Chronique de Narbonne, et d’ailleurs: « Henri Gougaud, Les voyageurs de l’aube »

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Jean Pierre Vialle lit beaucoup et note ses impressions de lecteurs compulsif dans un blog: « Mes belles lectures ». Je le connais depuis de nombreuses années. Nous avons eu l’occasion de nous rencontrer alors que nous étions encore en « activités professionnelles ». L’économie régionale et locale, les entreprises en étaient l’occasion. J’ignorais alors son goût pour les livres. À la « retraite » (active) désormais, résidant dans le « Narbonnais », il nous fait partager ses « coups de coeur ». Quand l’envie lui prendra, il pourra déposer, comme aujourd’hui, dans ce « Coin lectures » de Contre-Regard.com, certaines pages de son journal de lecteur. Comme celle-ci consacrée au dernier roman de Henri Gougaud: « Les voyageurs de l’aube », Albin Michel, 2015. On pourra lire aussi avec profit la très subtile analyse qu’en fait Claire Mazaleyrat: (ici)

Un  petit coté «Mille et une nuit» dans ce roman… Arrivant de différentes villes, des voyageurs sont accueillis dans un ermitage du désert égyptien occupé par un vieil homme seul, Nathan… Il est là depuis bien longtemps… Il est ravitaillé par un âne, qui part régulièrement seul vers la ville et en revient chargé de provisions… Un petit côté magique et mystérieux.
Tous, venus d’horizons et de villes diverses sont là pour attendre une caravane qui leur permettra de rejoindre la civilisation et la vie. Il y a là un moine grec Hilarion, Zahra une femme enceinte, Madjid qui a fait partie d’une caravane attaquée, Adour musicien d’Erevan (luthier), un turc aveugle Kabir qui cache un poignard dans sa manche, un chamelier…
Nathan meurt dès le deuxième jour et les laisse seul dans sa modeste demeure… Il dormira pour l’éternité, comme tous ceux qui l’ont précédé, dans le sable à coté de l’ermitage. Avant de partir,  il a confié à Madjid la responsabilité de sa modeste demeure et par là même celle de guider les voyageurs au sein du désert, en allumant tous les soirs une lanterne à sa fenêtre…
Les voyageurs découvrent dans sa correspondance qu’une mystérieuse femme, Fahima, amoureuse du vieil homme le ravitaillait régulièrement depuis la ville… Qui est elle? Seuls entre eux, ils apprennent à se connaître…
Tour à tour, ils vont raconter leur vie, et chaque jour, un ou plusieurs contes… des contes orientaux dans lesquels se mêlent, princes et mendiants, guerriers et femmes faciles, hommes et enfants, amour et haine, batailles, mort et religion,  surnaturel et sagesse philosophique …
On retrouve là, le coté mystérieux de l’Orient, toute la sagesse de l’auteur, tout son talent de conteur, toute sa connaissance des contes du monde et toute la poésie de son écriture. Ces veillées de contes nous apprennent que tous ne sont pas là par hasard, certains se connaissent depuis bien longtemps et sont là pour assouvir une vengeance….
Dévorez-le ou passez dix soirées de voyage dans la fraîcheur du désert égyptien, dix soirées de rêve et de dépaysement, de sagesse et de plaisir
Né à Carcassonne d’un père cheminot et d’une mère institutrice, Henri Gougaud se rend à Paris dans les années 50 où il entreprend d’écrire et de chanter. Il sera parolier pour Juliette Gréco, Jean Ferrat et Marc Ogeret. Plus sur Henri Gougaud.
Extraits:
« La vraie grâce en ce bas monde n’est pas de crouler sous les ors, mais de n’avoir rien à perdre » (P. 15)
« Je fus pour lui, des mois durant, un instituteur exigeant. Il fut pour moi, sans le savoir, , un père nourricier de mes jardins intimes. Il m’apprit l’attention aimante, le goût patient du beau devoir, l’enthousiasme retenu quand l’ignorant sort de sa nuit et touche à sa terre promise. Quand enfin, il me lut un conte en suivant les lignes du doigt, j’eus le sentiment ébloui de le découvrir tout nouveau » (P. 59)
« Il suffit parfois de se taire et les réponses viennent seules, elles ne demandent que cela, mais les questions les effarouchent, elles parlent trop fort, elles remuent, elles ne désirent pas, elles veulent, elles ignorent que le silence est le berceau où se murmure tout ce qui vaut d’être entendu » (P. 65)
« Le seul véritable ennemi, le seul menteur, le seul vrai diable, le connaissez-vous ? C’est la peur. C’est elle, moins qui te tient, c’est elle qui te boit le sang et trouble assez ton œil poilu pour et faire voir un démon où n’est qu’un Dieu en promenade » (P. 167)

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