Moments de vie : Son corps immense était tout entier dans son regard.

 

Chêne malade.

 
 
 
 
Mardi, 10 heures 30.
Je suis littéralement « tombé » sur lui devant l’hôpital. Il se rendait à un rendez-vous. Je l’ai suivi et accompagné jusqu’au service de chirurgie ambulatoire. C’était l’occasion de prendre de ses nouvelles. Je ne l’avais pas revu depuis plusieurs mois. Un an ? peut-être plus ? S. est encore jeune, très grand et très costaud. Il a le gabarit d’un joueur de rugby ; du deuxième ligne qu’il fut. Quand il s’adresse à quelqu’un, il s’oblige à plier sa haute silhouette tout en muscles. Il se courbe plutôt. Une habitude contractée dans son enfance et qui donne à son allure, à ses déplacements, une forme curieusement brisée ; comme s’il voulait se mettre au niveau moyen du commun des hommes. En short et polo blanc, arpentant les couloirs, il était vraiment impressionnant de puissance, cette après-midi là. Sa voix avait cependant un grain inhabituel d’inquiétude. Elle sonnait trop dans les aiguës. Après quelques minutes d’hésitations, il a fini cependant par répondre à mes insistantes questions pour me dire enfin son lymphome et sa « chimio ». J’entends encore ses mots : « rends-toi compte, Michel, 53 ans et tant de bonheurs que je n’ai pas connus… et ne connaîtrai jamais ». Que répondre à cela, sinon des lieux communs bien utiles et nécessaires dans ce genre de circonstances. Quand je l’ai quitté devant la cage en verre du secrétariat, il n’était plus qu’un enfant. Son corps immense était tout entier dans son regard.

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Commentaires (1)

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    ITURBURUA CALVET Lise

    |

    Bonjour Monsieur SANTO
    Un très grand merci pour ce billet si vrai et poignant.
    Une fidèle lectrice…..
    Lise CALVET

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