Sur la promenade des Barques : « Il y aurait tant à dire d’une journée apparemment vide… »

 
 
 
 

Canal de la Robine. Promenade des Barques. Ensemble monumental.

Il y aurait tant à dire d’une journée apparemment vide, songeais-je, assis, « au soleil », sur un banc de la promenade des Barques d’où j’observais, distraitement, l’agitation et les déplacements de flâneurs, pour la plupart jeunes, insouciants et très légèrement vêtus. Les garçons portaient d’amples tee shirts et des jeans informes, les filles de minuscules débardeurs et des pantalons très moulants.

L’air était printanier, chargé de fines particules de désir. Vide, songeais-je donc, assurément, si, comme le pensent certains esprits indifférents, le fortuit d’une rencontre ou d’un évènement ne vient troubler ou éclairer, dans l’ordinaire des jours et pour s’y substituer, le flux continu de nos communes habitudes. Ces pensées tournaient dans ma « tête », alors que je venais de passer une heure et demi dans le cabinet de mon dentiste, allongé sur son fauteuil de travail, le regard absorbé par le clignotement au pouvoir quasi hypnotique de cinq tubes de néons fixés au plafond. Je n’entendais plus que les rares ordres et commentaires de l’odontalgiste « Monsieur peut ouvrir ; Monsieur peut fermer », et les bruits d’aspiration, de forage ou de polissage de ses petits mais terrifiants outils. J’allais oublier la désagréable sensation froide, métallique, aussi, du moule en acier empli d’une pâte bleuâtre au goût pharmaceutique qui me fut introduit dans la bouche. C’est à ce moment là, que la conversation de Virginia Woolf avec l’un de ses proches, m’est venue à l’esprit. C’était un matin d’été, au petit déjeuner, si j’en crois mon vague souvenir. « Que me racontes-tu ? »… « Comment rien ! tu as bien ou mal dormi, ouvert la fenêtre de ta chambre, regardé le ciel, pensé au temps qu’il allait faire, regardé ton visage dans un miroir… Si tu t’en donnais la peine tu pourrais remplir de nombreuses pages de ton carnet». C’est cela, me disais-je un peu plus tard, le plein « d’être » d’une journée, – son apparente légèreté : ce foisonnement de faits et gestes, d’odeurs, de couleurs, de paroles entendues ou saisies par le plus grand des hasards – ; c’est cela ! il est là, sous mes yeux ; il suffit que j’en retire le voile ; que je tente de le mettre en mots, sur une page blanche ou en imagination ; tout en sachant cependant ne pouvoir jamais en rendre compte dans toute ses expressions…

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