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Réenchanter le rêve français, vraiment?

 

 

Réenchanter le rêve français ! Grandiloquence et ridicule de la formule. Et si peu adaptée aux circonstances. Comme à la personne Hollande. Qui ne peut, malgré tous ses efforts, faire oublier ce qu’elle fut. Au physique surtout, qui se prête si peu à ce genre de déclamation et l’oblige à hausser son menton, rouler des yeux et forcer sa voix (mal posée). Que ne reste-t-il sur son registre de « candidat à la candidature modeste », qui l’habille pourtant si bien. Le temps n’est plus au romantisme politique et à la geste amphigourique. Stopper et réduire les déficits publics en préalable à tout le reste commandent de ne point rêver à un miracle français. Et les mois qui viennent devront plutôt faire appel à la lucidité et au courage qu’aux illusions d’un avenir radieux et enchanté.  

Deux recommandations de M.Kundera.

   

 

 

En ces temps d’emprise de nos « cerveaux » par les communicants et leurs commanditaires, deux recommandations pour se protéger de soi même et du « troupeau ». Signées Milan Kundera!

 

° Il faut en effet une grande maturité pour comprendre que l’opinion que nous défendons n’est que notre hypothèse préférée, nécessairement imparfaite, probablement transitoire, que seuls les très bornés peuvent faire passer pour une certitude ou une vérité.
(Une Rencontre, p.134, Gallimard/nrf, 2009)

 

° Mais le conformisme de l’opinion publique est une force qui s’est érigée en tribunal, et le tribunal n’est pas là pour perdre son temps avec des pensées, il est là pour instruire des procès.
(Les testaments trahis, p.280, Folio n°2703)

 

Mots de droite et maux de gauche.

   

 

Hier au soir, sur la 2, on a eu droit à une prestation d’un grand classicisme et d’un ennuie écrasant. Enarques et fille et fils spirituels de Jacques Delors nos deux concurrents, qui ont appris dans leur école à exposer un dossier, même inconnu d’eux, avec fausse conviction et vrai savoir faire sont restés dans la grisaille du parler technocratique. De ce « grand oral » labellisé E.N.A donc, qu’en dire ? Qu’a quelques nuances de ton près : l’agressivité de Martine et la sérénité de François, leurs propositions sont identiques et tout aussi flous. Et que la première, pour se distinguer, en est réduite à balancer des bêtises dans le style : « François emploi des mots de droite ». Ce qui me rappelle le distinguo jadis fait par l’idéologue en chef du petit père des peuples entre science bourgeoise et science prolétarienne. Affligeant! Il est temps que cette primaire cesse : le niveau baisse.  

Paroles de Max Rouquette.

 

 

 

 

 

Hier, en fin d’après midi, marche au départ de chez moi pour prendre les quais de la Robine en direction de l’écluse de Raonel. Un peu avant le début du chemin de halage, traversée d’une petite résidence. Sur une de ses façades, ce poème de Max Rouquette, qui, comme toujours, m’accompagne durant cette même randonnée :

 

 

« Les paroles étoilent la nuit des choses.
Elles se mirent dans l’étang
[des monstres abandonnés
au fond du puits éternel des ténèbres.

Les paroles sont de la lumière en chemin
qui ne savent pas si quelqu’un les attend.

La nuit infinie »

 

Et puis ce matin, devant mon clavier à écrire ces quelques mots, fatigué du bruit et de la fureur, des mensonges et des petitesses charriés par nos « ondes » radiophoniques, ceci encore sur mon écran obtenu d’un simple clic :

  

 « Tant m’ont lassé les paroles de vent
le babil de corneilles sur le toit
du monde avec son bruit de ferraille
que parfois j’ai envie de ne dire
mes paroles qu’aux combes désertes,
aux paliures, à la fougère, à la bruyère,
à la roche, en son poids,
[songeuse de mille ans
qui du silence sait la force et l’épaisseur.
Certain que si elles ne m’écoutent pas
quelqu’un fait d’elles ses oreilles. »

 

Une société qui n’enseigne pas est une société qui ne s’aime pas.

illustration-(12)

 


Ce texte a été écrit en…1904! Plus d’un siècle a passé et rien de sa force n’a été perdu…

« La crise de l’enseignement n’est pas une crise de l’enseignement ; il n’y a jamais eu de crise de l’enseignement ; les crises de l’enseignement ne sont pas des crises de l’enseignement ; elles sont des crises de vie ; elles dénoncent, elles représentent des crises de vie elles-mêmes ; elles sont des crises de vie partielles, éminentes, qui annoncent et accusent des crises de la vie générale ; ou si l’on veut les crises de vie générale, les crises de vie sociale s’aggravent, se ramassent, culminent en crises de l’enseignement, qui semblent particulières ou partielles, mais qui en réalité sont totales, parce qu’elles représentent le tout de la vie sociale ; (…) quand une société ne peut pas enseigner, ce n’est point qu’elle manque accidentellement d’un appareil ou d’une industrie ; quand une société ne peut pas enseigner, c’est que cette société ne peut pas s’enseigner elle-même ; pour toute humanité, enseigner, au fond, c’est s’enseigner ; une société qui n’enseigne pas est une société qui ne s’aime pas ; qui ne s’estime pas ; et tel est le cas de la société moderne. »

Charles PÉGUY, Pour la rentrée , Oeuvres complètes, Tome I, La Pléiade, p. 1390