Il est 10 heures 30, ce matin. À travers la grande baie de mon bureau surplombant les toits, la place et les rues qui font ma géographie quotidienne, j’observe, par intermittence, plus ou moins distraitement, et après que j’eus tapé quelques mots sur mon écran d’ordinateur, la circulation de passants, pour la plupart d’entre eux anonymes et plus ou moins pressés, ainsi que les déplacements et gestes d’ouvriers oeuvrant sur le grand chantier de rénovation urbaine ouvert au bas de mon immeuble du centre ville.
Dans « La bêtise s’améliore », Belinda Cannonefait dialoguer trois personnages autour de l’amour, la politique, l’économie, l’art, la morale, le désir, le bonheur…, trois personnages qui s’étonnent de ceux, nombreux, dont nous respectons l’intelligence et qui s’en servent…bêtement. Comment comprendre en effet que des esprits sophistiqués et en apparence libre en viennent à patauger dans les idées toutes faites ? A cette question, l’un de nos protagonistes (page 128 et 129…), Gulliver apporte la réponse suivante : « …Tu te souviens que j’avais désigné le réflexe, la pensée-mode et la paresse comme trois sources de la bêtise intelligente. Il faut y inclure un quatrième mécanisme : le bon sentiment. Appelle-le compassion, empathie ou révoltisme, selon les cas. » Autrement, et plus succinctement dit : le penser-court, les bons sentiments avant le raisonnement. Ou le militantisme compassionnel nourri « par le cordon ombilical de la misère des autres, par ces souffrances collectives où elles abolissent du même coup leur individualité. », comme le dit si bienPhilippe Muray. Un constat sociétal que partage, un jeune homme de 89 ans, Lucien Jerphagnon, qui nous livre aujourd’hui un savoureux florilège des réflexions sur la sottise, de Lucrèce à Cioran, tout en essayant de définir ce qu’il appelle la « sottise atmosphérique ». Celle qui traîne dans l’air du temps et à laquelle on n’échappe guère. Par exemple, au XIXe siècle, l’excès de rationalisme qu’incarne un M. Homais. Et aujourd’hui celle alimentée par des opinions proférées avec solennité dans certaines émissions de télévision ou dans des « réseaux sociaux », comme Facebook, par exemple. Le remède à cette moraline ? La prudence et la modestie : celle des sages, Socrate et Jean Gabin : « Je sais que je ne sais pas. » Et l’humour aussi…
Picasso Pablo (dit), Ruiz Picasso Pablo (1881-1973). Paris, musée national Picasso – Paris. MP72. Partager :ImprimerE-mailTweetThreadsJ’aime ça :J’aime chargement… […]