La nation française est assurément la moins faite pour recevoir des idées nouvelles […]

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Ce matin encore, deux heures passées en compagnie de Benjamin Constant à lire son journal intime – intime car il n’était pas destiné à la publication. Et à chacune de ses notations, observations et réflexions, où éclate son septicisme railleur, le même éblouissement.

Pas une, en effet, qui ne porte la marque de son implacable lucidité, de son intelligence, fine et profonde ; le tout servi par un style d’une élégance et d’une précision sans égale. Il faudrait tout exposer ici de ce que j’ai mis de côté pour s’en convaincre. Chose impossible évidemment ! Aussi, me contenterais-je de cette dernière remarque, soulignée aujourd’hui. Elle me semble intemporelle ; et parfaitement résonner au présent. Un mort est là, redoutable jusque dans son silence.

 « J’ai éprouvé, ce soir, qu’il faudrait commencer par expliquer chaque parole pour discuter une question ; sans cela on ne rencontre que des gens qui répondent à ce qu’on n’a pas dit. Et l’on se fatigue en pure perte. La nation française est assurément la moins faite pour recevoir des idées nouvelles ; elle veut des choses reçues qu’elle puisse commodément affirmer sans les avoir examinées. Quand elle prend des idées nouvelles, c’est-à-dire contraires à ce qui a été dit longtemps, elle ne les embrasse que sous la condition de ne pas les examiner et, pour fermer tout accès à l’examen, elle les embrasse avec fureur. »

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