D’abord, disons que j’ai participé au rassemblement républicain du 11 janvier, et que j’y étais sans brandir une petite affichette, « Je suis Charlie » ou « Charlie ». Disons encore, que je ne cessais d’expliquer autour de moi, à des jeunes, et moins jeunes, voisins, ce qu’avaient de réducteur ces slogans et ce qu’en faisaient les « médias » : de l’auto-promotion! ; que j’étais aussi « flic », « juif » et « musulman », parce que eux aussi victimes des mêmes terroristes islamistes. Bref! que j’étais un citoyen français touché au plus profond de ses convictions philosophiques et politiques, et qu’un crayon planté dans des cheveux faisait une belle image, mais que cette image n’était pas celle de la France rassemblée dans toutes les places et les rues de ses villes et villages.
C’est Jacques Drillon qui nous le dit dans un de ses excellents articles : « Tout est dans la connotation. Le sens permanent du mot, son sens objectif, sa «dénotation», n’ont plus d’importance. Voilà le but du totalitarisme : supprimer la dénotation, au profit de la connotation. Vieille histoire, vieil attentat contre le vocabulaire. Déjà, sous l’Occupation, les Allemands appelaient les Résistants des «terroristes». Lorsque tout est dans la connotation, le raisonnement devient impossible, la communication faussée, et l’exact se confond avec l’erroné. »
Et de noter que : « Les têtes pensantes de l’islamisme l’ont très bien compris. Ils ont mis une bombe sous chaque mot du vocabulaire. C’est ainsi qu’on déclenche une guerre civile. La dernière Une de «Charlie Hebdo» est «raciste», a dit l’un d’eux. Entretenir la confusion entre anti-islamisme et racisme, voilà un bon exemple de connotation chargée de l’emporter sur la dénotation, voilà un mot prêt à exploser. »
Le 11 janvier, un ministre saoudien manifestait à Paris. Le 9, dans son propre pays, un blogueur recevait 50 coups de fouet et était lourdement condamné pour « insulte à l’islam. Ainsi: « On peut donc être Charlie et charia. » C’est cela l’amalgame, comme à propos de l’islam et de l’islamisme, de l’islamophobie et du racisme…
La guerre contre le terrorisme est aussi une guerre des mots. L’aurions-nous déjà perdue?
« Être ou ne pas être Charlie, telle est la question qui monte en ce moment.
Elle s’est posée sur ce blog dès la semaine dernière à la suite du billet dans lequel je saluais la formidable mobilisation en réponse au massacre perpétré chez Charlie Hebdo. J’ai lu attentivement les commentaires des fidèles qui ne partageaient pas mon point de vue. C’est là que j’ai commencé à voir poindre le malentendu. D’où ce billet… »