Cet homme sur un quad blanc n’est pas mon égal en humanité…
Qu’ai je en commun avec cet échantillon d’homo sapiens de type caucasien faisant des ronds pétaradants dans une allée interdite aux engins mécaniques à quatre ou deux roues, réservée aux véhicules des services d’incendie et de secours. En l’occurrence, à quelle humanité commune appartiendrons-nous, qui ferait de cet individu au crâne rasé, torse nu et tatoué, sans casque de protection, chevauchant un quad blanc à l’arrière duquel un enfant apeuré s’accrochait à sa ceinture, mon égal. Il allait donc et venait et tournait à grande vitesse, causant un bruit d’enfer dans cet îlot de nature protégé entre et mer et étang, bordé par des cabanes dans le genre de celle, la mienne, d’où j’assistais à cette sauvage apparition motorisée. Mais qu’ai je donc en partage, me disais-je, avec cet homme irrespectueux des règles admises, sans considération pour autrui, et irresponsable au point de mettre ainsi son enfant en danger. Rien, à l’évidence. Rien à l’évidence qui puisse s’apparenter au moindre sentiment humain après que j’eus entendu lors de notre échange de paroles, et pour l’avoir provoquée, les siennes : violentes et grossières, agressives et menaçantes. Comment accorder finalement à cet être au cerveau rabougri, capable sans doute du pire que l’on puisse imaginer, un statut moral de principe conforme à « l’humanisme démocratique » propre à notre société, pensais-je. Que pour des raisons nécessaires au bon fonctionnement d’une nation, certains grands principes : égalité, liberté etc… soient proclamés et défendus, je le conçois. Mais que l’on exige de moi, aussi, le retrait de toute intelligence critique pour sombrer dans un sentimentalisme oecunémique et aveugle, non ! Cet homme, cette brute, n’est pas du même monde que le mien. À part quelques caractéristiques anatomiques propres à notre espèce, et l’identique statut juridico-politique, son humanité n’est pas la mienne, nous n’avons définitivement rien en commun…
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phthoreux
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A l’idée du spectacle dont vous fûtes témoin, je ressens la même émotion et la même consternation que vous, Michel. Pourtant la peine que j’éprouve une telle situation est avant tout liée à l’idée que précisément, cet individu et moi, appartenons à la même humanité. Je ne me sens pas plus humain que lui, peut-être juste un peu plus conscient de mes droits et de mes devoirs. Qui sait comment se comporterait cette personne si elle avait été mieux éduquée et plus prosaïquement, si elle savait ce qu’il en coûte de ne pas respecter la loi ?
C’est le drame de notre époque, hélas. Nous jouissons d’une liberté que peu de nos aïeux ont connue et celle-ci n’a jamais été aussi mal protégée des excès qu’on peut en faire. Je suis très attaché à la Liberté et je souffre de la voir galvaudée par des Pouvoirs Publics laxistes, et foulée au pieds par des êtres humains qui ignorent ce que le respect et le devoir signifient, et qui n’ont aucune idée des sacrifices qu’il fallut faire pour que nous puissions vivre libre…
Bien amicalement et merci pour vos réflexions inspirées par le quotidien, souvent bien poétiques, et toujours propices à la philosophie !
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Michel Santo
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Merci pour ce commentaire Pierre-Henry ! Ce que je voulais montrer, rapportant ce détail d’une vie ordinaire, est la contradiction que nous vivons tous quotidiennement, entre une humanité conçue et définie de façon abstraite, celle du juridico-politique (tous égaux en droits, libertés etc) et celle, vivante, diverse, où chaque individu déploie ses qualités, faiblesses, violences etc. C’est dans cette dernière – humanité – que s’y montrent des individus dont les valeurs morales, si je puis dire, ne sont pas du même monde que le mien (de mon humanité). On peut alors tenter d’expliquer ces comportements par l’histoire personnelle, la sociologie et d’autres sciences sociales ou médicales. Rien, néanmoins ne suffira jamais à tout expliquer ni à modifier le comportement de certaines de ces « brutes ». Je ne sais plus qui disais aussi que l’on peut être un parfait citoyen respectueux du droit, tout en étant un parfait salaud… Bien amicalement ! Michel
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Phthoreux
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C’est un peu la problématique de l’infériorité morale de certains par rapport à d’autres que vous posez. C’est même celle de l’inégalité en humanité ! Mais peut-on encore soutenir une telle opinion de nos jours où l’égalitarisme fait rage ? Même si elle relève de l’évidence, lorsqu’on pense notamment aux fanatiques qui n’ont aucune limite, pas même le terrorisme.
C’est en tout cas une question essentielle pour les sociétés démocratiques.
Les lois sont là pour limiter les excès, à condition qu’elles ne soient pas trop nombreuses et de portée la plus générale, comme le préconisait Montaigne. Tout le contraire de ce qu’on fait !
De toute manière, à quoi bon faire des lois, si in fine, on ne se donne pas les moyens de les faire respecter ! Pascal soulignait que sans la force, la justice est impuissante.
Toute notre époque est là…
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Michel Santo
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C’est bien de cela dont ce petit texte se voulait la parabole !
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