Le cirque et les perroquets, au fond, sont de superbes images synthétiques de la vie…

   

 

 

« Parce que le cirque, au fond, est une superbe image synthétique. Nous nous y amusons, mais tout en sachant bien que nous y frisons aussi la mort. Ne venez pas me dire que ce n’est pas vous qui vous balancez sur un trapèze, qui enfilez, motocyclette entre les cuisses, les aiguilles de la mort ! Car nous participons tous. De secrètes informations, au plus aigu des réminiscences animales, nous rappellent à tout moment, sous le ciel rose des flonflons, que le cirque est naturel, que cette anxiété que nous éprouvons devant les acrobates et les danseuses de corde, les cygnes savants ou les illusionnistes, c’est l’anxiété même du monde. »

Léon-Paul Fargue : Dîners de lune (Gallimard)

     

« Celui qui se nourrit de perroquets mange des êtres qui parlent le langage humain. Il mange une copie de l’homme. » Mangeurs de mots, un monde neuf naîtra du rien qui vous reste dans la bouche.

Marc Le Bot : La vie des animaux illustres (Fata Morgana; page 99) 

Non ! Philippe Jaccottet n’est pas mort le 24 février 2021 à Grignan, dans la Drôme.

             

     

Non ! Philippe Jaccottet n’est pas mort le 24 février 2021 à Grignan, dans la Drôme.

« Mais faut-il que l’horreur de la mort contamine toute l’étendue de la vie, triomphe en ne laissant rien de beau autour d’elle ? Je me dis parfois : la beauté est aussi incompréhensible que la douleur, donc aussi réelle, donc également forte et nécessaire. Le corps serait comme quelqu’un qui tient une lampe. Il ne faut pas que la lampe refuse de brûler parce que son porteur se fatigue, s’amenuise, s’effondre. » 

À travers un verger, page 38 (Fata Morgana 1973)

 

 

 

Et ce poème : L’ignorant (poèmes 1952-1956. Éditions Gallimard, 1957.)

 

Plus je vieillis et plus je croîs en ignorance,

plus j’ai vécu, moins je possède et moins je règne.

Tout ce que j’ai, c’est un espace tour à tour

enneigé ou brillant, mais jamais habité.

Où est le donateur, le guide, le gardien ?

Je me tiens dans ma chambre et d’abord je me tais

(le silence entre en serviteur mettre un peu d’ordre),

et j’attends qu’un à un les mensonges s’écartent :

que reste-t-il ? que reste-t-il à ce mourant

qui l’empêche si bien de mourir ? Quelle force

le fait encor parler entre ses quatre murs ?

Pourrais-je le savoir, moi l’ignare et l’inquiet ?

Mais je l’entends vraiment qui parle, et sa parole

pénètre avec le jour, encore que bien vague :

«Comme le feu, l’amour n’établit sa clarté

que sur la faute et la beauté des bois en cendres… »

 

 

*Philippe Jaccottet est né le 30 juin 1925 à Moudon, petite ville du canton de Vaud, en Suisse romande. Il vivait à Grignan dans la Drôme depuis 1953 avec sa femme peintre, Anne-Marie Haesler. Il a traduit Goethe, Friedrich Hölderlin (Hypérion), Giacomo Leopardi (Canti), Robert Musil (L’Homme sans qualités) , Rainer Maria Rilke (Elégies de Duino) , Thomas Mann (La Mort à Venise), notamment.  l’Odyssée d’Homère aussi, en vers de quatorze syllabes. 

     

« La vanité et la crainte du ridicule sont les traits les plus saillants du caractère français. »

 
 
 
 
 
 
Dans « L’Âme Française ou la Mesure de l’Espace », l’un des grands chapitres de son livre : « Découverte de l’Archipel » (1932) *, qui commence à la page 61, Elie Faure note, dans un style généreux, pour ne pas dire gourmand, ceci – qui sont les premières lignes – :

À partir d’aujourd’hui, décide d’un style, d’un genre de vie…

 
 
 
 
 
 
-Mon amie Marie-Paule Farina, dont je conseille la remarquable page Facebook, a bien raison ! Une petite cure avec Épictète, au début d’une année nouvelle, ne peut pas faire de mal. Tenez ! ceci par exemple :
 

Le Misanthrope est un philanthrope qui s’est soigné.

 
 
 
 
 
 
« Le Misanthrope est un philanthrope qui s’est soigné. Déçu, mais lucide, il est préoccupé par l’humanité. Il se fait du souci pour l’homme. Il ne confond pas le pipole et l’individu. Se contentant de son malheur, voire de son désespoir dont il tire parfois (selon Alfred Musset) de très beaux chants, lui au moins ne s’occupe pas du bonheur des autres ; il n’emmerde personne. Rousseau l’avait bien compris, qui écrivait à son copain d’ Alembert : « Il n’y a pas un homme de bien qui ne soit pas misanthrope.»
Selon le dictionnaire, qui nous renvoie à l’ours, il est bourru, aime la solitude, évite la société…
Le Misanthrope est un brave type. »
J.A Bertrand : « Les autres, c’est rien que des sales types. » Julliard ; page 31 (1)
 
(1) Dans cet ouvrage, que je recommande, Jacques A. Bertrand dresse le catalogue ironique de ces individus qui nous empoisonnent la vie. Les Autres. On y retrouve le Touriste, qui gâche le paysage. Le Parisien (prétentieux capital) et le Provincial (provincial !). Le Voisin (inévitable), l’Imbécile heureux (désolant), le Médecin et le Malade (dans le même panier). Le Conjoint, pour le pire. Le Jeune (heureusement provisoire)… Et même l’Agélaste, qui, comme chacun sait, est celui qui ne rit jamais. Ciselés, brillants et drôles, ces portraits – qui ont déjà fait le bonheur des auditeurs des « Papous dans la tête » sur France Culture – raviront tous les amoureux du bel esprit.
 
 
 
 

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