
« Les métamorphoses » de Pierre Moussaoui au cloître de la cathédrale Saint-Just et Saint-Pasteur de Narbonne.

Ve 9.5.2025
Dans une des arches de la façade Ouest du cloître de la cathédrale Saint Just et Saint Pasteur que je traversais pour rejoindre le jardin de l’archevêché, je suis tombé par hasard sur ce texte et cette toile de Pierre Moussaoui. Huit autres présentent ses papiers-vitraux tout aussi vibrants et lumineux. Un ensemble parfait d’intelligence et de sensibilité dans un cadre propice à la méditation – ou la réflexion, comme on voudra.
Peu de temps avant, une de mes connaissances rencontrée devant la boutique d’un brocanteur de la rue Droite, m’informait qu’on lui avait diagnostiqué un cancer au poumon. Il a 74 ans et s’interroge sur la poursuite ou pas de son traitement. Lucide, cet amateur d’art que je connais peu finalement m’a surpris par la fraîcheur de son regard et celle de ses mots. Il m’a paru être déjà dans un ailleurs temporel – J’allais écrire spirituel.
Autour de moi, de nombreux touristes déambulaient. Ils prenaient des photos…
« L’âne-chimiste vigneron
Cette nuit, tandis que je mal-rêvais des bruits du monde, mon âne m’a dit :
« SILENCE !!! Je n’entends pas le vin se faire !
Je m’assis alors dans une somme de deux demi-sommeil, songeant bien qu’il avait son grain à apporter à la tempête. Je l’imaginais de sel ou à moudre mais, il fut de raisin… :
« Ici, les vignes ne sont pas vierges. Pourtant, elles perdent leurs eaux rouges une fois l’an. Cette juteuse abondance récoltée ira à cave, à cuve et, à caveau.
De la crypte monumentale elle reconnaîtra un temps le monde du dessous dont le serment du sarment racinaire avait puisé son jus. C’est un jus tiré du dessous, sous-tiré de l’humus.
Le flaconneur ensuite aura à cœur de délier la lie de son lit liquide du dessus, afin d’ôter le trouble qui s’y cache.
L’écarlate, de retour à la lumière y sera fière et forte, l’âme aura pris corps.
Vent d’anges est vengeance de la vigne non-vierge. Auster fils d’Eole est le témoin de la veine d’eau faite veine de sang.
Ainsi les grappes font jus qui fermement fermente et fait vin !
Et puis, il y a la lie de la lie : le marc. Il est à Marthe ce que le dragon est au feu.
Chaque automne, le solide et sain marc cherche sa place entre esprit et matière.
Sombre et sèche mélancolie faite de la peau et de la graine pressées par la vis sans fin, ce solide-là sera le vaisseau de l’eau d’esprit. L’écrasement fera renversement où la dure mélasse noire passera l’hiver entassée et recroquevillée avant de naître feu et humide au printemps suivant : eau de vie !
La cave est la cathédrale-université de cette alchimie là, celle où se transforme le corps charnu du grain en corps spirituel de l’eau de feu, celle où tout va de travers à moitié plein ET à moitié vide ! »
Un peu enivré par tant de mots nocturnes de l’âne-chimiste, je pensais alors que la cave est une remise à l’Oeuvre à chaque soir de Perséphone puis, je me rendormis, sur ses deux oreilles, à lui…
Au réveil, bien avant l’aube, je me souviens très bien de cette femme en robe rouge kermès, qui, dans mon rêve d’après était venue me visiter… »
Pierre Moussaoui
nov. 2020
Illustration : Pierre Moussaoui « Les métamorphoses ». On peut voir l’ensemble de ses papiers-vitraux, du 29 avril au 25 mai au cloître de la cathédrale de Saint-Just et Saint-Pasteur de Narbonne
Mots-clefs : Cloître de la cathédrale de Saint-Just et Saint-Pasteur de Narbonne, Pierre Moussaoui
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