Chronique du comté de Narbonne.

Ah ! mon oncle, cet hiver froid et venté n’en finit plus d’aiguiser nos nerfs. Il est temps que viennent enfin nos douces et enivrantes nuits d’été ; que chantent les grillons dans nos jardins ; qu’y froufroutent toutes jupes dehors les élégantes ; qu’y bruissent médisances et potins ; qu’y jaillissent vins rares, rires et mets ; et qu’y pétillent jeux de mots et d’esprit. C’est sous un beau ciel étoilé d’une de ces joyeuses soirées que j’aurais eu grand plaisir à te narrer la guerre des « roses » lancée par le Prince (dit le petit) de Gruissan, mais ton impatiente curiosité, disons, philosophique m’oblige à t’adresser cette courte missive rédigée à la bougie, dans le froid et l’humidité de ma bibliothèque… Tu te souviens, peut-être, du sieur Etric de Pandrieu, qui s’illustrât naguère en portant le fer contre feu le Roi de Septimanie, Gorge Raîche, son maître, pour finir nu, battu, sans offices et sans armée dans ses terres arides et sans âmes de Mouthoumet ? Tristes et sombres terres, à l’image de ce grand destin brisé auquel semblaient le destiner les oracles de mystérieux sorciers qui y vivent à l’écart du monde; des « Parfaits », dit-on ! Eh bien, cet Etric, qui dispose encore des mousquetaires du parti floral en terres audoises, vient de lancer une première offensive contre le Petit Prince de Gruissan, le sieur Bodorniou. Sans bruits de cornes, de cymbales et de tambours, toutefois , pour la mettre en musique et rassembler ses troupes; un petit concerti de flûtes et de pipeaux donné aux gazetiers de la paroisse lui a semblé suffisant. « Déloyal et incompétent ! » chante-t-il de sa voix aigrelette, qu’il « tire » vers des notes plus graves en se haussant sur la pointe des pieds. Déloyal, certes, certes, mais comme le furent tous les petits et grand seigneurs des Etats du Languedoc contre  la Grande Duchesse Bobrie de Lille, la froide et acariâtre générale en chef du parti de la « rose »! Mais laissons cette « fleur » de la rhétorique courtisane à la crédulité des chastes « claques » partisanes : « Qui est souvent à la cour du roi, finit toujours par trahir ses amis. », n’est ce pas, mon oncle ? Et puis, je te le demande, toi qui fréquente cette prétentieuse aristocratie à la cour du Roi de France, de quelles compétences sont donc faits leurs bagages ? Ne sont ce pas de ces hommes bornés, que le hasard a mis à la tête des autres, et qui ne consultent que leurs préjugés et leurs fantaisies ? Et notre Jacques de Labatout, en détiendrait-il quelques unes que nous ignorerions? J’ai beau tourner la tête à tous les vents, je ne vois et ne rencontre d’habitants de Cité ou de Bourg, vilain ou bourgeois, manant ou maçon, qui ne se plaignent de son impuissance à gérer les affaires du Comté, qu’il veut toujours plus grand, ne cesse-t-il de dire ! Même dans les tavernes, où s’échauffent le bon peuple et quelques uns de ses amis, aux premiers rangs desquels son Conseiller aux affaires économiques, le sieur Triston Lemy, la vague y grossit de sa dernière mésaventure provoquée par la moitié, ou presque, de son conseil, qui a pris le parti du sieur Bodorniou contre sa propre favorite, la Marquise de Fabre. Je ne suis pas sur cependant que tu connaisses cette dame tant sa discrétion n’a d’égale qu’une vêture sans panache et clinquantes afféteries. L’interminable fréquentation des bureaux des Sieurs Bourteau et Labatout, lui a donné cette pâleur de teint et d’allure, que les dames de la Cour et leurs favorites moquent en minaudant sous leurs éventails de satin. Naïve et toute aussi distraite, la Marquise arpente déjà des campagnes clairsemées pour annoncer à ses électeurs hébétés qu’ils méritent un parlementaire à temps plein ; comme elle ! Un coup de pied de l’âne, si je puis dire, botté, pointu et innocent (l’innocence n’a pas de sexe, mon oncle !) dans le derrière fessu du Comte de Labatout…C’est donc cette Madame de Fabre, et tout ce que compte de seigneurs, petits et grands, le Grand Comté de Narbonne conduit par le sieur Labatout, que le Prince de Gruissan, qui en était mais n’en est plus, du parti de la « rose », va devoir sabrer sans aucune pitié. Dans cette campagne, il y aura des pièges pour hommes, comme on en met aux loups… Ah ! mon oncle, que d’intérêts et d’ambitions que cette rose, à elle seule, ne peut plus masquer ; que de pétales tavelés ! En ce temps de Carême, que ce si bel emblème du cœur du Christ, ce symbole des plus hautes vertus de l’amour puisse ainsi fleurir drapeaux, casques et tambours me remplit de désespoir. « Les vertus se perdent dans l’intérêt, comme les fleuves se perdent dans la mer. », mon oncle, me disais tu, certains soirs d’étude ; t’en souviens-tu ? Oui, la vie est un théâtre d’ombres ! Comme celles qui envahissent ma pièce d’écriture laissant à la seule flamme vacillante de ma bougie la force d’en pénétrer les secrets. Le temps des rêves est venu : celui des pensées qui vont à sauts et à gambades. Libres et fantasques, folles comme le vent…

Bonne nuit mon oncle, qui me lirait sans doute un beau et clair matin…

PS : Je n’ai toujours pas vu, dans les rues de Narbonne, le crâne dégarni et la petite queue de cheval de l’ex gazetier en chef de « Tirelire » depuis la prise de ses nouvelles fonctions. De la Natte porterait-il désormais un chapeau à plumes ?

 

Chronique du comté de Narbonne.

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Mon très cher Oncle !

Avez vous remarqué, dans ma dernière missive, qu’au voussoiement de l’entame s’est substitué, dans ses derniers articles, le tutoiement plébéien qui faisait tant horreur à votre vénérable frère, mon très regretté père. Aussi, attendais je en retour votre lettre dans la plus grande inquiétude. Mais quelle ne fut pas ma surprise ne n’y trouver nulle allusion. Connaissant votre grande tolérance envers les mœurs de notre époque qui traquent avec un zèle insatiable signes et mots suspects d’une quelconque allégeance, j’en conclus que vous ne m’en tenez point rigueur et que vous êtes présentement converti à cette moderne façon d’envisager nos rapports « filiaux ». Sacrifions donc à ce désir de nivellement des hiérarchies sociales et familiales. Soyons les dignes contemporains de cette société du bon sentiment, si faussement naïve et si cruellement cynique. Oui ! Puisque tu me le demandes -ma plume tremble à ce tu impératif-, Monsieur Patrick de la Natte a fini d’aménager son office de porte-plume en chef de  Messire Jacques de Labatou. J’espérais le rencontrer entre Château et Rive Gauche, cette taverne où il avait ses habitudes du temps, où, gazetier en chef du Tirelire, il chroniquait à la « hache » contre le duc de Lamonyais et son fidèle intendant Lemaillet, pour lui transmettre tes malicieuses félicitations, mais les circonstances et de grandes occupations ne me l’ont point permis. Renseignements pris auprès d’un de ses anciens collègues qui ne supporte pas que sa petite queue de cheval catoganée baguenaude ostensiblement sous ses fenêtres, de La Natte serait dans une phase d’observation de son nouveau terrain de jeu. Une arène devrais je plutôt dire. Et qui promet d’être sanglante. Sais tu que le Prince, dit le petit, de Gruissan, qui pourtant est de la même famille florale que le Comte de Labatou, mais qui, surement, à de grandes ambitions, a décidé de s’emparer de sa charge à la Cour du roi. Une charge qui devait revenir à sa favorite, la pauvre marquise de Fadre, toute marrie depuis. Tant de dévouement et de sacrifices à servir son seigneur pour en arriver à cette désespérante situation ! Gageons cependant qu’elle ne se laissera pas manger une aussi gratifiante députation. Tu sais mieux que moi, pour fréquenter assidument cette engeance parlementaire, qu’à l’exception des quelques rares seigneurs susceptibles d’être choisis un jour pour siéger au Conseil du Roi, les autres ne font que parader lors des grandes joutes parlementaires. Ne me disais tu pas qu’à les voir, dans ces occasions, lancer leurs chapeaux à plume dans toutes les directions et frapper frénétiquement leurs pupitres de leurs épées, te revenaient à l’esprit certains jours de folies carnavalesque sur le mail de notre cité ? Bref, c’est la guerre dans le « camp de la Rose » ! D’un côté, des parlementaires qui furent employés aux écritures de leurs prédécesseurs et qui se transmettent la « martingale » de génération en génération ; de l’autre, un ancien et alerte joueur de ce jeu inventé par nos barbares voisins d’Outre Manche, qui, désormais, veut sa place au centre du Grand Comté de Narbonne. Deux styles aussi ! Pour les premiers, celui assez classique des parvenus de la Cour : habits sombres et lunettes de notaire apostolique sur des physiques ventripotents (la mollesse de corps et la fadeur vestimentaire souvent les définissent) ; pour le second, celui d’un homme à la ligne racée et à la mise dégagée, qui sied à ceux qui ont pour habitude de soigner leur silhouette en trottinant tous les matins. Déjà, sentant le vent tourner, des conseillers de Messire Jacques de Labatou et de la Marquise de Fadre,  ne trouvent que grâces et bonheurs dans les atours d’éloquence du Petit Prince de Gruissan. Ah ! mon oncle, que je te dise aussi qu’à la grande surprise de tous, mais non de la mienne – notre ami le duc de Lamonyais m’en avait entretenu sous le sceau du secret -, certains membres en dissidence du parti de la « Pomme » : les sieurs Fraise et Basanti, qui siègent avec lui sur les rangs de l’opposition au conseil de Narbonne, participaient à cet adoubement collectif placé sous les auspices de la très vénérée tour de Barberousse. Enfin ! de ce qu’il en reste ; pour tout dire : pas grand chose. Le premier est homme d’influence dans la mystérieuse tribu des fumeurs de havanes sur laquelle, me le disait encore tantôt l’un de ses membres, le sieur de la Brindille, les lourds nuages tabagiques qui habituellement président à leurs libations ne parviendront pas à étouffer les échos de l’homérique bataille annoncée. Voilà, mon cher oncle, de quoi satisfaire notre terrible et ex gazetier en chef de la Natte. Saura-t-il répondre aux tumultueux besoins de son nouveau maître Labatout? Pourra-t-il convaincre ses anciens porte-plumes de « Tirelire » de l’aider dans ce combat? Obtiendra-t-il du « Dépendant » une neutralité positive en échange de quelques gâteries ? Attendons qu’il soit entré dans la bataille. Car il sait tout des fortunes, celles des alcôves et les crimes commis l’éthique aux lèvres et les dagues aux poignets. Ni mage ni sorcier cependant, au cœur des luttes d’ambition et de pouvoir, il ne pourra plus se cacher sous les masques de l’indépendance et de la vérité du gazetier. Fabricant « d’images », son sort est désormais lié à celui de son maître et de sa favorite…Il est condamné à vaincre ! Mon cher parent, la nuit tombe et mes paupières aussi. On m’attend au pays des rêves et des grandes illusions. Je te quitte et ne manquerai pas de te narrer la semaine qui vient les dernières péripéties de cette petite vie narbonnaise que ses protagonistes veulent grande. Je t’embrasse affectueusement…

 

 

Schizophrénie française.

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Les Français sont très inquiets quant aux capacités de la France à affronter la crise économique, 79% pensant que leur pays est « en pleine crise », contre 52% des Américains, 38% des Allemands, 38% des Russes et 35% des Chinois, selon un sondage Ifop pour La Croix.

L’idéogramme qui, en japonais, exprime une situation de crise est fait de deux signes. Le premier signifie danger, le second opportunité. Le grand stratège chinois Sun Tsé, lui, a théorisé que les batailles se gagnaient d’abord dans les « têtes ».

A lire ce sondage, les français, contrairement aux américains, aux chinois et aux allemands, notamment, auraient donc déjà perdu la « guerre » économique. Ce qui paraît manifeste à lire et écouter nos médias, plongés dans la sinistrose et le misérabilisme ; et qui nous présentent comme seul avenir…celui de la Grèce !

Indécrottables gaulois ! dont l’arrogance à se vouloir le nombril du monde est directement proportionnelle à leur incapacité à se remettre en question. Et à se retrousser les manches…

 

Un procureur ( ex ) et ses amis « Facebook ».

 


Le 23 février 1965, je quittais Narbonne pour Montbéliard. Je n’avais pas 18 ans et c’était mon premier voyage. En train ! Il faisait froid. J’entrais dans la «carrière» administrative. Durant cette période de formation, les premiers enseignements reçus traitaient des «droits et obligations des fonctionnaires». Un thème parmi d’autres : «l’obligation de réserve». Une «obligation» qu’un avocat général de Bastia, ancien procureur de Carcassonne, ne semble pas, ou ne plus, connaître. Sur sa page Facebook, parmi ses amis : “L’Aude avec F. Hollande”, mais aussi deux personnalités socialistes du département : André Viola, président du Conseil Général, et Jean-Claude Pérez, député-maire de Carcassonne.». C’est Vincent Boilot, qui lève le lièvre, aujourdhui, dans le Midi Libre. A cela, qui n’est déjà pas rien, s’ajoutent des commentaires du même avocat général sur la page de son «ami facebookien» Jean Claude Perez sur des affaires judicaires en cour qu’il conduisait alors qu’il était procureur de Carcassonne. Nous sommes le 16 février de l’année 2012. Il fait tout aussi froid qu’en 1965, mais des hauts magistrats pratiquent à présent «la dispense de réserve» et brisent allègrement, car il n’est pas le seul, le lien moral et juridique de neutralité constitutif d’une bonne administration de la justice. Le signe manifeste des dérives d’une époque, où après tant d’autres dérapages de ce genre, semble sonner la fin programmée, par ses propres serviteurs, d’une certaine idée de l’Etat républicain. Je n’exclue pas, cependant, pour le cas dont il est ici question, une ivresse narcissique mal contrôlée propre aux nouveaux adeptes de Facebook. Ce qui, pour notre ex procureur avocat général, ajoute à son manque de discernement professionnel une absence évidente de tact… et de bon goû﷽﷽﷽﷽﷽﷽﷽﷽cat généralernement professionnel un manque de tact et de mauvais go ex procureur avocat généralût. «Le goût est un prince détrôné qui, de temps en temps, doit faire des protestations.» ( Elie Fréron )

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