Les convictions aujourd’hui, c’est quand tu ne peux plus faire autrement…
Mes lectures:
« L’effusion fut franche, celle de deux députés qui ont partagé les bancs de l’Assemblée à la même époque, qui seraient bien en mal de détailler ce qui les sépare politiquement, si ce n’est qu’à un moment donné une opportunité leur a été offerte par un camp plutôt qu’un autre.
— Ça me fait plaisir de te voir. Tiens ! Assieds-toi.
Il lui désigna un fauteuil Louis XV.
Ils restèrent un moment silencieux comme si chacun cherchait une gentillesse crédible à dire. Le Premier ministre fut le plus prompt à cet exercice.
— J’ai apprécié ton soutien sur la politique étrangère.
— C’est le seul domaine où l’opposition peut soutenir le gouvernement sans qu’on soit suspectés d’entente. Les gens pensent que notre démocratie fonctionne tant qu’on s’étripe. Si on s’accordait sur d’autres sujets d’intérêt national, ils s’imagineraient dans un système totalitaire. Mais pour le reste, je trouve que vous ne montrez pas beaucoup de convictions.
— Les convictions aujourd’hui, c’est quand tu ne peux plus faire autrement, tu le sais bien.
— Mais vous ne pouvez plus faire autrement que de bouger. Sauf si vous vous résignez sur votre sort et que vous acceptez qu’on soit au second tour seuls contre l’extrême droite.
— Les gens s’accrochent à l’idée d’un passé qui n’a jamais existé. On est dépendants d’une croissance sur laquelle on a de moins en moins d’influence, je ne t’apprends rien. »
Extrait de : Dugain, Marc. « L’emprise. » Editions Gallimard, 2014. iBooks.