Je lis et j’entends ici ou là, pour ne pas dire partout où sont convoqués (ou pas d’ailleurs, comme sur les réseaux sociaux) sociologues, politologues et journalistes prétendument spécialisés, mais assurément engagés, que les émeutiers seraient l’avant-garde politique de « notre » jeunesse et de « nos » banlieues abandonnées, stigmatisées, ségréguées et racisées.
Ils s’appellent C., J., T. N. ou V. et appartiennent à la « petite bourgeoisie intellectuelle » : enseignant, intermittent du spectacle, médecin, fonctionnaire territorial… L’un est socialiste, chacun des autres, séparément : écologiste, communiste ou insoumis, et militent ensemble pour l’élection d’une candidate NUPES et « verte ». Je constate aussi qu’ils ont aussi en commun un rapport très troublant – dans tous les sens du terme – aux faits, à la réalité politique.
Font-ils un jour la promotion de Mélenchon au poste de Premier ministre pour mobiliser les électeurs antisystème, qui souvent s’abstiennent aux législatives, que le lendemain, on les voit battre le rappel de l’électorat du PS et d’EELV, en proclamant le caractère essentiellement local de ces mêmes élections. À croire que celui qui a tordu les bras de leurs partis respectifs en les soumettant à son leadership serait comme le « chat de Schrödinger» dans deux états contraires à plusieurs endroits à la fois !
J’ai beau leur dire que le futur Premier ministre serait Jean-Luc Mélenchon, et personne d’autre, et que cela est écrit dans l’accord de coalition signé au lendemain de l’élection présidentielle par les représentants de tous les partis impliqués, rien n’y fait. Ils jouent l’esquive et plongent dans un univers parallèle où la réalité prend des formes fantasmatiques. Les plus lucides, qui sont les plus malins, cependant, surfent à la godille sur le mouvement dans l’espoir d’obtenir quelques gratifications statutaires ou « symboliques ». Leur morale est simple. Elle se résume à l’axiome énoncé par feu Georges Frêche : « Les électeurs sont des cons ! »
À par ça, le détestable Mélenchon ne sera jamais premier ministre et NUPES n’obtiendra pas une majorité le 19 juin prochain. Mais chaque voix pour un candidat NUPES ne fera hélas ! qu’amplifier son ressentiment, ses frustrations, son agressivité, ses délires et l’autorisera, à la tête de sa « coupole », à contester la légitimité du Président et de sa majorité pour appeler la « rue » à l’insurrection sociale et politique. « La conquête de l’hégémonie politique a un préalable : il faut tout conflictualiser ! » clame-t-il sur les estrades numériques. Le « chaos » est en effet son ordre !
La présidente de la Région Occitanie a refusé de se soumettre à l’accord de dupes imposé par Mélenchon à ce qui reste de « frondeurs » dans son ex-parti – inutile à ce stade de se voiler la face. Son premier vice-président, PRG, Didier Codorniou la suit, qui diffuse sur les réseaux sociaux son appel à combattre cette capitulation historique devant un populisme d’extrême gauche aux accents autoritaires et mensongers. Et dans mon département, l’Aude, celui aussi de Codorniou, les choses, en surface au moins, sont claires – enfin ! façon de parler. Une seule circonscription a été octroyée par Mélenchon au PS ; et c’est la conseillère régionale Sophie Courrière Calmon, au profil pourtant droitier et macroniste, qui, de fait, a été adoubée par LFI avec l’incandescent soutien de sa fédération qui, autrefois, c’est-à-dire hier, soutenait hardiment Manuel Valls. Comme me le disait un proche conseiller de Carole Delga , au détour d’un commentaire sur Facebook : « ça sent le sapin ! »
Voilà qui est dit ! Les socialistes audois sont en accord avec leur direction nationale : soumission politique et programmatique à LFI et à son candidat premier ministre Jean-Luc Mélenchon ; tandis que dans le même journal, le même jour, Carole Delga, la présidente socialiste de leur Région Occitanie réitère son refus de toute alliance avec eux.