Patrice Strazzera : Le sommeil des épaves, sa quête de vérité…

 
 
 
 
 
Patrice Strazzera est un ami passionné de plongée et d’histoire. Dès qu’il le peut, il quitte son atelier d’artisan-bijoutier pour explorer les fonds marins en quête d’épaves du siècle dernier : machines de guerres, avions et bateaux. De ces voyages dans ce monde du silence peuplé de cadavres de fer et d’acier, il en revient avec de superbes argentiques en noir et blanc. Des images troublantes et puissantes de gorgones autour desquelles évoluent des nuages de pescaille. Qu’on ne s’y trompe pas, cependant, Patrice Strazzera, ne voyage pas dans ces « eaux » en touriste. Sa quête passionnée est le fruit d’une longue et patiente préparation physique et intellectuelle. Et sa recherche, un chemin de vérité. Les épaves aux contours froissées par la tragédie et ridées par le temps qu’il nous montre sont les traces résiduelles d’un temps de violences. Il nous rappelle aussi que ces machines de guerre qui gisent enveloppées de mystère et de beauté au fond des mers, sommeillent dans les profondeurs de notre inconscient. Sans jamais tomber dans l’oubli ! Les feux et les bruits de canons entendus aujourd’hui aux frontières de l’Europe en témoignent. Avec cette exposition, Patrice Strazzera nous invite enfin à garder la mémoire vive et nos sens en éveil. Une œuvre salutaire en ces temps somnambuliques.
 
 
Patrice Strazzera « Le sommeil des épaves » : du 4 mai au 26 juin, à la chapelle des Pénitents-Bleus. Narbonne.
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

Je ne connaissais pas Sandra Hurtado Ros, jusqu’à ce que je la vois et l’entende chanter Miguel Hernandez, notamment !

 
 
 
 
 
Je ne connaissais pas Sandra Hurtado Ros, jusqu’à ce que je la vois et l’entende chanter au piano samedi dernier dans la salle des Synodes de l’Hôtel de Ville de Narbonne. Toute de noir vêtue, longue et fine, elle a magnifiquement interprété de sa belle voix de soprano des textes en occitan de Max Rouquette et Gérard Zuchetto, ainsi que des poèmes de Miguel Hernandez et Antonio Machado. Le petit orchestre qui l’accompagnait était dirigé avec beaucoup de sensibilité par Bertand Bayle. Il s’en dégageait une grande harmonie musicale et affective. La voix puissante, charnelle et sensible de Sandra Hurtado Ros quant à elle magnifiait la beauté des textes qui nous étaient si généreusement offerts. Je dois dire que j’ai été particulièrement touché par deux des poèmes de Miguel Hernandez (No quiso ser ; En el fundo del hombre). Un poète très peu connu du public français, mais qui, ici, dans cette ville et les villages environnants n’est pas sans éveiller quelques échos dans de nombreuses familles, comme la mienne. Car Miguel Hernandez est né en effet Orihuela et a vécu quelque temps à Cox, le village tout proche de mon grand-père paternel. Je disais que je ne connaissais pas Sandra avant qu’elle ne nous donne ce récital, mais je dois quand même préciser ici que je connais un peu ses parents et sa mère surtout. Je sais aussi que dans cette famille oncle et frères ont été ou sont musiciens. Alors Sandra, merci ! Merci pour avoir réservé dans votre concert un petit moment de l’histoire de familles venues de ce « coin » d’Espagne entre Elche et Alicante, tout un quartier de Narbonne où elles vécurent dans la pauvreté et la poésie simple de Miguel Hernandez, ce poète chevrier ardent et généreux au destin tragique qui parle encore et toujours au cœur de chacun.
 
 
Tristes guerres
si l’amour n’en est l’enjeu.
Tristes. Tristes.
 
Tristes armes
si les mots ne sont de feu
Tristes. Tristes.
 
Tristes hommes
si d’amour ils ne meurent.
Tristes. Tristes.
 
Miguel Hernandez.
 
 
 
 
 
 
 

Cox. Statue de Miguel Hernandez de sa femme et son fils.

 
 

R.C.N ! La fin du club des cinq…

         

Ils étaient cinq présidents du RCN. Anciens joueurs ou entraîneur. La pratique et la science du jeu réunies. À ce paquet de première ligne, un Directeur Général, l’ancien maire socialiste de Narbonne et député, président de l’Agglo aussi, était adjoint. Son capital relationnel devait multiplier miraculeusement subventions et sponsoring. Comme les pains et les poissons ! Un bloc de compétences inouï pour la Pro 2. Un collectif puissant qui allait redonner du rêve et de l’espoir au RCN ; faire exploser de joie les « tribunes » du Parc des Sports et de l’Amitié. Las ! Jamais ne fut enregistré dans l’histoire du club de « saison » aussi catastrophique et humiliante que celle-ci. Avec le bonus d’une descente en Nationale et un record olympien de points encaissés. Mardi, dans la petite boutique du stade, le pack des cinq a donc décidé de passer la main à « d’autres ». Sans plus d’explications ! On aurait cependant pu attendre une analyse sérieuse et approfondie des raisons de cet échec, pourtant programmé, prévisible ; des raisons qui sont structurelles : économiques et financières. Eh bien, non ! Dans un grand et bel encart vert de l’Indépendant du jour, Gilles Belzons, l’un des cinq, envoie le « ballon » de leur défaite collective dans les mains du maire : « On n’a pas un stade de rugby » ; « il manque des food-trucks, des buvettes, des points de vente et des loges ». Ah bon ! On imagine la tête de Didier Mouly, à l’heure de son petit déjeuner, tournant les pages de son journal, recevoir plein pot « l’ovale » de Bebel dans son bol de céréales « bios ». Un coup à faire des cuirs toute la journée. Fort heureusement, quelques lignes plus haut, le président Campos, lui, plus lucide, précisait : « On a atteint notre seuil d’incompétence. » Qui osera le démentir ?

         

Lui : « Quel est l’âge idéal pour mourir ? » Elle : « Je vais te le dire. C’est soixante-quinze ans. »

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
On fait parfois de belles rencontres sur les réseaux sociaux. Celle de Denis, sur Facebook, en est une. Il y a quelque temps déjà, je ne sais plus à quel propos, je lui avais dit que j’avais tout lu de Patrick Modiano. Fidèle lecteur lui aussi de cet auteur, il m’avait demandé si je connaissais Didier Blonde – je comprends à présent pourquoi. Je lui répondis que j’ignorais tout de lui. Mais l’attention portée à cet écrivain par Denis avait éveillé ma curiosité.

Balade littéraire autour de Robert Bober et Pierre Dumayet entre Bages et Peyriac de Mer…

 
 
 

Bages

 
 
 
« Si j’ai choisi de t’écrire Pierre, c’est que j’ai préféré m’adresser à toi plutôt que de parler de toi. Il m’a semblé ainsi réduire, effacer même par instants, la distance qui sépare la vie de la mort. » Ce Pierre, à qui s’adresse Robert Bober dans sa longue lettre-récit, « Par instants, la vie n’est pas sûre » *, c’est Pierre Dumayet, son ami de trente ans. Pierre Dumayet, l’homme de Cinq Colonnes à la une qui, avec l’équipe de Lectures pour tous, fit lire la France entière et avec qui Bober, devenu réalisateur à la télévision, collabora. Cette lettre-récit, c’est l’histoire de cette rencontre et de leur amitié, de leur relation professionnelle, aussi. Et quelle œuvre commune ! Cinquante émissions, Lire et écrire, Lire et relire, des documentaires sur les correspondances, Flaubert, Van Gogh…, des rencontres avec Duras, Tardieu, Handke, Alechinski…, dont Pierre Dumayet écrivait les textes quand Robert Bober devait trouver les images.
Dans ce livre, on croise Erri de Luca et Jean-Claude Grunberg, Sami Frey et André Schwarz-Bart, Max Ophuls et Truffaut, Celan et Reverdy, Lustiger et Martin Buber, le peintre Serge Lask et le photographe Walker Evans. On plonge aussi dans les récits hassidiques et on y parle le yiddish ; on accompagne Bober dans son enfance d’apprenti tailleur, celle de sa famille et de ses amis ; on l’écoute, on l’entend : « Lorsque je relis ce corps de phrase : « … le travail et la vie, dont “il” leur communique le secret tout autant par l’exemple involontaire que par la leçon délibérée », « il », ce fut le vieil horloger russe qui m’a laissé le regarder travailler et fait écouter le tic-tac des montres anciennes sorties de ses mains […] ce furent tous ceux qui à travers le temps ont tracé les chemins qui m’ont conduit jusqu’aux feuilles blanches sur lesquelles je t’écris […], ceux dont parfois j’ai répété les mots et grâce à qui j’ai pu voir jusqu’à l’enfance. » (Page 441)
Si je vous parle de Robert Bober et de sa lettre-récit, c’est parce que cette après-midi, je suis allé me balader entre Bages et Peyriac de Mer. Bages où Pierre Dumayet a vécu les dernières années de sa vie et qui « habite » désormais son joli petit cimetière. Il me plaît de rappeler, et de le faire savoir aussi à ceux qui l’ignorent encore, que son « esprit », celui que nous fait revivre Robert Bober dans son admirable récit, repose dans un des plus beaux paysages de lagunes et de garrigues de notre région. Cette après-midi, donc, vous dis-je, il faisait un temps vraiment merveilleux. Le ciel était bleu et l’air très doux ; un faible vent du Nord faisait trembler les étangs. Sur leurs eaux, des flamants roses, immobiles, semblaient à leur écoute…
Ah ! J’oubliais ! Avant d’entreprendre cette balade souvenir entre Bages et Peyrac, je me suis arrêté à la « cave à vin, cave à manger » de Lionel Giraud, à Narbonne. J’ai choisi son menu. Un menu parfaitement composé avec des plats tout en saveur et finesse. Sur la table, mon habituelle bouteille du Mas Bau, « Loulou » : le printemps dans chaque gorgée… Et puiqu’il me faut bien terminer ce billet, cette dernière phrase enfin de Bober : « Le partage des sens ne résiste pas à l’examen, le regard sait aussi écouter et le visible se fait entendre »
 
*Une phrase que Bober a trouvée dans « La Nonchalance », un des courts romans que Dumayet a publié aux éditions Verdier (Lagrasse). On trouve ceux de Robert Bober chez P.O.L.
 
 
 
 
 
 
 

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