Les mots simples de Laurence…

C’est d’un village près de Beaune où Laurence vit que son petit message illustré d’une photo de sa petite récolte de tomates est arrivé dans ma boîte à lettres numérique. Un petit message écrit avec les mots simples et sincères d’une jeune amie – elle pourrait être notre fille – qui imaginait devant les fruits de son jardin la salade que nous aurions pu partager ce jeudi soir de septembre. Des mots simples, une excuse, me disait-elle, pour nous adresser « un petit coucou » et nous rappeler ainsi l’affection qu’elle nous porte. Des mots qui vont au cœur et qui subtilement ont éclairé certains replis parmi les plus intimes de ma mémoire. Je revoyais, en effet, en les lisant, ma tante Dolorès préparer des conserves de ce même fruit dans sa cuisine. C’était un rituel – chaque année, en septembre – auquel jamais elle ne dérogeait. Elle en faisait d’ailleurs une quantité invraisemblable dans des bocaux de différentes formes récupérés ici ou là, des bocaux qu’elle rangeait ensuite dans le placard technique du palier qui desservait son appartement HLM : placard technique qu’elle s’était approprié et avait rempli d’étagères sous lesquelles disparaissaient les tuyaux et compteurs d’eau et de gaz. Il y avait là de quoi nourrir sa petite famille pendant des mois, affirmait-elle en souriant. On y trouvait, il est vrai, toutes sortes de conserves : tomates, concombres, haricots verts, petits pois, pois chiches… Et des pots de confiture en grand nombre. Aucun fruit ne manquait sur ses étagères, mais j’aimais surtout ses confitures de tomates vertes et de figues entières : de véritables merveilles à l’incomparable saveur. Ah ! cet instant magique du premier pot ouvert dans lequel je prélevais délicatement à la petite cuillère l’un de ces précieux fruits. Les yeux fermés, je le gardais alors en bouche afin d’en retenir le plus longtemps possible l’intense émotion gustative qu’il provoquait. Ces mots et ces souvenirs, je les ai donnés à Laurence, tard ce même jeudi soir. Nous avions quitté Gruissan et notre cabane dans le courant de l’après-midi pour rejoindre notre appartement et venions de terminer un repas à l’espagnole, précisément, quand je les lui ai envoyés. Un repas simple et coloré : gaspacho, jambon ibérique, fromage de brebis et figues. Un repas simple et frais comme ce petit mot de Laurence reçu ce soir-là d’été. Un repas simple et discret que nous aurions pu partager sous le signe de l’amitié… 

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