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Un clochard céleste.

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Un clochard a élu domicile dans l’entrée de l’ancien magasin Gagnoud. En quelques jours, il l’a transformée en un «confortable» abri  tapissé de cartons, du sol au plafond.

Ses collègues viennent souvent lui rendre visite; des jeunes surtout.

De ma fenêtre, tous les matins, je l’observe. Il est 9 heures. Il sort de son refuge. Saute et s’amuse avec son chien. Comme un enfant ! Pousse du pied les papiers et les mégots qui jonchent «  son » trottoir. Se baisse, en ramasse quelques uns qu’il s’empresse de jeter dans une poubelle voisine. Un moment inattendu d’élégance et de dignité.

La vulgarité n’est pas où habituellement on la croit. 

Souvenir.

Tous les matins du monde, les premiers janvier, se ressemblent. Tristes. Pas un chat dans les rues. Repus, ils dorment. Devant les halles de Narbonne, une petite troupe de clochards. Ils se souhaitent une «  bonne année » en riant du peu de leurs dents. Chaque jour qui passe, j?aperçois une tête nouvelle. Le plus souvent, jeune. Sans être apprêtés ( !) ils sont correctement vêtus. Mais d’où viennent-ils ? Leurs yeux et leurs teints sont ceux de pays froids. L’emplacement que ces errants occupent rassemblait autrefois les espagnols de la ville, qui se préfèrent à présent dans le coeur des halles en la compagnie de marocains ou d’algériens, peut-être. J’ y retrouvais alors mon grand père Antonio, dit « el portillo », pour nous en aller ensuite, main dans la main , chez « Michèle ». Une fille de « Cox », elle aussi. Là il m’achetait un gros beignet safran à l’arôme de fleur d’oranger. Son grand sourire donnait chaud. Le bonheur ! J’ai su plus tard, bien plus tard, ce qu’il cachait de misères?

 

 

 

A vau-voeux.

Est-il donc établi que la conscience soit à gauche et le cynisme à droite ? Qu’au spectacle du monde un soupir attristé suffise à divertir nos âmes ? Qu’aux malheurs des autres un regard désolé nous libère du courage ? Que de grands discours nous dispensent de franches vérités ? Qu’une victoire dans les urnes soit plus belle que des cœurs en détresse? Que le Père Noël soit rouge et le petit Jésus blanc ? Que le béton soit à droite et la pierre à gauche ? Que les blacks soient « trops »… et les harkis « riens » ? Que les mots soient pour Sarko et le sens pour  Ségo ? Que la langue de bois soit goûteuse et la sauce piquante ? Que 2007 ne soit pas 2006 ? Que la vie va trop vite et  le temps pas assez ? Que ma plume s’affole et les signes m’enivrent ? Qu’il suffise d’un espoir pour que se forment des vœux ?

   

Le jour et l’heure.

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En souvenir de Gil Jouanard et de nos longues et passionnantes conversations littéraires :
Dans quelques heures, nous allons ouvrir la 2007ième page du grand livre du temps. Une page déjà écrite et jamais finie. Ni noire ni blanche. Grise, comme un ciel après la pluie, comme ces traces sur nos visages. Tout change et rien ne change. Le temps passe trop vite, on en manque. Il peut peser aussi et on en souffre. On court toujours après et on le fuit tout autant. On a bien du mal à le suivre. Le temps passe et nous restons. Confiants et sans voix. Joyeux et désarmés. La chose étant assurée, le plus juste est de s’en moquer.

L’esprit des lieux.

Un ami a eu la gentillesse de m’adresser, samedi dernier, la copie d’un article de l’Indépendant de juillet 1994 rappelant la création, en 1932 , à Narbonne du « centro espagnol ». L’article est illustré par une  photo des membres fondateurs posant devant le chantier de cette « maison ».

Mon grand père n’y est pas! Et plus personne autour de moi pour me parler de ce moment de la vie de ce que l’on appelerait aujourd’hui " la communauté espagnole " ! Peut-être ce Belmonte ? J’ai en effet connu, enfant, une Danièle Belmonte dont la maman était originaire de Cox. Un village entre Alicante et Murcia d’où mon grand père est parti dans les années 20 .Je crois! Et , coïncidence extraordinaire, je venais de lire ,dans le Midi Libre du vendredi, un article relatant l’occupation de ce qui fut un cinéma, le Vox, par des S.D.F et des dealers. Cinéma qui prit (quand ?) la suite de ce même « centro espagnol ».

Comment interpréter,  à 74 ans de distance, ce télescopage des images produit par l’imprévisible succession d’un courrier amical de Robert et d’un  malheureux «  fait divers » rapporté par le Midi Libre ? D’un côté, des déracinés, certes, mais au port altier, fiers et en costumes cravates. De l’autre, des paumés venus de je ne sais où, aux corps et à  l’esprit ravagés par l’alcool et la drogue.

Ce site serait-il habité par des fantômes ? Désormais, je ne regarderai plus de la même manière ce qui reste de ce cinéma promit à la démolition.Une résidence de standing va bientôt  le remplacer. En gardera-t-elle ses spectres?

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