Trois nuances de censure ou d’auto censure…
Une conférence sur «L’être humain à l’époque de sa reproductibilité technique» de la philosophe Sylviane Agacinski, connue pour son opposition à la GPA, prévue ce jeudi à l’université Bordeaux Montaigne, sur le campus de Pessac, a été annulée. La direction de l’établissement a estimé que «face à des menaces violentes», elle ne pouvait «assurer pleinement la sécurité des biens et des personnes, ni les conditions d’un débat vif mais respectueux». «Cette manifestation de censure est une atteinte excessivement grave et violente à la confrontation des idées à laquelle notre université est attachée», dénonce l’Université sur son site internet. Si je comprends bien ce communiqué, il était donc impossible à l’institution en question, de se donner les moyens humains ou de faire appel aux forces de polices, pour assurer la liberté de débattre et s’opposer ainsi à la censure voulue, et de fait imposée, par une minorité d’activistes. De sorte qu’il est implicitement admis, par les autorités de l’institution universitaire, qu’il convient de plier l’échine devant les menaces de petites troupes militantes et de pratiquer l’auto censure afin d’éviter que ce genre de situation ne se reproduise. Un bel exemple de courage politique face à la « tyrannie » de minorités.
J’observe que ces appels à la censure par la voie d’injonctions professionnelles, politiques et culturelles se multiplient aussi dans les médias. Ainsi tel polémiste connu fait-il l’objet de campagnes publiques pour que sa voix ne soit plus entendue sur les ondes, à la télé, et ses textes publiés dans les journaux. Les plus courageux allant jusqu’à ne plus vouloir débattre avec ou en présence de ce monsieur. Comme si leurs procès en fascisme et leurs leçons de morale suffisaient à convaincre ses lecteurs et auditeurs de la fausseté de ses analyses ; et l’argument avancé de leurs caractères politiquement contraires aux valeurs de la république justifiaient qu’on le censurât. L’expérience démontrant que ces postures produisaient des effets opposés aux fins attendues ou espérées, ces censeurs s’honoreraient plutôt à courageusement l’affronter.
Je note encore, par exemple, qu’il devient quasiment impossible de s’interroger publiquement sur le sens de certaines manifestations ostensibles d’appartenance religieuse, sans que le procès vous soit fait de stigmatiser et ostraciser celles qui en revendiquent le droit, comme celui du port du voile par des accompagnantes d’enfants durant leurs sorties scolaires. « Haineux » seraient donc ceux qui se prêtent à cet exercice, exercice critique pourtant salutaire en démocratie. Qu’il y en ait (des haineux), sans doute, mais qu’on les exhibe pour tenter d’imposer une forme d’auto censure sur ce genre de sujet est tout simplement indéfendable.
La censure et l’auto censure, finalement, sont toujours pavées de bonnes intentions et de bons sentiments…
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