Contre-Regards

par Michel SANTO

Ce dimanche matin-là, j’ai croisé de jeunes « zemmouriens » sur la promenade des Barques…

     

Cela faisait plusieurs jours, une quinzaine, que ces images tournaient dans ma « tête », impuissant que j’étais à les mettre en mots ; à en saisir le pourquoi et le sens. C’était un dimanche matin et j’étais sorti « faire un petit tour en ville ». Les marchands de plein vent installés sur la promenade des Barques et le parvis des Halles donnaient de l’animation au centre-ville. Et de part et d’autre du canal de la Robine, la foule était dense, comme d’habitude ! et le marché couvert, tout aussi populeux, bondé.

PRG et Christiane Taubira ! La messe est dite : ce n’était pas un échange d’amour !

   

Dans ma petite ville, les deux grandes voix radicales de Gauche qui hier clamaient amour, fidélité et assistance à Christiane Taubira, sont aujourd’hui coites, désemparées et recluses dans leur petite, mais somme toute confortable, chapelle politique. Depuis que Lacroix – quel nom pour un Président « radical » ! – , leur Saint patron laïque, a prononcé dans sa dernière bulle dominicale la sentence d’excommunication de leur éphémère candidate d’union, les vœux de mariage solennellement échangés sont en effet rompus. Cramé donc le pactole financier, et de parrainages surtout, qui lui était « promis-juré ». La messe est dite : ce n’était pas un échange d’amour ! Mais qui pensait sérieusement, à part quelques petites et maigrichonnes troupes bigotes, que ces défuntes noces étaient faites pour durer ?

       

Dimanche, Valérie Pécresse ne fut pas à son zénith oratoire !…

     

Ce fut donc un naufrage, dimanche. Au Zénith ! Et Valérie Pécresse l’a exprimé de façon inconsciente dans sa malheureuse déclaration d’amour pour la France. Ce pays, « je l’aime corps et biens », a-t-elle confié de manière théâtrale à ses fidèles tétanisés. « Corps et biens » ! Comme un navire disparu en mer, avec son équipage et ses marchandises. Quel pathétique aveu de son impuissance à maîtriser son corps et ses mots ! Quant à ceux de la France ! Un peu d’âme aurait pourtant suffit pour son plus grand bien et celui de notre langue. Le nôtre aussi tant elle est maltraitée par ceux-là mêmes qui devraient la magnifier, la célébrer, l’aimer corps et âme.

     

Sommes-nous prêts à payer le prix social et financier exigé pour le confort de nos aînés en Ehpad ?

 
 
 
 
 
 
 
 
La tempête médiatique est passée.
Après les vagues d’indignation soulevées par les révélations sur les conditions de vie des personnes âgées dépendante dans des établissements de « luxe » d’un groupe privé, contenues dans un livre sorti ces derniers jours, le calme est très vite revenu sur nos « ondes » et nos « consciences » éditoriales et politiques se sont enfin tues.
L’odeur d’urine qui fut tant commentée dans les studios de radio et sur les plateaux de télévision est désormais « couverte » par les bruits de bottes aux frontières de l’Ukraine, la montée sur Paris des anti-pass et antitout, les dernières frasques, sottises, énormités et bassesse des candidats à l’élection présidentielle… Selon l’impitoyable loi de l’économie de l’information – une info chasse l’autre –, nos pères et mères âgées ont été passés à la trappe du temps d’antenne.
Il ne pouvait en être autrement tant ce sujet est un des plus « refoulés » et douloureux pour nos générations encore actives ou en bonne santé. Le plus « refoulé » et douloureux parce que le sort de nos parents très âgés vivant dans ces établissements taraude ce qui nous reste encore de « morale » ; le plus « refoulé », douloureux et insupportable, car il figure aussi le cauchemar de nos propres fins de vie.
Tant pis, si je me fais mal comprendre, mais que tant de voix se soient ainsi élevées bruyamment – pour retomber aussi vite – m’a, je l’avoue, profondément troublé, irrité même. Et les « pleurs » de circonstance à l’évocation « d’odeurs d’urine », notamment, me sont apparus empreints d’une grande hypocrisie.
Chacun devrait pourtant savoir que sitôt la porte franchie d’un de ces établissements pour personnes âgées, une odeur composée d’effluves d’ammoniaque, de produits d’entretien et de corps usés et soignés prend le nez et la gorge du visiteur pour ne plus jamais le quitter. Elle imprègne les murs et révèle ce que nous refusons inconsciemment de voir : notre vieillissement et nos peurs…
Qu’on m’entende bien ! L’existence de toutes sortes de « maltraitance » dans ces résidences publiques ou privées ne fait aucun doute. Mais faire semblant de les découvrir aujourd’hui est trop facile. Elles ne datent pas d’hier, en effet. De sorte que la seule vérité qui compte et que nous nous devons à nous-mêmes s’énonce tout simplement ainsi : « sommes-nous prêts à payer le prix social et financier pour que nos pères et mères âgés aient une fin de vie la plus digne possible ? »
Le sera-t-elle un jour ? J’en doute !
 
 
 
Cela fait déjà un mois et demi que ma sœur, ou moi, ne pouvons voir notre mère qu’une fois par semaine, sur rendez-vous, une demi-heure seulement… Je n’en ai pas oublié pour autant l’odeur de cet établissement public. C’est aussi celle de la vie, malgré tout…
 
 
 
 
 
 
 
 

On ne quitte pas Proust ! Sa recherche du temps perdu est la nôtre.

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Page après page, depuis juin dernier, je passe l’essentiel de mon temps de lecture quotidien dans « … la Recherche du temps perdu ». Il ne me reste plus qu’une heure ou deux avant de terminer ce septième et dernier titre de mon édition numérique. Deux plutôt ! car je m’arrête – ou reviens – fréquemment sur un passage surligné. Comme pour retenir le temps d’en finir avec cette œuvre. Ce qui est impossible ! Immense roman-poème, y plonger, c’est en effet n’en jamais ressortir. On ne quitte pas Proust ! Sa recherche du temps perdu est la nôtre. Elle émeut, elle éveille, elle fait sourire. Ses personnages, des plus glorieux aux plus humbles, sont de tous les temps. Comme les « portraits » sociaux et psychologiques qu’en fait le Narrateur, d’une profondeur et d’une finesse admirables.
 

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