Chronique du Comté de Narbonne.

 

 

 

 

 

 

 

Samedi 5 Mai de l’an 2012

Mon oncle !

Hier, la lecture d’une de nos deux gazettes locales m’a particulièrement réjouit. Réjouit et navré devrais je plutôt dire. Enfin, je ne sais ! Navré, par la pauvreté du style du nouvelliste envoyé en cette périlleuse mission de devoir rendre compte de la visite  du nouveau roi de Septimanie, le sire Triste Bouquetin, venu en terres narbonnaises et en conséquente délégation y poser la première pierre d’un nouveau studium dédié aux affaires immobilières ; comme je le fus tout autant par son indigeste et apologétique  poulet, que ne renierai point un quelconque et besogneux préposé aux écritures d’une officine comtale. Mais lecture réjouissante, aussi, par sa désespérante et persistante démonstration des réciproques attirances entre gens de gazettes et gens de pouvoir, dans l’allégeance ou la détestation, sans exclure cependant, par une de ces étranges alchimies indifférentes à la logique, l’une et l’autre à la fois. A cet égard, le destin de ton ami de la Natte, me semble tout à fait emblématique de cette perverse fraternité. Pardonne moi ces paradoxes, mon oncle, mais il faut bien en faire, n’est ce pas, quand on réfléchit ? A propos de ton ami, je dois en confidence te dire que, depuis son adoubement au Château, sa plume gazetière nous manque. Il avait du talent, le bougre ! quoique l’on puisse, de son usage penser en ces temps où le duc de Lemoyniais régnait. Faut-il donc convenir, depuis, à lire les fades et fastidieuses gazettes, que mensonges et contre vérités n’existeraient point en ce vénérable Comté ; que le sire Labatout et son parti de la rose, par la grâce d’une improbable divinité,  en seraient éternellement protégés ? Ce que je te rapporte souvent, dans le secret de ma correspondance, suffit pourtant à en démontrer la puérile inanité. Ainsi donc, mon oncle, concluons, à titre provisoire, que, de talents, nos gazettes n’en disposent ; et que, de complicité comtales, les soupçons en témoignent. Jacques de Molénat, un nouvelliste indépendant de mes amis, dans une publication parisienne fort connue, l’établit lui même sans conteste en relevant que nos gazettes comtales, des réclames des marquisats et comtés, ont un besoin vital, et disposent, de ce fait, pour leur influence, d’un efficace et complaisant levier.

A ce propos, te souviens-tu, mon oncle, de ce que ton ami Honoré fait dire, dans sa grandiose comédie humaine, à un de ses pittoresques personnages? : « – Blondet a raison, dit Claude Vignon. Le Journal au lieu d’être un sacerdoce est devenu un moyen pour les partis ; de moyen, il s’est fait commerce ; et comme tous les commerces, il est sans foi ni loi. »

Ah ! mon oncle, terminant cette lettre ce dimanche soir, une dépêche vient de m’être apportée annonçant l’élection de François de Gouda au trône de France. La Lumière vient donc de triompher des Ténèbres, pour parler à la manière du petit marquis de Gag Bang. Que la joie demeure en ces crédules esprits, mon oncle ; jusqu’à ce que dame Fortune, à défaut de Cassandre, s’en vienne les réveiller.

Bonne nuit, mon oncle ! 

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Commentaires (2)

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    raynal

    |

    Et le bon peuple s’esbaudit….

    Habemus praesidens…Ave Gouda Imperator…!

    Joie, joie, pleurs de joie…

    Il ne nous manque plus que l’ineffable Jack pour nous ciseler une formule définitive et immortelle, mais faisons lui confiance, il va s’y mettre…Ces gens là ne deçoivent jamais !

    Moi, je relis Ronsard..

     » Vivez si m’en croyez, n’attendez a demain

      cueillez dès aujourdh’ui les roses de la vie  »

    Et puis cela aussi…(Ce n’est pas de Ronsard)

    Oublions qu’ici bas tous les reves s’éffeuillent

    Et qu’il est une épine aux roses que l’on cueille…

    Je souhaite a nos nouveaux et heureux élus les épines les moins acérées possibles.

    A toi.

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    Michel Santo

    |

    Epatant!

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