Le gouvernement et le PS? Deux étoiles contraires selon Christophe Barbier.
Édito épatant de Christophe Barbier dans l’Express du 3 septembre.
« Puissance d’un homme, fragilité d’un idéal. Débarrassé de ses rivaux à l’intérieur du gouvernement, accolé à un président chaque jour plus faible, Manuel Valls est le vrai patron de l’exécutif, parce qu’il est le seul. En revanche, le socialisme, pourtant épargné par une droite fantôme et une extrême gauche anémiée, est entré en crise : il se fend par le milieu, comme un fruit blet, comme une terre trop sèche. Ce contraste est néanmoins un leurre, car Manuel Valls est moins fort qu’il n’y paraît et le PS plus faible encore qu’il ne semble.
Parce qu’il tient son autorité d’un autre, élu par le peuple, le Premier ministre n’est doté en fait que d’une autorité de podestat, d’autant plus brutale qu’elle est à durée limitée. Manuel Valls ne trouvera une vraie force que dans l’action, pas dans les discours : les vitamines des mots ne suffisent pas, il lui faut se muscler avec les protéines de la réforme, ou il continuera de s’étioler. Pour l’instant, le Premier ministre dit ce qu’il faut faire plus qu’il ne le fait.
Ni première, ni deuxième, ni troisième gauche
Pour le parti, la situation est pire : il n’est pas bloc contre bloc, il part en morceaux. Il ne s’agit pas d’une bataille des « frondeurs » contre les « loyaux », ni des archéo-socialistes contre les sociaux-libéraux, il ne s’agit pas d’un affrontement, mais d’un épuisement. Il est trop facile de penser que la première et la deuxième gauche vivent ici un nouvel épisode de leur guerre de (plus de) Cent Ans, commencée par le choc Guesde-Jaurès et poursuivie par le duel Mitterrand-Rocard. Il est trop irénique de voir dans cette crise l’accouchement de la troisième gauche, qu’elle soit synthétique, comme le fut la gauche plurielle de Jospin, ou schismatique, comme jadis le communisme. Ni première, ni deuxième, ni troisième : c’est la non-gauche qui apparaît.
Depuis 2002, le Parti socialiste n’a retrouvé qu’à de brèves occasions électorales les faveurs des classes populaires, tournant autour des citoyens sur une orbite de plus en plus éloignée. L’auteur fétiche du PS était Emile Zola, c’est désormais Frédéric Beigbeder. Aujourd’hui, les citoyens, même s’ils votent à gauche, ne pensent plus leur vie quotidienne selon les préceptes du socialisme, tandis que la gauche au pouvoir affirme s’occuper de classes sociales qui ne se préoccupent plus d’elles.
Les vrais électeurs socialistes, urbains, âgés et de catégories supérieures, pensent dans leur engagement sincère qu’ils vont faire le bien des plus faibles qu’eux sans les emmener au pouvoir. Ils croient disposer d’une gigantesque procuration des pauvres, mais les pauvres ont quitté l’idéal collectif pour basculer dans un égoïsme de survie qui les mène à l’abstention, ou dans un ressentiment qui les pousse vers le vote FN.
Deux incurables
Rien, dans les institutions, ni dans les ambitions, ni dans la tradition politique française, ne permet d’aller vers la seule issue valable : un immense parti central qui courrait de Manuel Valls à Alain Juppé, encadré par l’extrême droite et par une gauche radicale. Celle-ci, aujourd’hui, est en miettes, incapable de concurrencer Marine Le Pen dans la conquête des citoyens déclassés.
Exténué par sa propre rage, Jean-Luc Mélenchon doit à la fois atterrir et prendre de la hauteur – ce qui n’est pas simple. Sa voix républicaine demeure nécessaire : saura-t-il la mettre au service de l’espoir plutôt que de la vindicte, d’un salutaire effort national et non d’un songe de révolution revancharde?
Ecrasé au sol, le météore Montebourg laisse dans la poussière de la réalité la trace fumante de la déraison et l’odeur soufrée du populisme. Sa ferveur charismatique reste indispensable : saura-t-il la mettre au service du vrai redressement français, plutôt que d’une communication égotique et d’un anticapitalisme désuet?
Aujourd’hui, le gouvernement et le parti censés être tous deux socialistes sont comme les héros des Etoiles contraires, ce roman et ce film qui font sangloter les adolescentes : tous deux incurables, mais l’on ne sait pas qui mourra le premier. »
Mots-clefs : Cambadélis, Christophe Barbier, FN, PS, UMP, Valls
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Guitteny
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Mr Michel Santo Bonjour, c’est toujours avec beaucoup de plaisir que je vous lis. Je vous transmets un site youtube où Mr Etienne Chouard brise l’omerta de nos politiques et de la finance. Quand pensez-vous ?
Cordialement à vous
https://www.youtube.com/watch?v=Sj6yHAeBMgQ
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