Pauvre pensée d’Europe.

La situation de crise que vit l’Europe est dans l’esprit des Français pendant que les chefs d’Etat de l’Union sont réunis aujourd’hui pour s’accorder sur une réponse institutionnelle et financière commune à la méfiance accrue des marchés quant à la capacité de certains pays à honorer leurs dettes. C’est dans ce contexte que le seul parti de gouvernement capable de proposer une offre politique de substitution sort un projet préfigurant son programme pour la prochaine présidentielle. Que dit-il ? En voici une courte analyse de Grunberg dans Telos : « Ce texte nous dit deux choses contradictoires. D’une part, il appelle à relancer l’action de l’Union européenne (ce qui est juste et nécessaire) et à instaurer un gouvernement économique (ce qui est, au moins dans la direction, une idée importante). Mais d’autre part, tout en reconnaissant que les gouvernements européens et les pouvoirs européens sont de plus en plus orientés à droite, il propose des mesures, qu’il s’agisse de la BCE, de la politique industrielle, de la gestion des finances publiques, des politiques concernant les entreprises et la concurrence, que nos partenaires les plus puissants, tels l’Allemagne, rejetteront à l’évidence. Ce volontarisme européen, comme il se définit lui-même, est-il alors de quelque utilité ?

La politique européenne avance par compromis : comment nous situer face à l’Allemagne, quels compromis tenter d’obtenir d’elle ? Ces questions ne sont pas posées. S’agit-il vraiment dans ces conditions d’une politique de relance de la construction européenne ? Une fois encore, les socialistes entendent imposer à l’Europe leur propre modèle de l’Europe. Pourquoi cette énième tentative aurait-t-elle plus de succès que les précédentes ? »

On imagine la tête de DSK lisant ce texte. Qui l’amènerait, s’il était candidat et choisit lors de primaires, comme Ségolène en son temps sur d’autres sujets, à le mettre au placard…

Le syndrome de l’Elysée.

 

 

 

 

En 1965, presque personne n’a voulu se présenter à l’élection présidentielle. Ni Mendés France, ni Pinay. C’était il est vrai la première. Aujourd’hui, c’est plutôt la bousculade. A gauche, DSK hésite, Royal dit ne pas être candidate en l’état , Fabius encore moins , Valls piaffe d’impatience, Collomb pointe son nez, Martine avance masquée et Hollande s’est déclaré. Quant à Mélenchon, Joly et d’autres encore, ils font tout, ou semblant, pour en être.

Le capital érotique de Catherine Akim.

 
   

 

LLafranc, dimanche 26 avril. Assis à la terrasse du LLevant, une de mes « querencias » de ce petit coin de la « Costa brava » encore protégé, je lis l’édition dominicale de « la Vanguardia » et m’arrête, alléché par son titre, sur la chronique de Luis Racionero : « Las eroticas capitalistas ». Il y présente une étude de la sociologue britannique Catherine Hakim selon laquelle le capital érotique serait le 4e pilier d’une personnalité moderne, en sus du capital économique, du capital culturel et du capital social. Un capital érotique qui ne concernerait pas que les  «  choses » du sexe ou le mariage. Dans nos sociétés modernes  où la culture est hyper sexualisée, nous est-il, en effet, précisé, le capital érotique prend de plus en plus de valeur sur le marché du travail, au sein des médias, de la politique, de la communication et de la publicité. Et les femmes seraient mieux dotées que les hommes ! Question de Luis : pourquoi ? parce que (je le traduis) « Dans la loi de l’offre et de la demande de coït, l’injuste nature a truqué la balance de sorte que la demande du mâle sera très supérieure à l’offre de la femelle et, comme tout le monde le sait, le prix monte et celui qui met le prix et le perçoit, c’est la femme. » Mais comme elles vivent dans des sociétés patriarcales, elles seraient tentées de ne pas se servir de cet «  avantage comparatif », les hommes « s’efforçant de construire des idéologies morales pour empêcher les femmes d’exploiter leur capital érotique et d’en tirer des bénéfices économiques et sociaux ». Et l’auteur(e) de se lamenter que les féministes ne soient pas capables de libérer les femmes de la perspective patriarcale. Certes, mais il est de nombreuses femmes qui plutôt que de suivre les méthodes radicales des féministes, préfèrent continuer d’exploiter leur capital érotique avec ou sans patriarcat, conclue L. Racionero.

Ce que je n’ai pas manqué de constater à la table voisine…

 

 

« Nous n’avons pas besoin d’en promettre tant et plus »

 

 

 

Sur les retraites, « nous avons nos réponses » prêtes, a assuré Martine Aubry, l’ancienne ministre des Affaires sociales. Ouf ! Nous voilà rassurés. Mais : « … ce n’est pas nous qui sommes au gouvernement et nous ne souhaitons pas faire des propositions pour que le gouvernement en picore une ou deux, celles qui l’arrangent, et dont on sait qu’elles ne régleront pas le problème » Ciel ! On attendait des propositions sérieuses et c’est une mesquine esquive qu’on nous délivre. En se cachant derrière un calendrier, qui ne serait pas le même que celui de Fillon. Comme à l’école, ces « premières de la classe » qui se planquent derrière leur cahier de texte. A l’inverse d’un François Hollande, bien dans sa tête et sur de sa valeur, qui lui nous tient un discours de vérité (voir aussi son commentaire dans « Fugues et fougue ». Tout simplement responsable. Notamment sur les retraites : «  il n’existe pas des recettes miracles qui nous dispenseraient d’un effort contributif et productif pour préserver le niveau des pensions. Il faut avoir conscience d’une chose : avec le niveau actuel du déficit public – plus de 8 % du PIB – les prélèvements que nous lèverons là, nous ne les mettrons pas ailleurs ! C’est pourquoi l’avenir des retraites ne peut se résoudre uniquement par l’impôt. » Des propos dignes d’un homme d’Etat, quoiqu’on puisse penser par ailleurs de ses engagements idéologiques : «  Nous hériterons en 2012 d’une situation comme jamais la gauche n’en a connue : faible croissance, endettement record et compétitivité dégradée. C’est un quinquennat de redressement qu’il nous faut préparer. » Une autre musique que celle d’une candidate-virtuelle à l’élection présidentielle nouvellement acquise à la « société du care » et qui a reçu récemment de Jean Michel Apathie le prix de la « nunucherie avec palmes ». 

De l’art de la dispute.

     

Toujours d’actualité notre cher Montesquieu! Sa 36 ième lettre, notamment…:

 

 » Usbek à Rhédi, à Venise.

Le café est très en usage à Paris : il y a un grand nombre de maisons publiques où on le distribue. Dans quelques-unes de ces maisons, on dit des nouvelles ; dans d’autres, on joue aux échecs. Il y en a une où l’on apprête le café de telle manière qu’il donne de l’esprit à ceux qui en prennent : au moins, de tous ceux qui en sortent, il n’y a personne qui ne croie qu’il en a quatre fois plus que lorsqu’il y est entré.

Mais ce qui me choque de ces beaux esprits, c’est qu’ils ne se rendent pas utiles à leur patrie,  et qu’ils amusent leurs talents à des choses puériles. Par exemple, lorsque j’arrivai à Paris, je les trouvai échauffés sur une dispute la plus mince qu’il se puisse imaginer : il s’agissait de la réputation d’un vieux poète grec dont, depuis deux mille ans, on ignore la patrie, aussi bien que le temps de sa mort. Les deux partis avouaient que c’était un poète excellent ; il n’était question que du plus ou du moins de mérite qu’il fallait lui attribuer. Chacun en voulait donner le taux ; mais, parmi ces distributeurs de réputation, les uns faisaient meilleur poids que les autres. Voilà la querelle ! Elle était bien vive : car on se disait cordialement, de part et d’autre, des injures si grossières, on faisait des plaisanteries si amères, que je n’admirais pas moins la manière de disputer, que le sujet de la dispute. « Si quelqu’un, disais-je en moi-même, était assez étourdi pour aller devant un de ces défenseurs du poète grec attaquer la réputation de quelque honnête citoyen, il ne serait pas mal relevé, et je crois que ce zèle, si délicat sur la réputation des morts, s’embraserait bien pour défendre celle des vivants ! Mais, quoi qu’il en soit, ajoutais-je, Dieu me garde de m’attirer jamais l’inimitié des censeurs de ce poète, que le séjour de deux mille ans dans le tombeau n’a pu garantir d’une haine si implacable ! Ils frappent à présent des coups en l’air. Mais que serait-ce si leur fureur était animée par la présence d’un ennemi ? »

Ceux dont je te viens de parler disputent en langue vulgaire, et il faut les distinguer d’une autre sorte de disputeurs, qui se servent d’une langue barbare qui semble ajouter quelque chose à la fureur et à l’opiniâtreté des combattants. Il y a des quartiers où l’on voit comme une mêlée noire  et épaisse de ces sortes de gens ; ils se nourrissent de distinctions ; ils vivent de raisonnements et de fausses conséquences. Ce métier, où l’on devrait mourir de faim, ne laisse pas de rendre : on a vu une nation entière, chassée de son pays, traverser les mers pour s’établir en France, n’emportant avec elle, pour parer aux nécessités de la vie, qu’un redoutable talent pour la dispute.

Adieu.

De Paris, le dernier de la lune de Zilhagé 1713. »

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