Elle affectait une mine coquine et amusée ; et son premier geste fut de nous tendre une carte-cadeau…

       

Ce matin, elle a demandé à sa mère de soigner sa coiffure ; de lui faire deux longues nattes pour enclore son visage et lui donner cet air de petite fille « russe » que nous aimons. Sa peau souple et claire paraît ainsi encore plus fraîche et ses grands yeux gris semblent beaucoup plus lumineux. C’est ainsi qu’elle nous est apparue, samedi, sur le coup de midi, dans l’encadrement de la porte d’entrée. Elle affectait une mine coquine et amusée ; et son premier geste fut de nous tendre une carte-cadeau au dos de laquelle elle avait aligné des mots tendres et délicats, comme seuls les enfants savent en toute innocence les écrire. Sa mère, à ses côtés, portait une assiette couverte d’une feuille de papier aluminium protégeant quelques crêpes. « C’est moi qui les ai faites », s’est-elle empressée de préciser, après son « Coucou ! » que nous n’avions pas entendu depuis bien trop longtemps. Le jour était enfin venu où nous allions pouvoir partager ce repas de midi tellement attendu – sans ses parents – ; comme nous le faisions avant que cette pandémie ne vienne bouleverser nos modes et rythmes de vie. Mila était visiblement heureuse d’être avec nous et tenait à diriger la conversation à table. Une petite fille de 9 ans a beaucoup de choses à dire, en effet, et qui demandent la plus grande attention. Sur ses copines qui souvent « l’agacent » parce que dans sa chambre elles en font trop à leur aise ou sur son instituteur, trop sévère à son goût, qui lui donne à apprendre des fables longues et difficiles (le corbeau et le renard). Elle nous confesse aussi avoir perdu plusieurs étuis de son appareil dentaire, et que sa mère l’avait « grondé », ce matin même ; nous parlons de la grossesse de sa grande soeur, dont nous discutons – qu’elle voit peu et que nous languissons – ; de « l’amour » adolescent de sa petite soeur, sur laquelle elle projette déjà les siens ; de l’enfant de son grand frère, que nous verrons ensemble tout à l’heure, quand elle sortira du conservatoire de musique voisin, un petit garçon d’un an, qui l’intimide et la laisse muette, ne sachant quel rôle jouer. Elle nous dit aussi ne pas trop savoir ce qu’elle va faire durant ces vacances de février, où il est vaguement question de Lyon, peut-être !… Je la regarde et l’écoute et m’étonne qu’elle ait si vite grandi en si peu de temps : elle déroule ses pensées et ses phrases sans creux ni heurts, à présent ; et son regard sur les autres et le monde s’aiguise, s’approfondit. Je la regarde et l’écoute et se confondent alors son enfance et la mienne ; le temps se contracte et viennent des fantômes se mêler à ses rêves de petite fille. Un temps que l’écriture de ce moment rend fluide, éternellement présent ; où rien n’est plus qu’émotion…

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Commentaires (1)

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    Martine et Jean Marie OLIVE

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    Merci Monsieur Santo pour ces lignes pleines de tendresse.

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