Amitié !
Ma 17.12.2024
Le 7 octobre 1761, Diderot écrivait à Sophie Volland, notamment ceci :
« Il y a deux sortes d’amis ; les uns qui sont de notre choix ; c’est l’estime, la vertu, la conformité de carac-teres, tout ce qui inspire le respect, la confiance, la vénération ; tout ce qui constitue la sympathie entre d’honnêtes gens, qui nous les concilie. Ce sont deux instruments que nature avoit accordés à l’unisson. Ils se sont trouvés l’un près de l’autre. Les cordes du premier ont été pincées, et les cordes du second ont frémi. Ils ont senti en même tems la douceur intime et délicieuse de ce frémissement. Ils se sont approchés. Ils se sont touchés. Ils se sont unis. Cela s’est fait en un instant.
Il y a des amis que le hazard nous donne. Nous les tenons de tout ce qui se renferme sous le mot de nécessités de la vie. Vous tombez au fond d’une rivière. Un scélérat se met à la nage, et vous conserve la vie au péril de la sienne. Voilà, sinon un ami, du moins un bienfaiteur que la circonstance vous donne. Que ferez-vous de cet homme? Son caractère ne sera point un reproche pour vous ; mais vous exemptera-t-il de la reconnaissance ; même dans la supposition qu’ennuyée de la vie vous vous fussiez jetée dans la rivière. Il ne scait pas que vous vouliez périr; et parce qu’il l’ignoroit, falloit-il qu’il demeurât spectateur oisif et tranquille de votre péril ? Qu’a fait votre père pour vous ? Comparez-le avec ce que ce scélérat a fait de son côté. En voilà là-dessus bien plus qu’il n’en faut. Suppléez le reste.»
Diderot. Lettres à Sophie Volland. Club français du livre. 1965. Pages 272 et 273.
Illustration. Pablo Picasso. Amitié
Mots-clefs : Amitié, Diderot, Lettres à Sophie Volland
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