Chronique de Narbonne, et d’ailleurs. Petit hommage en la mémoire de Pierre Dumayet…

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Pierre Dumayet est mort un jeudi, le 17 novembre 2011. Il y a 4 ans. Il avait 88 ans. Avec  sa femme Françoise, ils vivaient pendant les longs mois du printemps et de l’été dans une maison dominant l’étang de Bages. Cet homme, à l’époque où la télévision se réduisait à une seule chaîne, a « produit »  de grandes émissions qui ont marqué durablement les hommes et les femmes de ma génération: « Cinq colonnes à la Une », « Lecture pour tous »… C’était aussi un écrivain. « Un écrivain du soleil, de la sieste railleuse et de l’apéritif rieur… », comme l’écrit joliment Serge Bonnery.

Chronique de Narbonne l’été. Lire « Le premier de la classe » de Benjamin Crémieux: une enfance narbonnaise…

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Longtemps j’ai écouté, tous les samedis matins, sur France Culture, loin de Narbonne, la ville natale de son père et la mienne, Francis Crémieux et son émission le Monde contemporain, animée conjointement avec Jean de Beer. Deux talents, deux personnalités aux fortes convictions ; deux voix politiquement très opposées et cependant profondément respectueuses l’une de l’autre. Journaliste communiste écarté de l’antenne en novembre 1948 en raison de sa participation à une manifestation devant les studios de la Radiodiffusion française, Francis Crémieux n’est réintégré dans son poste de rédacteur en chef qu’en 1981. Jean de Beer, lui , était gaulliste et chrétien. Ancien secrétaire général du Pen Club français, il est l’auteur de plusieurs essais tel le Tombeau de Jean Giraudoux (1952), une étude sur Montherlant ou l’Homme encombré de Dieu (Grand prix de la critique 1963) et l’Aventure chrétienne, en 1981, sur les débuts du christianisme.

Tous deux ont disparu, mais j’ai encore présente à l’esprit, non la teneur de leurs échanges, bien évidemment, mais la vivacité de ton avec laquelle ils défendaient leurs arguments et  convictions.

Si on se trouve devant une obligation de grandeur, on biaise, on l’évite, on s’écarte …

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Avec des petits trucs pour vivre et des petits trucs pour gagner sa vie, on va au jour le jour. Si on se trouve devant une obligation de grandeur, on biaise, on l’évite, on s’écarte par la tangente. Si on souffre trop, on fait un discours, ou on écoute un discours; car on est peut-être capable d’inventer le truc du téléphone, de la T.S.F. et de l’avion, mais on n’est pas capable de trouver des raisons individuelles de grandeur.

In L’Oiseau bagué. Gallimard/Folio, 1943, p.170.

 

Chronique de Narbonne et d’ailleurs dans le monde. Demander la lune, avec Pierre Sansot et Julie Ganzin

Ce matin, petite investigation sur ce rayon-là de ma bibliothèque:

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En tire ceci:

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L’ouvre au hasard, et lis ce texte de Pierre Sansot:

 

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Ces images de cet univers des jardins ouvriers sont de Julie Ganzin. Elles nous montrent que le plus triste et le plus prévisible ne sont pas toujours sûrs, qu’il existe en certains hommes ordinaires la capacité d’inventer autre chose, de réordonner à partir de peu ( ce sont , en effet, des « gens de peu » ). Et me revient l’image de Pierre Sansot, sur la plage des Chalets, l’été, à Gruissan, sur le coup des 18 heures. Il y faisait l’aller-retour. Sa queue de cheval battant le haut de son dos. Il portait  à la main gauche un sac en plastique d’un bleu indéfini. Ses chaussures, à l’intérieur, peut-être! Son caleçon de bain et son tricot n’étaient pas non plus de la première fraîcheur. Il marchait, indifférent aux regards…

Il tirait parti, lui aussi, de ce qu’il avait sous la main.