Sur les Barques de Narbonne, un moment de grâce pour oublier un matin fort pesant…

 

Moments de vie. Samedi matin, j’attendais une amie à l’ombre des platanes de la promenade des Barques. Il devait être 11 heures, 11 heures 30, peut être ! Les terrasses étaient à moitié vides et les promeneurs rares. L’air était pourtant doux. Des conditions idéales pour s’asseoir sur un banc ou autour d’une table et parler légèrement des choses de la vie qu’on dit sans importance ; de jouir tout simplement d’un moment de sa brève existence et de son éphémère substance. On ne prête jamais assez d’attention à ces détails du quotidien qui rythment nos journées et mobilisent nos sens et nos pensées. Aussi étais-je impatient d’en savourer le plaisir, sachant que le temps me réservait, comme à chacun d’entre nous, son lot d’ennuis et de souffrances. L’esprit en balade, distrait, je ne faisais donc qu’attendre quand une jeune fille est venue à ma rencontre. Une petite brune joliment vêtue d’une petite robe d’été bleue pâle. Son visage était tout sourire ; et ses gestes et son regard étaient encore ceux d’une enfant. Les cheveux au vent, elle rayonnait d’innocence. À son épaule gauche, un sac de toile portant la marque d’un grand magasin, était suspendu. Elle avançait à petits pas vifs en me tendant un prospectus, que je pris ; et que je pris pour la seule raison que c’était elle et qu’elle était adorable, pétillante. Je le lui dis, et nous échangeâmes quelques mots agréables. Poursuivant son office « saisonnier », je la regardais s’en aller vers d’autres personnes. Les unes baissaient la tête, la plupart refusaient son geste, toutes l’ignoraient. Un ange faisait le don de sa présence, et ces gens là, piteusement, le dédaignaient. J’observais cette affligeante scène et désespérais de mes semblables insensibles à cette main tendue et ce visage offert. La grâce venait à eux, ils s’en détournaient. Mon Dieu qu’ils étaient lourds ! Avant que je ne la perde de vue, elle est revenue vers moi et d’un ton amusé et joyeux m’a lancé : « je n’en croiserai pas deux comme vous aujourd’hui ». Le plus beau des compliments jamais entendu depuis longtemps. En face, rive droite de la Robine, en ce meme instant, des manifestants en rangs serrés défilaient. Ils criaient « non à la dictature… non aux vaccins… libertés ». Je trouvais cela tellement dérisoire. Un drapeau tricolore était brandi ; un des indépendantistes catalans aussi, qui ajoutait une touche de ridicule à cet hétéroclite ensemble. Un sentiment de pesanteur existentielle vite refoulé cependant par l’innocence et la grâce d’une improbale rencontre. Merci jeune fille !

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Commentaires (2)

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    ROBIN Michel Peyriac de Mer

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    bonjour Mr SANTO
    joli moment d’une journée …
    mon commentaire pour « la jeune fille à la perle », il y a une quelque vingt ans j’ai réalisé une copie de cette oeuvre de Vermeer
    si c’est possible je vous envoie une copie
    avec mes amitiées

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