Moment de vie : un conte de Perrault…
Je.28.9.2023
« Je peux te la confier en début d’après-midi. Elle a son cours de chant à 14 h 45 : il dure 30 minutes. Après, tu pourrais l’aider à faire son devoir de français. Je viendrai la chercher vers 17 heures : nous avons rendez-vous chez le médecin.
— Pourquoi ?
— Un vaccin obligatoire !
— Oui, bien sûr ! »
Mila est en sixième. Elle doit lire et « analyser » le Petit Poucet. Précisément, répondre aux questions posées par son enseignante en soulignant les phrases dans lesquelles sont présentés les personnages, leur nombre, leurs qualités, leurs lieux de vie, leurs actions… et conclure en exposant en quelques mots la moralité de ce conte.
Je n’ai pas pu aller au-delà du premier paragraphe. Après avoir épuisé arguments et conseils, sans succès, j’ai fini par la laisser seule autour de la table. C’était son souhait. Et le mien aussi.
J’aurais pourtant dû me douter que les choses se passeraient ainsi. Avant l’ouverture de son cartable, Mila m’avait, à sa façon, prévenu. « L’histoire ça ne sert à rien : tout le monde est mort ! Pour la géographie, on a Google Maps. Et, pour le calcul, des calculatrices… »
Après que Mila m’eut quitté, j’ai relu en son entier ce conte de Perrault. Avec beaucoup de plaisir. Quelle merveille de simplicité ! J’eusse aimé qu’enfant, on me le racontât, songeai-je. Et puis peut-être qu’un jour prochain, nous relirons ensemble, Mila et moi, sa fin, notamment. Je lui dirai alors que rien n’est jamais définitivement acquis aux enfants. Comme aux grandes personnes. Surtout pas leur faiblesse. Qui peut l’être d’un moment – tu t’en souviens ? – et qui, de surcroît, peut cacher aux yeux des imbéciles de grandes qualités de cœur et d’intelligence :
« On ne s’afflige point d’avoir beaucoup d’enfants,
Quand ils sont tous beaux, bien faits et bien grands,
Et d’un extérieur qui brille ;
Mais si l’un d’eux est faible ou ne dit mot,
On le méprise, on le raille, on le pille ;
Quelquefois cependant c’est ce petit marmot
Qui fera le bonheur de toute la famille. »
Mots-clefs : Charles Perrault, Le Peit Poucet, Mila
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