La fusion du Languedoc-Roussillon et de Midi-Pyrénées. Quel nom, quelle capitale et quel emblème ?
Un article fort intéressant , et instruit, sur la fusion des régions Languedoc-Roussillon et Midi-Pyrénnées , que nos élus régionaux, dont l’inculture historique et géographique laisse pantois , devraient lire – il ne prend que quelques minutes – pour ne plus nous assommer de pauvres arguments afin de justifier, dans un front régional inédit rassemblant le PS, l’UMP et le Front National, un statut quo dont plus personne ne peut désormais ignorer la seule logique corporatiste et rentière.
Extraits :
Les projets de réforme territoriale suscitent beaucoup de débats et d’inquiétudes. Les enjeux économiques, politiques et identitaires de ces projets sont en effet important. Quelles sont les limites à donner aux nouvelles régions ? Quel nom et quel emblème leur donner ? Quelle capitale choisir ? Pas facile de répondre à ces questions quand les intérêts des uns et des autres sont divergents. Pour contribuer au débat voici quelques éclairages et réflexions issus de ma pratique d’historien et de professeur d’Histoire-Géographie.
Dans un article publié l’année dernière sur ce blog j’avais évoqué les origines de la région Languedoc-Roussillon ainsi que ses enjeux identitaires, économiques et politiques. Revenons sur ce thème à propos de la fusion proposée récemment par le président de la République des régions Midi-Pyrénées et Languedoc-Roussillon.
Un ensemble cohérent faisant renaître le comté de Toulouse ?
Contrairement aux projets précédents, celui de François Hollande ne démembre aucune région mais procède à des fusions. C’est ainsi que Midi-Pyrénées et Languedoc-Roussillon sont mariées pour former la plus grande région de France par sa superficie avec treize départements. Par sa population de 5,3 millions d’habitants (soit 8 % de la population française) cette région sera aussi l’une des plus peuplées.
Cet ensemble correspond à l’aire d’attraction des métropoles de Toulouse et Montpellier. D’un point de vue historique la future région coïncide en grande partie avec l’ancien comté de Toulouse et ses zones d’influence. Seuls le Roussillon et les Hautes-Pyrénées n’en faisaient pas partie, tandis que l’Ardèche, la Drome et le Vaucluse, anciennes possessions des comtes, ne sont pas comprises dans cette future région.
Un grand Languedoc
Le choix d’accoler les noms des régions fusionnées pour former un nouveau nom se défend dans quelques cas comme l’Alsace-Lorraine qui regrouperait deux régions aux identités propres. En revanche le nom Midi-Pyrénées-Languedoc-Roussillon serait long et assez difficile à porter. Une simplification s’impose, au moins pour l’usage courant. Par chance la nouvelle région regroupe des territoires qui partagent une identité linguistique et culturelle commune : à l’exception du Roussillon, tous les départements appartiennent au domaine occitan. Et si l’on considère que le catalan n’est qu’un dialecte d’occitan, au même titre que le gascon, le limousin ou le provençal, toute la région est occitane. Cependant cette région ne couvre pas l’ensemble de l’aire occitane, qui comprend aussi l’Aquitaine, le Limousin et la Provence. Le nom Occitanie ne serait donc pas adapté. Il semble pourtant retenir les faveurs de la Dépêche du Midi.
En revanche, le nom Languedoc, qui dérive de « langue d’oc », expression qui apparait au XIIIe siècle pour désigner l’Occitan, serait plus judicieux. Ce nom désigne d’abord au sens large le Midi occitan. Il désigne aussi, jusqu’à la fin du XVIIIe siècle, une province s’étendant des piémonts pyrénéens au Rhône. De plus le nom Languedoc est encore compris, par une partie de la population, comme le territoire correspondant à l’ancienne province. C’est ainsi que les éditions Privat ont publié dans les années 1970 une Histoire du Languedoc moderne. Même si au sens restreint, l’étendue de cette province ne coïncide qu’en partie avec la future région, au sens large la future région serait bien de langue d’oc…
La croix de Toulouse pour emblème ?
La croix ajourée d’or sur fond rouge est l’emblème que se sont choisis les comtes de Toulouse au XIIe siècle. Elle devient par la suite l’emblème des possessions de ces comtes. A l’Époque moderne, les États de Languedoc, institution gérant la province du même nom et préfigurant le conseil régional, choisit également la croix de Toulouse comme emblème. Avec la renaissance de l’Occitan au XIXe siècle et le développement de mouvement occitanistes, cette croix devient l’emblème des défenseurs de la langue et de la culture occitane. La région Midi-Pyrénées l’adopte à son tour dans les années 1980 tandis que la région Languedoc-Roussillon en fait un des éléments de son logo entre 1988 et 2004.
Les habitants de la future région sont donc attachés et familiarisés avec cette croix de Toulouse. Elle doit donc être conservée. Toutefois cette croix n’évoque pas l’identité catalane présente dans les Pyrénées-Orientales. On pourrait donc associer à la croix de Toulouse les pals sang et or catalans, comme dans le blason de la Région Languedoc-Roussillon ci-contre. Ces pals peuvent évoquer les blasons du comté de Foix (c’est à dire l’Ariège), et de la vicomté de Millau (c’est à dire le sud Aveyron), territoires situés dans l’aire d’influence des comtes catalans de Barcelone au début du XIIIe siècle. Ces même pals peuvent évoquer l’influence catalane qui s’exerce à la même époque sur l’Aude (comtés de Carcassonne, Razès et Narbonne) ainsi que sur la ville de Montpellier.
Deux capitales ?
La grande crainte d’une partie des Montpelliérains et notamment celle du président de la région Languedoc-Roussillon est de voir la ville de Montpellier perdre en même temps que son titre de capitale régionale, une partie de son influence et de ses emplois au profit de Toulouse. Car Toulouse, par son poids démographique et économique s’impose comme la capitale du nouvel ensemble régional. De plus, l’étendue de la future région risque de marginaliser davantage les villes et territoires situés loin de Toulouse, comme Mende, située à près de 4 heures de route. La solution pourrait être de conserver deux capitales.
Cela peut paraître irréaliste mais la province de Languedoc a connu cette expérience. La capitale de la province a été fixée en 1670 à Montpellier mais cette province était divisée en deux parties appelées « généralités » dont l’une des deux avait pour capitale Toulouse et l’autre Montpellier. De plus, l’assemblée gérant les impôts et travaux publics de cette province, les États de Languedoc, siégeait jusqu’en 1737 de manière tournante dans les principales villes de la province. C’est ainsi que Carcassonne, Narbonne, Béziers, Nîmes ou Beaucaire jouèrent temporairement le rôle de capitale provinciale.
En 1790 la création des départements entraîna le choix de nouvelles capitales. Pour ménager les susceptibilités locales un système d’alternance avait été prévu. C’est ainsi que dans l’Aude Narbonne et Carcassonne devaient être alterner à la tête du département. Cependant ce système ne fut pas mis en œuvre.
Les exemples de territoires plus ou moins bicéphales ne manquent pas non plus dans le monde d’aujourd’hui. La Bolivie possède deux capitales : Sucre qui accueille la cour suprême et la Paz le siège du gouvernement. Le parlement européen siège à Strasbourg et Bruxelles…
En s’inspirant des exemples précédents on peut imaginer que le conseil régional siège en alternance à Montpellier et Toulouse, voire même dans les différents départements. Cela n’entrainerai pas de dépenses supplémentaires puisque les locaux sont déjà construits. On peut imaginer aussi de répartir les services entre les différentes villes. Tout ce qui touche à la mer et notamment le Parlement de la mer, aurait par exemple vocation à rester sur Montpellier. Ce type d’organisation existe déjà dans d’autres régions. La Haute et la Basse-Normandie ont par exemple créé un comité régional du tourisme commun aux deux régions, et dont le siège n’est pas dans l’une des capitales régionales, mais à Evreux, la préfecture de l’Eure. La ville de Carcassonne qui occupe une position centrale dans la future région et qui est l’un de ses pôles touristiques pourrait accueillir elle aussi le comité régional du tourisme. Ce type d’organisation permettrait de conserver un certain équilibre entre les villes et de trouver une réaffectation des locaux des départements.
Conclusion
La proposition la plus cohérente semble d’appeler la région Languedoc, de lui donner pour emblème la croix de Toulouse et pour capitale Toulouse. Cependant, dans un souci d’équilibre et d’équité territoriale il conviendrait de ne pas concentrer tous les services ni toutes les sessions du Conseil régional dans la même ville.
Mots-clefs : Aude, Bourquin, Catalogne, Comté de Toulouse, Languedoc Roussillon, Malvy, Midi Pyrénées, Montpellier, Occitanie, Toulouse
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Rei Bèthvéder Nicolau
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Cet article, qui a des qualités, oublie la réalité catalane (dpt 66) et encore plus la réalité gasconne (dpt 65,32, 31,09, 82).
Nous ne sommes pas languedociens !
Votre nom n’est pas valide.
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Michel Santo
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Mais pour le reste : la fusion des deux régions en question, qu’en pensez vous ,
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Petit Boucan
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Quelques maladresses dans l’écriture effectivement…
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Michel Santo
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C’est à dire !
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Georges RAMON
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Un nom de région peut ne pas décrire exhaustivement tous les composants qui la constitue.
Quelques exemples parmi tant d’autres :
La France n’a jamais été habitée dans son intégralité par les Francs et elle constituée d’un multitude de peuples.
Les Cerdans ne sont ni Languedociens ni Roussillonnais
Les Basques sont en Aquitaine.
Etc…
Donc en tant que Catalan, être dans la région Grand Languedoc ou Occitanie n’est pas un problème et puis nous serons l’accent Catalan de cette région ;-)
Concernant la capitale, il me parait évident principalement pour des raisons de taille et de notoriété qu’elle doit être Toulouse. Toutefois, une gestion moderne décentralisée serait opportune avec par exemple :
– Affaires maritimes, urbanisme… à Montpellier
– Relations avec PACA à Nîmes
– Affaires internationales à Perpignan
– Relations avec Aquitaine à Tarbes
– Agriculture à Montauban
– Tourisme à Carcassonne
– Infrastructures à Narbonne
Etc…
Le 66 est un département habité en grande partie par des retraités et des assistés; il a été cannibalisé par Montpellier (même le rugby !), nous n’avons rien à perdre au changement, bien au contraire. En PIB par habitant le Languedoc Roussillon est classé 21e sur 22, le PIB par habitant du Midi-Pyrénées est classé 8e sur 22. Cette nouvelle grande région serait la 2e en superficie, la 3e en population, la 4e en PIB bref nous serions enfin en situation de puissance.
Concernant l’emblème, le blason du Languedoc-Roussillon associant les armes des comtes de Toulouse et des comtes de Barcelone parait sympa.
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Norfé
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Bonjour, et merci pour article.
Par contre l’affirmation » le catalan n’est qu’un dialecte d’occitan « , c’est comme si vous avanciez que l’occitanie s’étendait au delà de Barcelone. Mais bon, l’erreur est humaine et surtout le « ton » du blog est intéressant ! Alors, on pardonne.
Cordialement
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DOZ
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Pas trop le temps mais en 1285 c’est Pierre III fils ainé de Jacques Ier le conquérant qui avait laisser sa dynastie entre ses deux fils, l’aîné contesta le droit de vassalité, mais à Pierre l’aîné il légua, le Comté de Barcelone, d’Aragon, et presque la Castille, et son frère l’actuel département du Roussillon plus la Cerdagne (comte de Foix) la seigneurie de Montpellier à sa mère, ainsi que les Baléares (donné le temps du Palais des Rois de Majorque) et pour de bons échanges sur la Méditerranée avec la pointe de l’Afrique. Bref fin bâtisseur et bons dans les échanges avec les autres contrées…. L’Empire aurait pu être gigantesque sans cette guerre fraternelle, et si Chrsitophe Colomb n’avait pas choisit deux siècle plus tard de sceller le sort des Américains. Tout ça pour dire que pendant 500 ans passé nous appartenions au royaume Catalano Aragonesque. Alors … le traité des pyrénées au Luxembourg en 1659 nous a rattaché après Philippe II, et l’armée Française de Louis XIV à la France… Toujours respecté par la République Française (un cadeau de la France à L’Espagne ! Bien sur « Pas mai estimat » : Parler propre parler Français à l’école (traumatisme pour les anciens dans les foyers) écrit au lavoir d’Ayguetebia petit village Catalan !
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