Jean Claude Pirotte est aussi un peu d’ Aude !

 

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Jean Claude Pirotte écrit des poèmes et des récits dans une langue magnifique. Né en Belgique sous la pluie… Il a exercé par défaut la profession d'avocat pendant onze ans; il défendait les exclus, les marginaux, des délinquants, les pauvres, les immigrés. Choisissant la cavale plutôt que la prison, faussement accusé de complicité d’évasion d’un de ses clients, il commence alors une vie d’errance et de clandestinités dans toute la France profonde, avec une prédilection pour les terres à vignobles ; jusqu’à se poser quelque temps dans l’Aude, dans une maison du village de Montolieu, près de l’égliseAujourd’hui, il vit à La Pannebourgade flamande à 25 kilomètres de Dunkerque, dans le «  capharnaüm d’un déménagement annoncé faute de droits d’auteurs suffisants pour assurer le droit d’ici demeurer… ». C’est donc de Flandres que nous vient ce dernier et merveilleux petit livre : « Brouillard, aux éditions du Cherche Midi. » Un voyage intérieur où il se souvient de ses lectures : Larbaud, Thomas, Dhôtel…, d’un village, de sa petite fille… Les phrases de Pirotte vous tombent dessus , et ne vous quitte plus leur douce et tendre mélancolie. Certaines, sur la vigne et le vin, sont sans doute parmi les plus belles qui aient jamais été écrites : « Je sais vraiment peu de choses. On croirait même que je ne sais rien. Il convient parfois de tromper son monde. J'écoute parler le vent qui vient de la mer avec son goût salin, et le terroir qui recueille la lumière du ciel et porte la vigne, j'écoute le feu qui brûle et accorde ses fibres, et je recueille aussi la parole silencieuse du temps. » Et celle ci encore: « Je crois, oui, je crois que la vie, le vin, ne cessent de nous ménager des surprises en nous restituant le passé, l'enfance, les belles images au détour d'une ruelle, ou dans l'éclat soudain de l'automne jaillissant d'un vignoble. » (Jean-Claude Pirotte, Autres arpents). Et enfin: « L'écriture est la quête d'un vin qui n'existe pas. » Lisez vite Pirotte !

L’imposture de l’art contemporain s’expose à la FIAC.

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Je viens de lire la chronique de Brice Couturier sur, disons «  l’économie de l’art contemporain », texte dans lequel il montre que le pouvoir y est détenu par les collectionneurs en connivence avec les galeristes . En conclusion , il se demande à quoi peuvent bien servir ces collections d’objets aux formes les plus saugrenues actuellement exposées à la FIAC de Paris. J’ai le souvenir de m’y être promené avec certains de mes amis férus d’art contemporain qui, tous les dix mètres, ne cessaient de répéter « c’est intéressant, c’est intéressant ! », sans jamais pouvoir répondre à ma question : « mais quoi d’autre, quoi d’autre ? ». Dire que je m’y suis ennuyé serait en dessous de la vérité. J’y ai surtout vu une immense imposture orchestrée par de jeunes et moins jeunes marchands  au style vestimentaire légèrement décalé: celui de leur clientèle, cette grande bourgeoisie financière qui fait les cotes , avec le zeste de petite provocation qui sied à tout contemporain aisé et branché.  André Blanchard exprime bien le fond de ma pensée sur ce sujet : « Si familièrement sollicité, je ne me fais pas prier pour placer ma salade, toute prête depuis le temps que je fulmine en voyant certain public qui simule de mouiller devant la peinture. « Foin du snobisme, dis-je, c’est une matière où je n’entrave pas grand-chose, qui m’ennuie en rien de temps même. Si ! si ! non, ne me faites pas crédit de ma franchise, tout le plaisir est pour moi : que voulez-vous, arrive un âge où on fait copain-copain avec ses tares… Donc, face à un tableau, soit j’aime, d’instinct, soit je déteste, itou, soit cela me laisse de marbre, et sans qu’il y ait bien souvent le moindre rapport avec la valeur du tableau. Je crois que, de tous les arts, la peinture est celui où le jugement se révèle le plus délicat, pour un profane s’entend. » Mais, poli, je m’abstiens d’ajouter le fond de ma pensée, savoir que, de tous les arts, c’est aussi celui où l’imposture est la plus aisée – à l’opposé : la musique. »

Un vent de folie et de bêtise souffle maintenant sur le monde…

 

 

 

 

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Allez ! du  » raide  » ce matin, et un beau morceau de littérature. Qui, aujourd’hui, est capable d’écrire ainsi ? Rien de mieux que la correspondance de Gustave en effet pour réveiller les esprits. À ne pas mettre dans les mains de bigots, cependant…Qui prennent tout au pied de la lettre. Pauvres âmes ! 

 

 

À GEORGE SAND. [Croisset, fin juin-début juillet 1869.]

Quelle bonne et charmante lettre que la vôtre, maître adorée ! Il n’y a donc plus que vous, ma parole d’honneur ! Je finis par le croire. Un vent de bêtise et de folie souffle maintenant sur le monde. Ceux qui se tiennent debout, fermes et droits, sont rares.

Voici ce que j’ai voulu dire en écrivant que le temps de la politique était passé. Au dix-huitième siècle, l’affaire capitale était la diplomatie. «Le secret des cabinets» existait réellement. Les peuples se laissaient encore assez conduire pour qu’on les séparât et qu’on les confondît. Cet ordre de choses me paraît avoir dit son dernier mot en 1815. Depuis lors, on n’a guère fait autre chose que de disputer sur la forme extérieure qu’il convient de donner à l’être fantastique et odieux appelé l’état.

L’expérience prouve (il me semble) qu’aucune forme ne contient le bien en soi ; orléanisme, république, empire ne veulent plus rien dire, puisque les idées les plus contradictoires peuvent entrer dans chacun de ces casiers. Tous les drapeaux ont été tellement souillés de sang et de m qu’il est temps de n’en plus avoir du tout. À bas les mots ! Plus de symboles ni de fétiches ! La grande moralité de ce règne-ci sera de prouver que le suffrage universel est aussi bête que le droit divin, quoiqu’un peu moins odieux !

La question est donc déplacée. Il ne s’agit plus de rêver la meilleure forme de gouvernement, puisque toutes se valent, mais de faire prévaloir la Science. Voilà le plus pressé. Le reste s’ensuivra fatalement. Les hommes purement intellectuels ont rendu plus de services au genre humain que tous les saint Vincent de Paul du monde ! Et la politique sera une éternelle niaiserie tant qu’elle ne sera pas une dépendance de la Science. Le gouvernement d’un pays doit être une section de l’Institut, et la dernière de toutes.

Avant de vous occuper de caisses de secours et même d’agriculture, envoyez dans tous les villages de France des Robert Houdin pour faire des miracles ! Le plus grand crime d’Isidore, c’est la crasse où il laisse notre belle patrie. Dixi.

 J’admire les occupations de Maurice et sa vie si salubre. Mais je ne suis pas capable de l’imiter. La nature, loin de me fortifier, m’épuise. Quand je me couche sur l’herbe, il me semble que je suis déjà sous terre et que les pieds de salade commencent à pousser dans mon ventre. Votre troubadour est un homme naturellement malsain. Je n’aime la campagne qu’en voyage, parce qu’alors l’indépendance de mon individu me fait passer par-dessus la conscience de mon néant.

Les Barques à travers les films de Jean Eustache (1938 – 1981)

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De 1951 à 1957, Jean Eustache habitait Narbonne place Albert Thomas (actuelle place des Quatre-Fontaines). Il se souvient de son adolescence narbonnaise dans un court métrage tourné dans notre ville l’hiver 1965-1966, Le père Noël a les yeux bleus, avec Jean-Pierre Léaud, et dans un film réalisé durant l’été 1974, Mes petites amoureuses avec dans les rôles principaux Martin Loeb et Ingrid Caven.

Découvrir Narbonne, l’été ! Horizon Méditerranée.

 

 

 

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Mercredi 10 juillet, au théâtre de Narbonne , un magnifique hommage était rendu au grand poète palestinien Mahmoud Darwich. Que dire de ce qui nous fut offert en deuxième partie de cette soirée d’un   » Horizon Méditerranée  » à la programmation remarquable – et qui restera longtemps gravé en nos mémoires et nos coeurs ? Que dire, sinon que Rodolphe Burger et ses musiciens, Ruth Rosenthal et  Rayess Bek nous ont emmené dans un ailleurs où se noue, dans le plus grand secret , ce lien fraternel auquel aspirent tous les êtres épris de justice et de paix. Sur la scène, une récitante israélienne véritablement habitée par un Cantique des Cantiques traduit en hébreu et un rappeur libanais d’origine palestinienne déclamant  en arabe, corps et voix mêlés, le poème de Darwich  « S’envolent les colombes ». Au centre, superbe et profond, le maître d’oeuvre, metteur en musique et chanteur  Rodolphe Burger, puissant et d’une douceur inouïe, dirigeant de sa guitare électrique et de sa voix, en français, musiciens et récitants dans une éblouissante mise en miroir de ces deux grands textes. Deux langues, deux peuples aussi… Le symbole vivant du pouvoir de la culture, de la musique et du chant en particulier, à unir, par delà toutes les peurs et les haines, ce qui, tous les jours, nous est pourtant présenté comme relevant de l’irréconciliable. Un dernier mot, peut-être, pour préciser que ce Cantique musicalisé par Burger, le fut d’abord à la demande de son ami Alain Bashung pour la célébration de son mariage , peu avant son décès . Et puis non! laissons encore vibrer ces vers, les premiers, de ces deux somptueux poèmes : l’émotion est toujours là, intacte. Comme ces trois voix qui ce soir là d’un bel été les sublimèrent :  » Regarde l’hiver est fini / la pluie a cessé elle s’en va / On voit des fleurs dans ce pays / le moment de la chanson est arrivé  » ( Cantique des Cantiques ). Le moment de la chanson est arrivé, oui ! et :   » J’ai vu avril sur la mer / J’ai dit : Tu as oublié le suspens de tes mains, / Oublié les cantiques sur mes plaies. / Combien peux-tu naître dans mon songe / Et me mettre à mort, / Pour que je te crie: Je t’aime .  » ( S’envolent les colombes ) Mahmoud Darwich est mort un 9 août , en 2008. Ce jour là, chaque année, on fête la Saint Amour…

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