« 16 janvier 1943. Je me penche jusqu’à six fois par jour sur la radio, avec cette enfantine illusion que l’excès de mon attention va pouvoir faire avancer les événements. C’est ainsi que Valery, les première fois qu’il voyageait un chemin de fer, poussait de toutes ses forces la paroi d’avant du wagon, pensant par cet effort, me racontait-il concourir à celui de la locomotive et accélérer la marche du train. »
André Gide. Journal. Une anthologie. Folio. Page 421
*C’est une habitude matinale ! Après un premier café, je prends au hasard un livre dans ma bibliothèque ou sur mon bureau, ou ailleurs, et lis une page prise, elle aussi, au hasard…
Charles Juliet parle peu. Son écriture est serrée, dense. Son visage porte les traces de son travail. Sur soi. Un travail sans fin. Il publie son dernier « journal », présenté hier chez François Busnel. « Accueils » est son titre.
Chaque soir, je lis trois ou quatre pages du journal tenu par une jeune femme juive de 27 ans, Etty Hillesum, de 1941 à 1943, à Amsterdam.Comme l’écritYann Moix, » On dirait de la lumière qui parle « . Qui illumine vos nuits aussi. Comme ce texte lu, hier, pendant que tout autour de moi dormait: » Vendredi soir, 7 heures et demie: Cet après-midi, regardé des estampes japonaises avec Glassner. Frappée d’une évidence soudaine: c’est ainsi que je veux écrire. avec autant d’espace autour de peu de mots. Je hais l’excès de mots. Je voudrais n’écrire que des mots insérés organiquement dans un grand silence, et non des mots qui ne sont là que pour dominer et déchiffrer ce silence… comme cette estampe avec une branche fleurie dans un angle inférieur… Il faut si peu de mots pour dire les quelques grandes choses qui comptent dans la vie… Ainsi les mots ne devraient servir qu’à donner au silence sa forme et ses limites. Chaque mot serait comme une pierre milliaire ou un petit tertre au long de chemin infiniment plats et étendus, de plaines infiniment vastes… » ( pages 121 et 122 dans la collection Points-Seuil ) Et le 3 septembre 1943, quatre jours avant de partir pour Auschwitz, où elle meurt le 30 novembre: » Ce matin une de mes collègues m’a dit faisant allusion aux situations dramatiques qu’on voit ici: » Tout instant de la vie où on manque de courage est un instant perdu . » Bon, je vais chez le coiffeur. » (page 344). Elle avait 27 ans!
Picasso Pablo (dit), Ruiz Picasso Pablo (1881-1973). Paris, musée national Picasso – Paris. MP72. Partager :ImprimerE-mailTweetThreadsJ’aime ça :J’aime chargement… […]