Plaire même à ceux qu’on méprise ?!

Diderot. Lettres à Sophie Volland.

5 août 1762

Extrait :

« Je viens de recevoir un billet de cette pauvre Mad Riccoboni. Elle est désolée. Elle ne peut digérer les impertinentes satires qu’on fait d’elle et de ses ouvrages. Elle dit : « Si un coquin cassoit les fenêtres d’une blanchisseuse, le commissaire en feroit justice. On m’ôte mon ouvrage, on m’insulte, et personne ne dit mot. » Eh bien ! voilà donc le fond de l’âme d’un auteur ; il veut plaire même à ceux qu’il méprise. L’éloge de mille gens d’honneur, d’esprit et de goût, ne le console pas de la critique d’un sot. Il oublie la voix douce et flatteuse de ceux-cy, et le cri importun de celui-là retentit sans cesse à son oreille. On ne peut se résoudre à une injustice de tous les tems ; on veut être excepté d’une loi, dure à la vérité, mais qui s’est exécutée depuis la création du monde sur tout ce qu’il y a eu de grands hommes. Il faut que l’homme meure ; il faut que l’homme supérieur soit persécuté.»

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