Les joueurs argentins ont certes vaincu les Français sur le terrain, mais ils ont perdu leur honneur dans l’après-match. Jamais dans l’histoire de la coupe du monde, il nous aura été donné d’assister à un tel déballage d’obscénités. Qu’il s’agisse de leur gardien de but brandissant la coupe du monde comme un pénis en érection ou des autres joueurs rassemblés autour d’une minute de silence en l’honneur du mort MBappé, cette équipe restera dans l’histoire de ce sport comme l’expression même d’une « morale » de l’indécence, de l’irrespect et du mépris. Et que leur entraîneur et les différentes autorités sportives argentines se soient abstenus de tout commentaire sur ces agissements en dit long sur leur état d’esprit collectif. Quant à Messi, s’il est, paraît-il, un « Dieu » chaussé de crampons, il aura failli à sa mission en ne restant pas à hauteur « d’homme ». Samedi, la noblesse, l’élégance et la tenue était incontestablement du côté de l’équipe de France. Ce match-là, les Argentins et Messi l’ont perdu. Une défaite morale qui devrait être enseignée dans tous les centres de formation.
9 heures ce matin. Le téléphone sonne. Sur l’écran de mon smarphone apparaissent les noms et prénom d’un adjoint au maire que je connais bien. Un nom qui sonne comme le mien. Ses parents sont « valenciens », mes grands-parents étaient de Cox et de Fuente Alamo. « Bonjour Michel ! j’ai quelque chose pour vous, pouvez-vous passer au salon tout à l’heure ? — Bonjour Éric ! Oui, mon boulanger est à côté de votre boutique. Vers les onze heures, ça vous convient ? — Parfait ! » À l’heure convenue, je pousse la porte de son salon. Éric coupe et rase. il lâche son client et ses ciseaux, puis me tend, un paquet « Voilà ! C’est pour vous. » Sans réfléchir, je m’exclame : « Des mantecaos ! — Oui, je me souviens d’un billet que vous aviez écrit sur ces gâteaux. Ceux-là ont été faits par ma mère. Et je sais ce qu’ils représentent pour vous. » Ce geste inattendu m’a touché, ému. Ces gâteaux sont en effet associés à l’image de ma tante Dolorès, Lola ! Son souvenir est toujours vivant en ces jours de décembre. Je la revois encore préparer « ses » mantecaos dans cette pièce étroite et sombre, au plancher branlant, qui servait de cuisine et de salle à tout faire : manger, laver les corps et le linge ; de chambre aussi à l’occasion quand s’installait chez elle un cousin venu du village de mon grand-père, Cox.
Ses mains agiles étaient alors couvertes d’une fine poudre blanche qui dissimulait en partie des ongles et des doigts abîmés par de pénibles travaux domestiques dans de bourgeoises maisons où elle était employée. Ses mains, je les trouvais cependant belles ; et mon insistance à les observer, m’attirait souvent d’affectueux sourires de reproches. À la « bader » ainsi, me disait-elle, ses mantecaos allaient «virer». Et ses étoiles, ses lunes et ses soleils n’auraient pas le fondant et la friabilité qui les faisaient craquer sous la dent. Rien au monde ne pouvait m’éloigner d’elle en ces circonstances. Elle était si sûre de son art et si fière des plaisirs qu’elle allait nous donner les jours suivants ! Surtout quand les premiers mantecaos étaient servis à la fin du repas de midi du dimanche suivant. Lola alors attendait, droite, les bras croisés sur son tablier serré à la taille, les manifestations de joie de l’enfant que j’étais en ce temps-là. Jusqu’à ce qu’elle perde la mémoire et les mots, malgré l’éloignement, chaque année, à la même période, Lola ne manquait jamais de m’envoyer, où que je fus, un plein colis de ses merveilleux biscuits de Noël ; colis qu’elle enveloppait dans une vieille édition du journal local qu’enserrait une solide cordelette savamment nouée. Sur l’étiquette, mon nom et mon adresse étaient écrits, tout en rondeurs. Longtemps, très longtemps, j’ai toujours reçu les mantecaos de Lola. Toujours à la même date, à la même « heure ». Depuis que Lola n’est plus de ce monde, les rares fois où le désir me pousse devant un présentoir qui en expose quelques uns, je sais toutefois en pensant à elle, qu’ils ne pourront jamais égaler le goût des siens.
Dans la rue Rabelais, au 32, qui n’est plus, il m’arrive parfois d’entrevoir, au travers de la fenêtre du troisième étage de cet immeuble qui fut condamné à la démolition et souvent squatté, et où demeurent encore d’aimables fantômes, celle qui avait, plus que toute autre, le culte de la famille et de la générosité. Une générosité au goût plein et riche de ses mantecaos.
Éric, ce matin, m’a fait un très beau cadeau. S’il lit ce petit texte, il comprendra l’émotion qui fut la mienne quand je le reçu. Il est des gestes simples qui parfois soulèvent la corne jaunie par les ans.
Le 3 avril 2017, j’ai écrit dans mon blog un billet en mémoire de Gérard Calvet, un ami peintre qui venait de mourir. Depuis, j’entretiens une correspondance avec une de ses filles, Lise. Une correspondance à laquelle vient de s’adjoindre, à ma grande surprise, Nicholas Peters, un citoyen américain vivant en Caroline du Nord, à Asheville, précisément. Dans son premier message reçu la semaine dernière en commentaire de ce billet du 3 avril 2017, Nicholas me fait savoir qu’il avait vécu avec ses parents à Paris, de 1959-1966, et que son père avait alors acheté plusieurs tableaux de Gerard Calvet. Au cours des années, il avait hérité de trois d’entre eux, et de très beaux, précise-t-il. Il ajoute encore dans un français tout à fait convenable que « c’est seulement en trouvant votre blog que j’ai apris que Calvet est decede. Ses tableaux sont dans des places d’honneur dans ma maison dans un couloir, un salon, et une chambre a coucher. » La « Toile » est souvent critiquée, me disais-je en le lisant, mais on y fait parfois de surprenantes et très belles « rencontres ». Lise, en tout cas, sait désormais que trois tableaux de son père sont accrochés en bonne place chez Nicholas, à Asheville, et qu’ils lui « donnent beaucoup de bonheur ». Entre temps, elle lui a écrit et nous avons reçu tous deux, jointes à la réponse de Nicholas, trois photos de ses « Calvet » américains…
L’humanité est à son point de bascule, et l’écologie est absente, nous dit Dephine Batho dans une tribune au « Monde » du jour. Tout comme la jeunesse qui devrait pourtant se tourner vers l’écologie politique. Et si elle ne le fait pas, nous explique-t-elle, c’est parce que ce courant politique et ses partis n’assument pas clairement la rupture avec le dogme de la croissance. Le potentiel de cette jeunesse, ajoute-t-elle, pourrait pourtant changer la donne politique beaucoup plus rapidement et profondément que les états-majors ne le pensent. Conclusion ! « Le moment est venu d’assumer la décroissance comme étendard de l’écologie. » C’est-à-dire, moins produire, moins travailler, moins consommer, moins voyager, etc. C’est-à-dire encore, dans un langage « éveillé » plus « sexy » : produire autrement, consommer autrement, etc. Ce qu’à l’évidence n’entendent pas ses amis de la NUPES qui se focalisent sur l’augmentation des prix de l’énergie et la baisse du pouvoir d’achat.
Passons vite, d’abord, sur le défaut de raisonnement de madame Batho qui fait dépendre le sort de l’humanité et de la planète, d’une seule et sévère politique nationale de décroissance dans tous les domaines de la vie économique et sociale ; défaut qui en outre fait de sa proposition politique un énième « vœux pieux », source d’angoisse existentielle pour de nombreux « jeunes gens » engagés dans le combat « écologique ».
Aujourd’hui, en effet, le charbon, le pétrole et le gaz, c’est 81 % du mix mondial, contre 82 %, il y a 25 ans – les renouvelables n’ayant fait que répondre à la hausse de la consommation d’énergie, pas plus. Et au rythme actuel, le monde en a encore besoin pour atteindre un pic vers 2035 (selon l’Agence internationale de l’énergie.)
Bref ! si Batho raisonne à l’envers, il n’empêche qu’elle énonce, en la masquant, certes, une part de vérité : la transition écologique ne sera pas l’Éden promu par nos écologistes d’EELV. Elle ne peut- être en effet qu’une somme sévère d’efforts, d’adaptations et de renoncements dont les conséquences sur la croissance, l’inflation, les finances publiques, la compétitivité, l’emploi et les inégalités devront être clairement exposées. Une transition qui prendra de longues années et qui ne peut être que concertée et coordonnée au plan mondial. Ce qui, on en conviendra, n’est pas une offre politique excitante et classique pour des partis et des électeurs dont « l’imaginaire » idéologique, moral et politique est encore, disons très « carboné ».
Onze heures ! Beau soleil. Une patinoire couvre la portion de la Voie Domitienne de la place de l’Hôtel de Ville ; deux alignements de baraques en bois blanc occupent la promenade des Barques et le cours Mirabeau, en face, sur la rive droite, présente une suite de manèges plus ou moins monstrueux. Une petite animation règne dans cet ensemble « féerique ». On peut y voir des enfants tourner et retourner sur la patinoire, des badauds passer et repasser devant des chalets de foire exposant des peluches et des bijoux de pacotilles, et entendre crier de petites troupes de jeunes filles perchées sur des manèges effrayants. Une musique d’ambiance de « grandes surfaces » enveloppe le tout. Parfois, l’animateur de service l’interrompt pour faire la pub d’un exposant ou d’un commerçant. Partout en France, finalement, les mêmes marchés de Noël, les mêmes centres commerciaux et les mêmes entrées de ville. Un contraste saisissant entre l’accélération des facilités inédites de voyager, et l’uniformisation et l’appauvrissement relatif des paysages types du monde. J’ai croisé ce matin de nombreux touristes espagnols. Il fut un temps où c’est « Nous » (Les « Miens » cependant n’en avaient pas les moyens !) qui allions chez eux. Les habitants du coin les rejoindront cet après-midi. Et tous feront foule. Comme en d’autres et féeriques lieux !