La question qui, aujourd’hui, est posée dans le débat public, n’est pas celle, démagogique, de la suppression* de l’ENA, mais celle du mode de recrutement de l’élite administrative et de sa formation ; de son organisation en « corps » ensuite et, de manière plus générale, du déroulement des carrières de ceux qui en sortent…
Ambroise ROUX (1920-1999), PDG de la Compagnie Générale d’Electricité (photo Guy Le Querrec/Magnum Photos, s.d.)
Je reprends ici, in extenso, avec son autorisation, l’article publié par mon ami Alexandre Moatti dans son blog : « Les zélites en France, histoire(s) » (dont je conseille vivement la lecture) :
L’AFEP (Association française des entreprises privées) étant sous les feux de l’actualité (on parle d’un code de gouvernement des entreprises, créé en 1995, réactualisé récemment — dont j’ignorais comme beaucoup sans doute l’existence ; des universitaires ont écrit une tribune dans Le Monde du 20 février 2018 à ce propos, notamment sur la rémunération des patrons), je me décide à accélérer ce billet que je voulais faire sur l’AFEP de longue date. La page Wikipédia de l’AFEP étant très lisse, ou lissée, quelques compléments sont nécessaires.
Une info qui m’avait échappé, que je dois à la vigilance de mon ami Alexandre Moatti : la France et le Koweit réservent une enveloppe globale de 450 millions d’euros, destinée à la création d’un fonds d’investissement spécifique pour les jeunes entreprises technologiques. La répartition de cette enveloppe se découpe de la manière suivante : les institutions financières koweitiennes désignées (lesquelles?) investiront la somme de 300 millions d’euros quand Bpifrance injectera «seulement» 150 millions d’euros.
Alexandre Moatti est le directeur de la publicationscience.gouv.fret l’éditeur du sitebibnum. Il est aussi un ami qui , récemment, me disait préférer Cyril Northcote Parkinsonà Auguste Detoeuf . Un Detoeuf et son célèbre « Propos de O.L.Barenton, confiseur » (Éditions du Tambourinaire, Paris, 1951), qui m’avait été offert par un de ses collègues ingénieurs en chef des Mines, quand j’exerçais au Ministère de l’Industrie . Un recueil de maximes sur la vie des affaires qui a connu un succès comparable à celui du célébrissime Parkinson. Dutœuf était, précision utile, un ingénieur polytechnicien qui sur le tard de sa vie a entrepris de philosopher avec humour sur son expérience des affaires.
Pour vous donner une idée du personnage, voici quelques unes de ses « pensées : « Il n’y a de bonne politique que celle du juste milieu. Le difficile n’est que de savoir où il est. p.32 . De quelque façon et par quelque moyen qu’on décompose une collectivité en groupes (choix, ancienneté, examens, concours, tirage au sort), dans les divers groupes, la proportion des imbéciles est la même. p.137 . Beaucoup de médiocres réussissent. La médiocrité rassure… Et d’autres sur ce site : au fil de mes lectures .
Sur le conseil d’Alexandre, je suis donc allé voir ce qu’en ditClaude Riveline de Parkinson ! ( texte intégral dans le fichier joint , que je vous laisse découvrir) . Un Parkinson plus proche de Rabelais et de Courteline , lui aussi , que le même Riveline fait pourtant lire depuis toujours à ses élèves de l’École des mines, fonctionnaires du Corps des mines et ingénieurs civils, dans le cadre de ses enseignements de gestion. C’est dire le sérieux avec lequel Riveline prend ces deux auteurs ! Comme cette loi de Parkinson en témoigne, pour lui donner raison :
« Tout responsable dans une entreprise a le sentiment d’être débordé et ne cesse de réclamer une aide pour le décharger d’une partie de son travail. » de sorte que : « tout responsable souhaite multiplier ses subordonnés et non ses rivaux, il préfère qu’on lui adjoigne un subordonné ce qui lui conférera autorité et prestige plutôt qu’un égal qui peut se transformer en rival. »
Si, de surcroît, on considère que: «Tout travail tend à se dilater pour remplir tout le temps disponible », il advient que tout responsable est de nouveau « surmené » et réclame un subordonné supplémentaire; et , par répercussion en cascade de ces deux lois , Parkinson conclut à la pléthore des effectifs ( qui croissent par multiplication spontanée ) ainsi qu’à leur inefficacité ( puisque le travail nécessite plus de temps et plus de personnes ).
Il suffit d’observer l’évolution des effectifs des fonctionnaires dans l’ensemble de nos fonctions publiques pour constater les profondes vérités des lois de cet honorable et facétieux Cyril Northcote…
Avant de vous plonger dans le texte de Claude Riveline, une dernière maxime d’ Auguste Detoeuf : «Réfléchir. – Attendre quelques jours avant de ne pas changer d’avis. »
Cet extrait du dernier livre de Michel Maffesoli porté à ma connaissance par l’ami Alexandre Moatti. Le champion de l’intertextualité, Joseph Macé-Scaron – c’est ainsi que le plagiat est par lui nommé – en prend pour son grade .