Contre-Regards

par Michel SANTO

Narbonne joue  » petits bras « .

 

 

Narbonne est une petite ville qui se veut grande. Grande elle le fut ; son passé en témoigne. De sa romanité, d’augustes « pierres » le confirment. Et de sa gloire sportive, de poussiéreuses archives aussi. Classe et rigueur, à défaut d’avenir, devraient chez nos « puissants » en garantir au moins l’histoire. Hier pourtant, se défaussait sur ses collaborateurs un directeur d’office HLM, imité peu après par l’édile municipal (1) chargé du « nettoiement de la Ville ». Si la ville est sale, en effet, c’est aux narbonnais qu’on le doit nous dit-il. Pour preuve ! le doublement des effectifs et un budget monté à 1 ,3 millions d’euros. A se demander comment, sous l’ancien pouvoir, elle pouvait être propre sans tous ces moyens. Narbonne se voudrait grande, mais elle joue « petits bras ».  

(1) Midi Libre du 16 Novembre.

 

 

 

Intouchables!Un film qui fait du bien.

 

Je vais rarement au cinéma. La seule idée de devoir prendre ma voiture pour me retrouver dans un CGR situé dans une zone industrielle m’en dissuade souvent. Et puis, autant l’avouer, je préfère le plaisir égoïste de la lecture. Mais je ne sais pour quelles raisons, la pression de mes proches sans doute, j’ai fini par aller voir « Intouchables », ce film au succès « fou » et aux caractéristiques apparentes qui me tiennent en général à distance critique des grands comme des petits écrans.Eh bien, autant le dire tout de suite, ce film m’a ému par sa profonde sensibilité, sa grande humanité. Et la réflexion d’une amie croisée à  la sortie : «  Il vaut mieux être riche quand on est handicapé » n’a pas réussi à éteindre en moi ce premier sentiment. Certes j’aurais pu jouer le cuistre bien-pensant en digressant sur le registre Intouchables-Touchés par l’amour, la reconnaissance, le respect… Ou par le classique film métaphore de la société française opposant la vieille France bourgeoise, blanche et paralysée à celle de demain, jeune, banlieusarde et sans complexe. A la manière d’un Pascal Riché qui nous sort par exemple ceci : « En réalité, si ce film plaît tant, c’est parce qu’il présente une histoire aussi éloignée que possible de notre réalité concrète. Elle se passe dans un univers parallèle : un monde qui n’existe pas. (…) Il y a certes une crise, qui ressemble à la nôtre, mais elle est simplifiée, caricaturée, sublimée. Il y a certes des classes (avec des très-très riches et des très-très pauvres), mais ne cherchez pas de lutte les confrontant. » Ou encore « C’est une France à l’image de Philippe, le tétraplégique du film : immobile, impuissante, vieillissante. Et accrochée au rêve improbable qu’un jour, quelqu’un ou quelque chose viendra sans brutalité la réveiller. » Des bêtises, pour ne pas dire plus, qui n’auront pas réussies à gâcher mon plaisir. Celui de goûter une histoire simple qui nous raconte comment par le soin et l’attention portée à l’autre, le dialogue, la patience et le respect, deux être que tout oppose trouvent le chemin de l’amitié et de l’amour. Un film qui touche le cœur sans passer par la case cerveau…Un film qui fait du bien !

 

Quelle rigueur, en effet ?

 

 

En faisant ma revue de presse, je  » tombe  » sur l’édito de Jean Pierre Denis :  » Quelle rigueur « . Il reprend le thème de mon dernier billet en insistant sur la manipulation des consciences par l’utilisation de la bonne vieille théorie du bouc émissaire ou de la main invisible. A lire d’urgence pour sortir de l’état d’hébétude dans lequel nous plongent les  » médiapolits  » ( contraction de médias et politiques, évidemment ). La bonne nouvelle quand même est que quelques uns d’entre eux restent soucieux de vérité et, osons le mot, de morale publique.

 

Extrait:  » Ce n’est pas seulement pour faire plaisir aux agences de notation qu’il faut entreprendre un effort de redressement collectif. C’est aussi et surtout pour éviter de laisser à nos enfants le poids cumulé de trop de lâchetés gouvernementales bien partagées, hélas, par l’opinion publique et par les partis de tout bord. De la même manière, il est un peu court, voire manipulateur, de dire que ce sont les agences de notation, les institutions européennes ou l’euro qui nous imposent la rigueur. Celle-ci devient inéluctable parce que nous ne pouvons plus nous payer notre mode de vie. Tout simplement. « 

L’ appel à la raison des marchés et des politiques aussi.

 

 

 

 

Toujours la même rengaine sur les ondes, la télé, les journaux : « Il n’y pas de crise de la dette publique en Europe, et s’il y a une crise c’est de la faute des marchés et des agences de notation. » Dernier raffinement, si on peut dire, entendu ce matin sur France Culture, celui d’un économiste (il est interdit de sourire) de l’O.F.C.E : «  Il n’y a qu’à (notez le YAQUA !) dire que l’Europe garantit l’ensemble des déficits de la zone Euro » En oubliant de préciser que cela suppose une réforme des traités et que les Allemands, de la CDU au SPD, y sont opposés. Du grand n’importe quoi !

Mais arrêtons-nous quelques instants sur ces marchés présentés comme la source de tous nos problèmes. Que représentent-ils en effet sinon des circuits de collecte du fruit du travail de millions de travailleurs qui comptent sur cette épargne pour améliorer leur retraite ou faire face aux difficultés de la vie. Voudrait-t-on nous dire qu’ils devraient accepter d’y renoncer, par la relance de l’inflation et des prélèvements confiscatoires sur leurs assurances vie, notamment, que nos dirigeants politiques irresponsables ne s’y prendraient pas autrement ?

Qui ne voit pourtant que cette crise de la dette est aussi une crise de notre démocratie. Une démocratie qui se moque comme d’une guigne de la gestion de nos finances publiques. Une démocratie et des citoyens toujours prêts à se jeter dans les bras de marchands de promesses qui depuis trop longtemps dressent des montagnes de dettes.

Mais ce temps est fini. Tant mieux ! Le moment est enfin venu de demander des comptes aux sortants comme aux candidats supposés différents. Nous avons besoin de responsables politiques modernes. De ceux qui osent dire la vérité des faits, de ceux pour qui la politique ne se résume pas au bluff permanent.

Si les marchés doivent être rappelés à la raison, les politiques aussi !

Petit hommage à Jean Claude Pirotte.


Deux pleines pages du supplément«Livres et Idées» de La Croix – du jeudi, vendredi 10 et 11 novembre 2011 – sont consacrées, si j’ose dire, à Jean Claude Pirotte. C’est Antoine Perraud qui les signe. Deux pages émouvantes où se mêlent admiration et empathie. Admiration du prosateur et du poète au chant si simple et si sincère. Empathie pour un homme qui n’en finit pas de guérir d’un terrible cancer.