Chronique du Comté de Narbonne.
Ciel ! Quel froid, mon oncle ; quel vent ! Mais d’eau ? Hélas point ! Certains éminents académiciens de la Société Royale affirment doctement que notre petite terre serait à un tournant (!) de sa longue histoire, comme il y en eut tant dans son passé, qui verrait son climat brutalement changer. Oracles qui font les délices et les profits de nos suivistes gazettes qui, chaque jour ou presque, prédisent des mers de glaces en Egypte et des océans de sable en Sibérie. La peur, cette sinistre passion à l’origine de tant de tyrannies, envahit insidieusement les esprits de ce siècle, mon oncle ! A ces dires, je te l’avoue humblement, je préfère l’observation des mouvements de la nature et des saisons ; et te faisais remarquer, dans ma dernière lettre, l’arrivée des premières hirondelles, comme chaque année à la date qui me vit naître ; et savoir, comme nous l’enseignent les anciens, qu’elles ne font pas le printemps. Cela suffit à mon entendement et me rassure sur l’apparente aberration de nos présentes et forts désagréables, j’en conviens, intempéries.
Il est cependant d’autres constantes, sociales celles là, qui, elles, mon oncle, à l’inverse des grandes migrations naturelles, ne m’enchantent guère ; je pense ce disant, à cette autre espèce de volatile, à deux pattes et deux bras, qui, régulièrement, vient siffler bruyamment dans les complaisantes colonnes de nos « feuilles » locales. Un couple de personnages légers et sautillants, car il s’agit d’oiseaux de notre sorte, mon oncle, mais dotés, par un esprit malin, d’un chant à faire douter les esprits les plus tolérants qu’il puisse exister, en ce monde, un brin, si je puis dire, sinon de raison commune, à tout le moins de modeste réserve. Tu l’as compris, mon oncle, c’est dans le théâtre politique du Comté que s’ébattent nos drôles de moineaux ; ils y dirigent, en duo, une section du parti de la rose. Ils sont deux ; mais quel ramage ! Lui est long et mince ; elle est courte et replète ; leurs mines sont fraîches et avenantes ; leurs libelles pompeux et violents ; et, si leur vue est large, leur discipline consentie l’est comme on consent une avance : dans l’espoir d’un profit. Jeunes, ils chantent déjà un langage de vieux, plein de cette suffisance qu’arborent les ambitieux; et rien ne les touche moins que les pires turpitudes, qui ne sauraient concerner, par un décret conçu par je ne sais quelle divinité, les « amis » du peuple et de l’humanité. Voilà donc, mon oncle, le sieur Bonoeil (1) et la dame Sophie de Malmon (2) puisqu’il s’agit bien d’eux, se lancer récemment dans un assaut risqué contre le sieur Lemaillet (3), au motif scandaleux que, de son temps, le Comté étouffait sous les prébendes ; et de se fourrer, ce faisant, tant l’innocence leur brouille l’esprit, leurs épées dans les pieds, et le reste ! Rends toi compte, mon oncle ! Ce Bonoeil est arrivé dans la cantinière du Comte de Labatout (4), qui l’a propulsé, sitôt installé, au grade envié de jardinier en chef du Grand Comté (5); et dame Sophie, elle, fille de Raymond de Courrière, qui fut le seigneur de ces terres d’Aude (6), n’a fait que s’installer dans une discrète charge héritée de son vénérable père ; et gérée par le même parti au pouvoir du Comté, Petit (7) et Grand ! La décence eût voulu qu’ils se taisent, n’est ce pas, mon oncle ? Car en l’espèce, de prébendes, celles là, nourries de lourdes dîmes prélevées sur le dos du bon peuple, n’ont rien à envier à celles jadis perçues par nos généreux évêques. Un comble, pour le « parti du progrès » ; mais un don de la providence pour l’entretien de ses troupes. Quelquefois, même les dévots se rendent ridicules, mon oncle ; et la communication découvre à leur insu des imperfections que leur retraite couvrait. Comme le dit si bien notre Jésuite admiré : « La facilité est une branche de bas esprit. ». Et ce qui vaut ici, pour le parti de la rose, vaut sans doute ailleurs pour celui de l’oeillet, du lys ou de la primevère. Il est des intérêts communs, en effet, dans l’ordre politique, qui transcendent les valeurs de justice et de beauté proclamées à grands coups de trompettes par les différents chefs d’églises et de partis. Toi même, mon oncle, me rapportait dans une de tes études récemment adressée, les us et les coutumes des seigneurs de tes terres ; seigneurs du parti opposé à celui qui gouverne les miennes ; et que conforte en tout point mon propos de ce jour.
Contenir, se défier des passions, te disais je dans l’entame de cette lettre. Garder en toute chose la lucidité qui sied aux esprits les plus nobles ; voir, à s’en brûler les yeux, que la misère de l’homme ne consiste pas seulement dans la faiblesse de sa raison, l’inquiétude de son esprit, le trouble de son coeur ; et qu’elle se voit encore et surtout dans un certain fond ridicule des affaires humaines. Shirley et Dino, saltimbanques parisiens, triomphent à le montrer à la Cour ; leur talent et leur humanité nous aident à l’accepter. Le mieux que l’on puisse espérer de nos deux duettistes narbonnais, mon oncle, c’est qu’ils s’en inspirent ; ils seront moins ridicules.
Je t’embrasse, mon oncle.
(1) Laurent Borreil, secrétaire de la section PS de Narbonne
(2) Sophie Calmon, idem
(3) Patrice Millet, ex DGS de la Ville de Narbonne
(4) Jacques Bascou, député-maire de Narbonne, Président du Grand Narbonne, etc…
(5) Grand Narbonne ( Communauté d’agglomération )
(6) Conseil général de l’Aude
(7) Ville de Narbonne
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Romain
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Votre plume est agréable mais si j’eprouve toujours un certain malaise..
Un peu comme lorsque on lit du Brasillac ou du Drieu la Rochelle… Ne vous offusez point: contrairement à eux, vous n’êtes coupable d’aucun crime… mais ne vous en flattez point non plus:
contrairement à eux, vous n’êtes dépositaire d’aucun talent…
Pourtant, il est vrai que votre plume est plaisante et que ce style « XVIIème siecle », siècle des précieuses et de l’hypocrisie, vous réussit…
Mais en parlant d’hypocrisie, pourriez vous, Sire de Mévoitard remémorer à votre cher oncle vos fonctions passées au sein du Gadn Narbonne du temps du comte Lemoyniais?
Vous souvenez vous de cet emploi que votre oncle qualifiérait de rente, moi même d’hypothétique et quelque bailli du roi de quasi-fictif, tant il est vrai que la seule production et note sur
lesquel on pouvait lire régulièrement votre nom etait la fiche de paye?
En ce XVIIème siècle des fabulistes, il ne faudrait pas que quelques affabulateurs oublient la fable de la « poutre et de la paille »…
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Michel Santo
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Monsieur!
Ah , Monsieur! ouvrant ce jour seulement mon courrier, je tombe sur le vôtre. Permettez moi, et n’en prenez pas ombrage, de noter qu’à la pauvreté de son style (le style est l’homme même! ), s’y
ajoute une vulgarité de ton, qui donnent à votre nom, pourtant si aimable et prestigieux: Romain! je crois, une forme définitive de bêtise que Cicéron et Virgile n’auraient pu imaginer dans
l’esprit du plus borné de vos coreligionaires. Enfin! Que je fus le conseiller à temps très partiel du duc de Lemonyais, qui ne le sait , qui me lit? Que je fus rémunéré pour cet emploi, oui bien
sur! Mais vous me semblait bien assuré de mes compétences d’antant et de ma production intellectuelle d’alors. Avez vous donc accès aux fiches de paye en question? Et qu’est ce à dire cette
attaque ad hominen et au ras…des pâquerettes. Voudriez vous que je raconte ici, les débuts de l’agglo, les demandes indemnitaires de certains élus de l’opposition de l’époque, leurs confidences
sous le sceau du secret…leur travail (!!!) et celui de certains de leurs collaborateurs. Jamais je ne tomberai dans ce genre de prose de basse fosse, je vous y laisse mon cher Romain. Et
puisque vous citez Brasillach à propos de mon style ( que vous qualifiez cependant de plaisant ), ce qui dénote chez vous une inculture littéraire proprement abyssale, permettez moi de vous dire
que le vôtre, de style, lui, est tout à fait dans le ton et l’esprit des amis politiques de ce Monsieur. Ils portaient une chemise noire et un béret de la même couleur sur le crâne… Bien à
vous! Nota bene: je vous laisse aussi méditer cette remarque de mon cher Flaubert, que je lis tous les matins, de mémoire ceci: » J’appelle bourgeois quiconque pense bassement «
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