Question d’identité, suite.

 

 

 

J’avais promis à mon ami blogueur P-H Thoreux de poursuivre notre discussion sur l’identité française ( voir billet en lien ). Voici ma lecture de l’article de Finkielkraut à l’origine de cet échange :

En conclusion de son texte : « Etre français par la littérature. », Alain Finkielkraut (A.F) nous dit : « Je ne veux pas me détourner des urgences du présent, mais je ne vois pas comment une politique digne de ce nom, c’est-à-dire une politique qui soit souci du monde, pourrait faire l’économie de la culture et s’affranchir du passé. » 

Loin donc de tout repli frileux et nostalgique sur une France et des français du passé mythifiés dans leur amour et leur fierté qui ne seraient plus, A.F nous invite au contraire à penser un présent où la culture et l’histoire de ce pays font l’objet d’un déni systématique  d’existence, quand elles ne sont pas étroitement bornées au seul horizon historique de 1789.

Trop lourdes, trop difficiles et demandant trop de temps, la culture et sa langue, comme l’histoire, sont devenues, en effet, des obstacles, dans l’esprit de nos élites modernes, à l’intégration (ne parlons pas d’assimilation, terme devenu infâme) de populations venues d’autres horizons culturels comme de celles résidant en France depuis quelques générations, d’ailleurs…

Etre français, se résument donc, pour ces esprits, à la possession d’un « titre » garantissant l’accès à des droits juridiques, politiques et sociaux. Et sans aucune autre « contrepartie » que la participation aux dépenses communes par l’impôt (exonérée ou pas). Une conception essentiellement juridico-politique qui, à la limite, place tout individu habitant notre planète, et pour peu qu’il adhère, ne serait ce que formellement, à nos valeurs constitutionnelles, en situation de se revendiquer « français ».

Une « francité » qui, de fait, promeut un « être » a-historique et a-culturel, délesté de toute référence à cette dimension spirituelle (conceptuellement difficile à cerner, j’en conviens) dans laquelle se trouve fondue une histoire et sa projection dans l’avenir, une langue et sa capacité d’énonciation, une culture et sa faculté d’adaptation. Et qui, comme le note Koz, dans un de ses billets, « ramène l’identité nationale à quelques grands principes, certes louables, mais si généraux et communément partagés qu’ils sont évidemment impuissants à caractériser une quelconque identité française  ». Avec, conséquemment, comme seul statut d’appartenance celui de client, de consommateur et de créancier d’un Etat-Providence désincarné.

Un Etat-Providence désincarné ne disposant cependant plus, en outre, des ressources économique, financières et militaires qui lui permettraient de peser dans les débats internationaux et de mobiliser ses ressortissants  autour de  ses seuls attributs de la puissance .

Dans ce contexte, comme les autres nations européennes, la France et les français n’ont d’autres choix, s’ils veulent survivre dans le monde à venir, que de transcender leur vieille identité pour la fondre dans ce qui fait l’identité européenne. Et, au-delà, « d’être fier de ce qui fait l’essence de la civilisation occidentale. »

 Les derniers débats sur « la charte européenne des droits fondamentaux » ne me rendant pas, hélas, très optimiste…

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Commentaires (1)

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    pierrehenri.thoreux

    |

     

    En définitive, je crois bien que nos différences d’appréciation ne sont que des nuances.
    Naturellement, comme vous je partage l’opinion d’AF, selon laquelle on ne peut faire l’économie de la culture ni s’affranchir du passé.E t je vous suis totalement lorsque vous soulignez que notre
    héritage ne saurait se résumer au seul épisode de 1789. Pour au moins deux raisons :
    Tout d’abord, parce que l’histoire d’une nation doit être assumée dans sa globalité, avec ses forces et ses faiblesses, ses échecs et ses réussites, tous porteurs de leçons .
    Ensuite, parce que de mon point de vue, 1789 fut une faille désastreuse dans l’histoire de France. Loin de constituer un modèle, elle défigura le visage de République et aboutit à ce funeste
    anachronisme que fut l’empire. Si l’idée démocratique n’avait pas dans le même temps été vivifiée par les expériences anglaises et américaines, où en serions nous, je me le demande ?

    Cela dit, il me semble que les racines culturelles de la France ne suffisent plus à maintenir la pérennité de l’idée de nation. Je constate avec plaisir que vous projetez cette dernière dans la
    perspective européenne, la seule qui appuyée sur le passé puisse encore produire quelque chose de neuf, à condition d’y croire évidemment.
    Les nations qui la composent ont des cultures si proches qu’il serait vain de nos jours de les laisser à l’état de puzzle dispersé. Ces mêmes nations, enfin guéries des meurtriers conflits
    d’autrefois, peuvent désormais converger vers un vrai dessein progressiste.
    Et il y a la place dans ce dernier à terme pour toutes les nations éclairées, au premier rang desquelles figurent bien sûr les Etats-Unis.

    Je me prends parfois à songer à la force et à la valeur exemplaire qu’aurait une association englobant solidement la Fédération Américaine et son équivalent européen…
    Ce n’est au fond rien d’autre que le projet lumineux développé par Kant, de Paix Perpétuelle… Mais pincez-moi, je rêve !

    PS ce qui pêche douloureusement dans la problématique liée à l’immigration : ni désir de s’approprier la culture du pays d’adoption, ni adhésion à un dessein commun. En somme l’échec du
    multiculturalisme, déploré encore tout récemment par Mme Merkel

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