L’ Oeuvre au noir: notes, suite.

 

 

   

  J.Bosch: le Paradis et l’Enfer.

 

 

J’ai laissé l’ouvrage à la fin du chapitre  » La maladie du Prieur « . Que noter ici qui fasse sens dans le moment présent? Peut-être ce passage du dialogue de Zénon avec Le prieur du couvent des Cordeliers de Bruges

                                                                   .°.

 

Zénon — Votre Révérence aura sans doute éprouvé de grands revers.

Le prieur — Que non! j’ai été courtisan bien vu par le maître, négociateur plus heureux que mes faibles talents ne le méritaient, mari fortuné d’une pieuse et bonne femme. J’aurai été privilégié dans ce monde plein de maux. …Ne disiez-vous pas que les petites gens que vous soignez suivent avec sympathie les mouvements de la prétendue Réforme?

Zénon — Je n’ai rien dit ni remarqué de pareil. Votre Révérence n’ignore pas que ceux qui entretiennent des opinions compromettantes savent d’ordinaire garder le silence. Il est vrai que la frugalité évangélique a des attraits pour certains de ces pauvres. Mais la plupart sont bons catholiques, ne serait-ce que par habitude.

Le prieur — Par habitude…

Zénon — Pour moi, ce que je vois surtout dans tout ceci, c’est l’éternelle confusion des affaires humaines. L’espagnol persécute les soi-disant réformés, mais la majorité des patriotes sont bons catholiques. Ces réformés s’enorgueillissent de l’austérité de leurs mœurs, mais leur chef en Flandre, Monsieur de Bréderode, est un coquin débauché. La Gouvernante, qui tient à garder sa place, promet la suppression des tribunaux d’Inquisition, et annonce du même coup l’établissement d’autres chambres de justice qui enverront les hérétiques au bûcher. L’Eglise insiste charitablement pour que ceux qui se confesse in extremis ne soient soumis qu’à la mort simple, poussant de la sorte des malheureux au parjure et au mésusage des sacrements. Les évangélistes, de leur côté, égorgent quand ils le peuvent les misérables restes des anabaptistes. L’Etat ecclésiastique de Liège qui, par définition, est pour la Sainte Eglise, s’enrichit à fournir ouvertement des armes aux troupes royales, et subrepticement au Gueux. Dans ce tintouin de paroles, ce fracas d’armes, et parfois ce bon bruit d’écus, ce qu’on entend encore le moins, ce sont les cris de ceux qu’on rompt ou qu’on tenaille. Tel est le monde, monsieur le prieur…

 

 

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