Le clivage centre-périphérie n’explique pas tout du mouvement social des « gilets jaunes »…

 

     

Je lis ici où là qu’avec ce mouvement des « gilets jaunes », beaucoup découvriraient une France aux niveaux et modes de vie profondément différents, voire très opposés (ah bon !) ; et que cette colère sociale s’expliquerait d’abord par un clivage urbain, sociologique et social : métropoles/ France périphérique. J’ai même lu, en complément, que le problème de la France n’était pas seulement  celui de ses « élites », mais celui d’un groupe social métropolitain et central, diplômé, représentant 25 à 30% de l’électorat, « qui aurait décidé que seule sa façon de vivre était la bonne et que les autres, bouseux, étaient des ploucs voués à la disparition et donc à l’abandon. » (Analyse de P. Guibert sur Facebook) Bref ! une version imagée de la thèse, devenue célèbre et cliché journalistique, du géographe Christophe Guilly. Mais une présentation des conflits de classes devenus territoriaux, qui ne me semble pas du tout résister à l’observation empirique de la réalité urbaine et sociale, celle qui fait mon quotidien régional en tout cas. En effet, pour me limiter au seul ex-Languedoc-Roussillon et à ses territoires, je remarque surtout, de façon très empirique, certes, que ce groupe social métropolitain, aisé et diplômé (dominant dirait d’autres) loin de vivre dans des « centres », réside plutôt dans leurs plus ou moins proches périphéries (maison quatre faces avec piscine !), tandis que les vrais foyers de pauvreté, eux, se trouvent dans les centres des villes moyennes, comme dans ceux des métropoles et le rural profond. Là se trouve, dans ces centres, la France qui souffre vraiment : celle des précaires, des familles décomposées ; celle du chômage et de la vie dans des taudis ; celle que personne ne veut voir et qui ne se déplace pas ou peu. Le clivage centre/périphérie comme recoupant celui entre « riches » et « pauvres », pour utiliser des termes un peu triviaux ne me semble donc pas totalement pertinent pour penser les conflits sociaux en général et celui des « gilets jaunes » en particulier. Ce qui, par contre, ne fait aucun doute est que ce dernier mouvement a-partisan a mobilisé surtout la partie des couches moyennes (employés, artisans, fonctionnaires…) située en bas de l’échelle des revenus de son groupe, celle qui « payent des impôts » et ne bénéficie pas ou peu de revenus de transferts… , mais qui n’est pas cette France des oubliés (celle des « centres ») que nous présentent complaisamment pourtant commentateurs et hommes politiques

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Commentaires (6)

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    cetace_jovial

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    eh ben ça n’interesse pas grand monde votre article….

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      Michel Santo

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      Vous avez les statistiques : le nombre de vues ? ? vous seriez désagréablement surpris ?

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    Anna

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    Pour animer un peu le débat je noterai que le clivage métropoles-périphérie de C. Guilly ne recouvre pas le clivage centres villes-périphérie. La périphérie dont il parle c’est par exemple l’ex pays minier du Nord-Pas de Calais, villes et campagnes comprises (avec en prime le Louvre-Lens). Et l’abandon de nos centres de villes moyennes dans le Midi renvoie également à cette idée de périphérie. Castelnaudary, Carcassonne, Narbonne, c’est la France périphérique dans un des départements les plus pauvres d’ailleurs. Ce qui n’empêche pas qu’y vivent aussi des gens aisés. L’idée de départ de C. Guilly était que la France à l’abandon n’était pas celle des grands ensembles plus ou moins mal réhabilités avec force argent mais une France à l’écart dont on ne parle ni se soucie. Celles des territoires en déclin par opposition aux métropoles ( qui ont aussi leurs poches de pauvreté voir les quartiers dits sensibles de Toulouse) et à leurs banlieues de moins en moins riches à mesure qu’on s’éloigne de la ville.

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    cetace_jovial

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    Je vous chambrai ! je sais qu’avec WordPress vous avez accès aux stat ! c’était juste par rapport aux nombres de commentaires, d’habitude il y a pléthore…Bien Cordialement.

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    Michel Dumas

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    En effet, le clivage centre-périphérie n’explique pas tout, il explique même rien.
    Selon moi, et çà peut faire l’objet d’un débat,il n’y a pas clivage.
    S’il existe bien un ras le bol général indéterminé, lié pour l’essentiel à un manque d’explications préalables sur les transformations impératives du pays de la part du gouvernement, existe aussi, de manière sous-jacente un ras le bol d’une démocratie qui ne fonctionne pas pour 60% de la population.
    En effet , les présidentielles ont montré qu’entre abstentionnistes, votes blancs ou nuls et votes contres 60% de la population n’était pas représentée à l’assemblée.
    Même si le Sénat réduit cet écart, les citoyens concernés ont le sentiment de n’être jamais entendu.
    Alors ils se font entendre dans la rue à la première occasion. L’augmentation des taxes en est une.
    S’ajoute à ce grognement, le fait que certains partis non représentés proportionnellement contestent publiquement le résultat démocratique et l’incendie peut prendre.
    S’ajoute en sus, la position d’une équipe gouvernante qui ne tient pas compte de cette fragilité « constitutionnalisée en 1958 » dans ses prises de décisions pour que tout explose (cf la fracture sociale de Chirac).
    Certes je m’échappe du clivage originel, mais ce clivage là me fait très peur.

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      Michel Santo

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      C’est entre les raisons pour lesquelles j’ai écrit que ce mouvement était la réplique sociale de la présidentielle. Un mouvement qui mobilise pour l’essentiel les abstentionnistes du premier tour et les extrémistes de droite et de gauche…
      Dans l’analyse il faudrait aussi prendre en compte les effets de la révolution numérique sur l’industrie des médias (instantanéité, recherche du maximum de clics pour conquérir des parts de marchés publicitaires etc) ; ses effets aussi sur le rapport au politique et sur les formes à mon sens obsolètes de la représentation de la « volonté générale »….
      Bien cordialement !

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