Chronique de Narbonne et d’ailleurs. Le peintre Piet Moget est décédé hier soir: petit hommage…
Le peintre Piet Moget est décédé hier soir. C’était un très grand artiste à la renommée internationale. Il avait choisi de s’installer dans la région en 1952, à Port la Nouvelle, au mas de la Grange Basse où il vivait dans des conditions très précaires, sans eau ni électricité. A partir de 1956 environ, Piet Moget prend l’habitude d’aller peindre sur le quai de ce même port avec une petite camionnette. Et en 1991, il fonde le Lieu d’Art Contemporain (L.A.C) un cadre extrêmement dépouillé, à l’accrochage et à l’éclairage très sobres, où chaque année, au printemps et en été, parfois en automne, il y présente plusieurs expositions autour de jeunes créateurs. Ces manifestations rassemblent des oeuvres de Geer van Velde, Bissière, Staël, Vieira da Silva, Estève, Lapicque, Lanskoy, Poliakoff, Léger, Tanguy, Les Cobra et bien d’autres. C’était aussi un grand collectionneur d’art contemporain. Cet homme, j’eus l’occasion de le rencontrer à plusieurs reprises et dans l’intimité de conversations érudites avec mon ami Louis Privat. Il avait l’aspect austère et rude des gens du Nord et ne vivait que pour capturer la lumière. À la recherche de cette « petite sensation », comme disait son maître Cézanne… Il parlait ainsi:
Ecoutez… c’est extrêmement très difficile de parler de mon travail. Je sais pas quoi dire. Je suis obligé d’y aller comme un ouvrier et quand je travaille pas, je suis très mécontent. C’est aussi un besoin…. J’aurais bien fait une seule peinture toute ma vie. C’est un désir. Pour ça il faut être milliardaire, être riche de naissance ou avoir une caméra derrière soi afin que tous les états du tableau soient reproductibles. Ça oui, j’aurais aimé un système de reproduction du tableau et de tous ses états mais ce n’est pas au point. J’aurais fait qu’une seule chose mais avec l’état de tel et tel jour qu’on peut retrouver, soit dans un ordinateur, soit dans un livre… Oh, ce n’est pas une idée à moi. Il y a beaucoup d’artistes qui ont eu cette envie. Ce que je vois là, c’est magnifique, [un carnet sur la table avec une reproduction partielle d’un tableau de Cézanne]. Pour moi c’est le, le, le, le grand peintre. Je pense que depuis Giotto, c’est un des grands phares de tous les temps. Phidias aussi 500 ans avant Jésus-Christ [« âge d’or » de la sculpture attique], était moderne. Dans ses sculptures, les têtes par exemple, deviennent des volumes au lieu d’exprimer des sentiments. Il y a une telle respiration dans le travail de Cézanne et beaucoup de choses maladroites aussi. C’est ça que je trouve adorable… (1)
(1) Vialade Marin Véronique, Marin Dominique, «Une matinée avec Piet Moget.», L’en-je lacanien 2/2006 (no 7) , p. 171-199. Ici en lien
Mots-clefs : Bissière, Estève, Geer van Velde, Lanskoy, Lapicque, Le Lac, Léger, Les Cobra, Louis Privat, Marin Dominique, Piet Moget, Poliakoff, Port la Nouvelle, Staël, Tanguy, Vialade Marin Véronique, Vieira da Silva
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Nathalie MP
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Très beau, ce tableau. Je me crois sur les plages de la côte d’Opale par temps gris et triste comme aujourd’hui.
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Michel Santo
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Vous savez Nathalie, pour avoir vu la côte d’Opale, comme vous, sous un ciel triste, je disais un jour à Piet qu’il peignait des horizons hollandais , son chevalet planté au bord de la Méditerranée…
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