca.

Ça la fera grandir.

Il ne croit pas si bien dire.

Le lendemain, c’est le 8 août, se souvient ma mère sans une once d’hésitation (moi : tu te rappelles cette date ? ma mère : il paraît que j’ai une tête de linotte, c’est ce con de docteur qui le dit, mais tu vois !), le lendemain, le Conseil des ministres du gouvernement français décide la non-intervention en Espagne, tout en déplorant extrêmement extrêmement extrêmement la guerre effroyable qui ravage ce beau pays.

Españoles,

Españoles que vivís el momento más trágico de nuestra historia

¡Estáis solos!

¡Solos!

Les plaidoiries de l’écrivain José Bergamín (catholique, républicain, paradoxal, attaché culturel à l’ambassade d’Espagne à Paris) en vue d’obtenir des appuis financiers et moraux, n’ont donc servi à rien.

Toutes les associations d’anciens combattants français ont signifié au gouvernement français qu’il devait rester neutre dans les affaires d’Espagne, et Saint-John Perse, apeuré, est allé en ce sens.

Quant aux dirigeants soviétiques, ils ont hésité encore, cependant que Hitler et Mussolini aidaient les troupes franquistes à franchir le détroit de Gibraltar. Il faudra attendre le début septembre pour que Staline se décide à soutenir les républicains, et que les premiers bateaux chargés de matériel militaire quittent Odessa.

Toutes les palabres sont faibles, me dit ma mère, pour exprimer le desengaño, la déception mezclée de ire que Josep ressent en s’informant de ces nouvelles. Et quand j’opère une marche arrière en esprit, ma chérie, je me rends compte que sa mélancolie a commencé, si je ne m’abuse, à ce moment-là.

Pas pleurer de Lydie Salvayre, Seuil, 280 pages, 18,50 euros.

 

Où en est-on vraiment du rachat de l’Indépendant et du Midi Libre, notamment, par le groupe de J.M Baylet?

IMG_0500.JPG

Hier, dans un billet surtout consacré aux racines culturelles et politiques communes de l’Indépendant de Perpignan et de la Dépêche du Midi, je faisais état  du fait que les négociations exclusives ouvertes début septembre entre La Dépêche du Midi et le Groupe Sud Ouest (GSO), concernant la vente des Journaux du Midi (Midi libre, L’Indépendant, Centre presse Aveyron), étaient prolongées au-delà du 31 octobre. Selon PresseNews.fr, un audit diligenté par le groupe toulousain sur les Journaux du Midi révélerait en effet plusieurs points noirs. Une importante hémorragie de journalistes, seraient attirés en effet par l’aubaine d’une future clause de cession, au point que, de sources syndicales, les 3 millions d’euros provisionnés par La Dépêche pour la clause en question seraient probablement insuffisants. D’autre part il s’avère que les rotatives de l’Imprimerie du Midi sont en mauvais état et que le coût social induit par la réorganisation des régies publicitaires aurait été largement sous estimé par la Dépêche. On comprend donc pourquoi, dans ces conditions, le groupe de Jean-Michel Baylet, leader du futur tour de table qui regroupera aussi Centre France (La Montagne) et des acteurs locaux – en particulier l’architecte François Fontes et l’industriel Louis Nicollin -, s’est pour l’instant abstenu de présenter un dossier de rachat à l‘Autorité de la concurrence … À noter qu’hier Louis Nicollin était sur toutes les pages du Midi Libre en super commentateur de l’actualité nationale et régionale. Sans doute un hasard! Quant à François Fontes, qui n’est plus qu’accessoirement architecte et principalement homme d’affaires avisé, l’opportunité d’un foncier important et disponible dans le périmètre du Midi Libre ne doit pas le laisser insensible … À suivre!

Chronique de Narbonne et d’ailleurs: Les liaisons « dangereuses » entre l’Agglo de Carcassonne et le Conseil Général de l’Aude.

Sans titre - 3

Une enquête très fouillée de la Dépêche du Midij’en disais quelques mots ce matin, de la Dépêche, sur un autre sujet – qui décrit les nombreuses passerelles politiques et administratives entre le Conseil Général et l’Agglomération de Carcassonne. Un concentré de tout ce qui éloigne les électeurs de la classe politique,  et ce à tous les étages de la vie publique: cumul des mandats, gestion patrimoniale des carrières, exfiltrations de collaborateurs de cabinet dans des collectivités amies pour se faire élire conseiller général, fonctionnaires d’une collectivité élus d’une autre voisine, etc… Une situation tellement caricaturale qu’elle devrait figurer comme étude de cas dans toutes les bonnes écoles de formation de nos élites administratives. On se moque souvent de nos voisins italiens du Sud et de leurs méthodes pour ce qui concerne la gestion de leurs institutions locales, mais force est de constater qu’en la circonstance et dans notre région, il n’y a pas que le climat qui nous rapproche. Le plus rigolo est que la presse du jour concurrente, le Midi Libre, nous informe que le Conseil Général de l’Aude, au travers d’un réseau de collectivités locales à l’acronyme bucolico-touristique – REVMED -, vient d’être récompensé par le prix « Territoria d’Or 2014 ».

« L’Indépendant » dans les mains de Baylet rejoint la tradition politique de ses fondateurs…

Unknown

Le changement de propriétaire du quotidien L’Indépendant de Perpignan, dévoilé le 28 août par les parties engagées, se traduit petit à petit dans les faits. Le journal historique des Pyrénées-Orientales se prépare à tomber, avec le reste du groupe des Journaux du Midi, dans l’escarcelle du groupe la Dépêche du Midi- même si quelques problèmes consécutifs à un audit interne restent encore à régler et sont certainement avancés dans la négociation en cours avant la signature officielle de cette cession. Sauf coup de théâtre, l’Indépendant, deviendrait donc la propriété du président du Parti Radical de Gauche (PRG), J.M Baylet, partenaire du gouvernement dirigé par Manuel Valls. Quant au  titre Midi Libre, il serait vendu à des investisseurs … montpelliérains!

Articles récents