Chronique de Narbonne et d’ailleurs: des statues et des hommes…
Je n’ai rien contre l’art statuaire en général, mais je dois néanmoins confesser une profonde et définitive allergie à ces bronzes en pieds de personnages publics coulés et érigés aujourd’hui dans nos cités au lendemain de leur mort. Je croyais cette forme de glorification et d’édification des «peuples» définitivement abandonnée, et la voilà qui paradoxalement ressurgit dans nos petites villes de province. En l’occurence la mienne. Les amis et les proches de Georges Frêche furent les premiers à inaugurer cette forme régionale d’idolâtrie politique qui, comme dans tous les cultes, élève le défunt au rang d’oeuvre d’art traversant les siècles. À Montpellier, on distribue même, chaque année anniversaire, un prix à l’effigie de celui qui ne fut pourtant que le maire de Montpellier et le Président d’un Conseil Régional. Toute une tradition politique fondée sur la seule autorité d’un homme, dont les prosélytes invoquent régulièrement la puissance quasi divinatoire de son esprit et de son action. Inutile de préciser que cette tradition n’est pas la mienne. Je réserve, en effet, mes hommages et les rituels qui les ordonnent à d’autres moments de notre histoire nationale; le plus souvent, pour ne pas dire toujours, dans le secret de ma conscience. On ne sera donc pas étonné de ma réaction à cette initiative de l’association des « amis d’Hubert Mouly », qui fut longtemps maire de Narbonne, d’installer à leur tour, sur la scène locale, une statue à sa gloire. Que l’on me comprenne bien, on peut éprouver du respect et de la gratitude envers celui qui dirigea longtemps les affaires municipales, ce qui est mon cas, sans pour autant tomber dans cette forme de célébration mémorielle aussi ostentatoire qu’anachronique. L’exercice de plusieurs mandats municipaux, ne prédestine pas son titulaire, tout de même! , à l’immortalité d’un « bronze » et aux cérémonies processionnaires qui ne manqueront pas de l’entourer. Notre vie politique moderne, qui ne communie plus dans le culte des « grands hommes », nous apprend aussi à garder envers tous les pouvoirs et ses représentations cette distance sans laquelle il n’est pas de démocratie possible . De fait, le statut de nos hommes politiques, qu’ils règnent à Rome ou dans un « village », a perdu de nos jours – c’est heureux – cette aura quasi religieuse qui les plaçaient , si je puis dire, hors du commun; et le pauvre esprit de dévotion a fini par céder sa place au noble esprit critique. Ces deux colonnes ioniennes coupées en leur milieu figurant sur cette photo me semblent parfaitement illustrer mon propos…
Photo DDM, JMG. La Dépêche
Mots-clefs : Georges Frêche, Hubert Mouly, Statue
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Jacques PERRY
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Je suis complétement de votre avis – Fusse t’il un grand Maire, bâtisseur, une association en honorable communion de pensée, recuillie en sa mémoire a sollicité d’un statuaire la déification de l’homme . J’ai aimé cet homme dans sa relation et l C’est anachronique en effet
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pcg
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Le challenge , in fine , c est d avoir un bronze célébratoire a son effigie de son vivant ! je vais me mettre au travail .
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Michel Santo
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Chiche!
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jacques
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J’attends avec impatience les premiers miracles aux abords de cette statue. La fertilité rendue aux femmes, la guérison de maladies rares. Santo subito.
Desolé pour mon propos irrévérencieux mais je croyais aussi avoir changé d’époque, et pour narbonne et pour Montpellier.
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Alphonse MARTINEZ
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Il fut sans doute de tous les Maires le meilleurs gestionnaire des deniers publics , faut-il pour cela l’idolâtrer parce qu’il a fait correctement son travail ?? Lorsque l’on se réfère à certains articles de la Presse de l’époque nous étions loin de poser son effigie sur un piédestal . N’en déplaise à ses adorateurs ,il me semble qu’ un d’humilité s’impose lorsque l’on sait que malgré tous les mérites que l’on peut attribuer à cet homme ,il n’en demeure pas moins que Narbonne est restée l’une des villes les plus pauvres de France . Autre fait qui porte à réflexion et à relativiser ,c’est pendant une période faste que Me Hubert MOULY a exercé sa mandature. Maintenant je suis tout a fait d’accord avec vous pour honorer « un » homme l’art statuaire est une sorte de célébration cultuelle moyenâgeuse.
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Santo
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Votre lucidité respectueuse est tout à fait de circonstance Alphonse! Elle semble cependant manquer à nombre de nos concitoyens toujours dans la nostalgie d’idoles à honorer …
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