Contre-Regards

par Michel SANTO

« Un débat sur l’identité nationale… Et pourquoi pas ? »

« Il n’y a pas d’essence nationale. Il y a une adhésion volontaire à des principes, qui sont ceux de la République et des droits de l’homme, comme le préconisait déjà Renan. » nous dit Laurent Joffrin dans le « Libé » de ce jour. Soit ! Il nous faudrait donc admettre, selon notre éditorialiste, que d’autres Etats que le nôtre étant tout aussi républicains et respectueux des droits de l’homme, l’idée même de nation serait par nature…trans-nationale !!! Autant dire une idée vide de sens, autre que juridico-politique. Un ensemble de droits et de principes détachés d’une histoire, d’une culture, d’une langue, d’un territoire. Une espèce d’auberge espagnole dans laquelle chacun pourrait y entrer avec son bagage culturel propre, son identité, la conserver et la défendre. Evidemment, ce point de vue, Joffrin, ne peux  l’afficher de manière aussi nette. Et de le contredire apparemment  quelques lignes plus loin en se référant toujours au même Renan, pour nous préciser «  que la nation  repose (aussi) sur une histoire et une culture communes, établies par le temps. » et, ajouterais-je, qui fondent son identité. Une identité nécessairement ouverte mais qui ne peut s’enrichir, comme le prétend notre éditorialiste, par la seule place faite  «  … aux influences du grand large dans une nation à l’humeur résolument cosmopolite? ». Car il y a en effet, comme le dit Max Gallo «  des fondamentaux qui jouent dans la vie politique qu’il est bon de rappeler ». En ce sens, le débat lancé par Eric Besson est légitime. A la condition cependant qu’il ne soit pas instrumentalisé à d’autres fins, notamment électorales, en jouant sur « les peurs » et en pratiquant l’amalgame. Cela dit, il appartient bien au «  politique » de montrer aux nouveaux Français comment leur insertion dans la communauté nationale contribue à la modifier, et réciproquement ! Dommage que la gauche refuse ce débat en brandissant comme seul argument le fantôme de Le Pen. Un fantôme qui, en l’espèce, ne pourra durablement masquer ses difficultés à affronter ses propres « obstacles psychologiques et intellectuels » sur une question laissée sans réponse depuis trop longtemps.
Note:
  Le titre de ce billet est la reprise de la question posée par L.Joffrin au début de son éditorial.

L’inconséquence de nos grands et petits « féodaux » régionaux.

Unknown Voilà une réforme, celle des collectivités locales, que tout le monde attend depuis des lustres. Tout le monde à l’exception des  élus concernés, si j’en crois la réaction du plus grand nombre, et qui, dans l’instant même où elle est annoncée, mobilise au-delà du raisonnable toute leur énergie et leur mauvaise foi. Car qui peut contester qu’il faille en finir avec notre « mille-feuille administritavo-politique ». Son empilement, ses débordements et ses croisements de compétences. Son opacité et son illisibilité par le commun des contribuables-citoyens, l’accroissement continue de ses prélèvements fiscaux et de ses fonctionnaires. Que dire, comme le dit si bien Jean François Cros dans son dernier billet, de ce « … déchaînement local de tous les pontifes à qui l’on va arracher les parcelles de ce pouvoir de droit divin que leur a pourtant conféré le suffrage universel ! Même ceux qui furent, à l’image du « spinnaker » (voile moderne très légère et très creuse prenant bien le vent…) Montebourg, les fossoyeurs du Département se prennent à défendre cette collectivité qu’ils vouaient aux gémonies quand ils n’en détenaient pas les clefs. » Que dire donc sinon que leur attitude rappelle celle de ces grands féodaux de province qui refusèrent de voir que la cassette royale était vide, les institutions « décentralisées » obsolètes, la concentration des pouvoirs locaux entre les mains de « cumulards » insupportable. Cela fait près de trente ans en effet que le problème est posé et que les scénarios de sortie de cette situation sont connus ( les derniers en date étant ceux de la commission Balladur »). Il était donc temps d’agir. Et quoique imparfait (on y reviendra dans un prochain billet), le projet présenté par le gouvernement va dans le bon sens. Un bon sens que nos élus devraient  mobiliser afin de l’ améliorer plutôt que d’apparaître comme les gardiens d’un temple consacré à leurs seuls intérêts politiques, financiers et « symboliques » particuliers. Au détriment de celui qui seul compte, celui de «l’intérêt général».

 » La morale n’est pas un gros mot « 

En écho à mes derniers billets, un large extrait de celui publié dans son blog par Philippe Bilger:
  » Nous ne serions pas dans des temps troublés, l’intervention du Premier ministre devant la promotion 2008 des jeunes polytechniciens ne serait même pas remarquée puisque ce qui va de soi, ce qui donne à une démocratie sa respiration naturelle et exemplaire n’ont pas vocation à être mis en évidence. Eprouve-t-on le besoin de faire un sort à l’air, à l’eau, à la familiarité de notre quotidien ? (Le Parisien).

Pourtant, quand François Fillon « vante les devoirs moraux des élites » de la nation et qu’il rappelle avec force « qu’il ne faut pas chercher uniquement à s’entourer de gens qui vous ressemblent », il met en émoi, ce qui montre à quel point nous nous éloignons de ce qui, hier ou avant-hier, aurait été perçu comme une bienheureuse banalité. A quel niveau sommes-nous tombés pour que cette injonction pertinente adressée aux « élites » apparaisse presque comme une provocation,  le message officiel mais aujourd’hui surprenant  d’un honnête homme qui perçoit que le pouvoir n’a pas au fond d’autre justification que l’exemple qu’il donne et l’influence vertueuse qu’il diffuse ?
Comme j’aimerais être sûr que cette adresse solennelle ne soit pas qu’une manière suprêmement élégante de se dispenser, une fois l’hommage verbal rendu, de l’effectivité de la mise en oeuvre ! Si cette crainte se réalisait, quel dommage ce serait non seulement pour la contrariété que suscite toute distorsion entre l’idéal et le réel mais pour la politique elle-même. En effet, je suis persuadé que la morale authentiquement assumée va devenir le « must » de ceux qui s’offriront à nos suffrages. Le citoyen ne supporte plus les fausses habiletés et les vraies tromperies. Il a besoin de vérité.
Le Premier ministre a eu raison de faire la morale. Ce n’est pas un gros mot. Ce n’est pas ringard ni ridicule. Juste une espérance, un défi, une chance. »
Voilà qui est dit. Et bien dit !

La « méritocratie » vue d’Hamon ( Benoît ).

   
 

Depuis le 7 octobre dernier, et après sa défaite aux dernières européennes, Benoît Hamon est désormais professeur associé à l’université Paris 8. Il est censé y intervenir sur «les grandes organisations internationales». Je précise bien : professeur associé (je le fus). Un statut particulier qui valorise l’expérience professionnelle des personnes cooptées – cinq ou dix années doivent être justifiées.

Au nom du père, et du mari !..

Dominique Rousseau est professeur de droit constitutionnel à l’Université Montpellier I et a été membre du Conseil Supérieur de la Magistrature (2002-2006). Il tient chronique aussi régulièrement dans  « le Monde » et l’édition dominicale du « Midi Libre ». Dans sa dernière, de ce dimanche, il nous explique (!!!) que l’élection du fils du Président de la République à la présidence de l’EPAD se ferait certes « dans le respect du seul principe qui fonde la légalité républicaine : le respect du suffrage universel. », mais que ce principe ne serait que  «  l’apparence » de la légalité. Oubliant au passage son liminaire rappel sur « la réalité de la légalité » dans une République qui ne pratique plus le suffrage censitaire (par l’argent, les diplômes, l’âge, l’expérience, et que sais je encore). Bref, dans cette affaire, on n’est pas dans le droit et son respect mais dans l’éthique et la convenance (voir mon billet précédent).Et notre professeur, pour asseoir sa crédibilité, aurait du citer à la suite de sa longue liste de dynasties républicaines ointes par le suffrage universel la dernière en date, celle de Delors-Aubry (sa fille). Mais là, son logiciel politique s’est curieusement bloqué. Comme il semble incapable ou impuissant à traiter la réalité de son quotidien politique montpelliérain où une Claudine Frêche, qui est directrice d’ACM (nommée et non élue), est aussi l’épouse de Georges Frêche, le président de l’agglomération de Montpellier et du Conseil régional. Rappelons, pour des lecteurs peu informés des réalités régionales, qu’ACM est une Société d’aménagement et de construction  et qu’elle est désormais le plus important des bailleurs sociaux de la région Languedoc-Roussillon. Qu’elle gère un patrimoine de plus de 20 000 logements, soit plus de 50 000 habitants répartis sur la ville de Montpellier et le territoire de la Communauté d’Agglomération. Et qu’en 2009, son budget global s’élève à 360 millions d’euros. Cette pratique là du pouvoir, Dominique Rousseau et le «  Midi Libre » l’ont pourtant sous les yeux, mais ils ne veulent pas la voir. Dans ces conditions, quelle valeur attribuer à leurs « papiers » sur « cette noblesse politique ou d’Etat, qui se reproduit et se transmet le pouvoir. », sinon celle de masquer et de justifier « le cynisme de parvenus » de «  nos » hobereaux de province. En l’occurrence la leur. Et la mienne…