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L’Europe est nue.

 

 

 

 

Que révèlent « les révolutions arabes » ? Une évidence qui bouscule des doctrines et « des opinions européennes » pour qui la défense des intérêts vitaux de l’Europe est et doit être assurée par les Etats-Unis. Alors même que ces pays sont nos voisins immédiats et non les leurs. Et que nos “intérêts vitaux” sont engagés en plusieurs domaines, échanges, sécurité, immigration, non seulement pour des raisons d’échanges commerciaux ou d’énergie mais parce qu’e l’Europe est en face et très proche des rives de l’Afrique du Nord.

Ce choix de la sous- traitance aux Etats –Unis de notre défense stratégique obère les capacités d’action autonome et limite la portée du projet européen d’autant qu’on ne peut pas exclure, à moyen ou à long terme, la réapparition d’une menace. Ce choix traduit aussi évidemment l’absence de volonté de s’affirmer de l’Union européenne et sa détermination d’assurer sa sécurité au sein de l’Alliance atlantique placée sous commandement et tutelle américains. Or les intérêts américains ne peuvent être du même ordre que les intérêts européens. Au Moyen-Orient, par exemple, le centre des préoccupations américaines est aujourd’hui la préservation des ressources énergétiques dont ils disposent en Arabie Saoudite et la sécurité d’Israël. C’est dire si la Lybie, par exemple, n’est pas une priorité pour eux… Alors que pour l’Europe, engagée en Afghanistan, très loin de ses intérêts vitaux, les budgets hypothéqués par ses armées sont très pénalisants. Pas étonnant que, dans ces conditions,  les Etats-Unis, qui n’en sont pas les initiateurs, ne soient pas enthousiastes, dans l’affaire lybienne. Et le désarroi des Européens, hors la France et la Grande-Bretagne, quand ils sont priés de s’occuper d’eux-mêmes en devient pathétique. Dès lors, nus et incapables de gérer une organisation complexe pour s’assurer de l’efficacité de leur intervention en Lybie, les européens  réclament pour la plupart leur tutelle habituelle, l’OTAN. Pour la première fois dans son histoire récente, l’Europe apparaît dans sa vérité : divisée  et sans capacité d’actions communes pour assurer la défense de ses intérêts vitaux. Une très mauvaise nouvelle dans un monde de plus en plus «  menaçant »…


L’anti spectacle kundérien.

 

 

Mes pages:

 

  

Parmi toutes celles lues cette dernière fin de semaine (peu, en vérité!), ce passage d’un article de J.P Enthoven sur Milan Kundera . Un Milan Kundera qui vient d’entrer dans l’illustre Bibliothèque de la Pléiade. Quasi invisible, on le célèbre partout, mais en son absence. Comme on le comprend!

 

« Toujours il sut se défier de la manie moderne, voire sentimentale, de travestir le réel en une vision extatique et idyllique du monde – mais l’Occident, qui l’accueillit bientôt et le fêta, ne l’entendait pas de la sorte : le Grand Spectacle avait besoin d’un romancier dissident, équipé de la panoplie martyrologique qui va avec. Énorme méprise : Aragon préfaça La plaisanterie (se dédouanant ainsi de son vieux stalinisme) et les gazettes transformèrent le deuxième coup de Prague en inaugural coup de pub. Résultat : Kundera eut du succès, mais on décida de le lire comme un auteur politique- ce qu’il n’était guère.

 

 

Pour lui, un romancier n’a pas à être enraciné dans son pays ni dans une idéologie, mais dans des thèmes existentiels qu’il fait varier à l’infini. C’est un anatomiste des passions humaines en pleine possession de sa lucidité critique et sexuelle. D’où le programme kundérien : non au pathétique, au « Bien », au « Mal », à l’illusion lyrique, au tragique et à tous ces trucs qui font vibrer ; oui à la composition, à la fragmentation, à la bifurcation ; oui à l’étude du « décalage » entre ce que l’on croit savoir de soi et ce que l’on est en réalité. Ce faisant, il avait bien l’intention de revenir à la « première mi-temps » de l’histoire du roman (Rabelais, Cervantès…) en l’augmentant de ce que d’autres (Broch, Kafka…) y avaient ajouté en seconde mi-temps. Ses livres, bien sûr, sont fidèles à cette feuille de route : ils grincent, l’émotion y circule moins que l’intelligence, le dérisoire y règne sans partage. Ces machines, bâties comme des partitions où les thèmes s’enlacent et se répondent, sont irrécupérables pour la « dissidence », pour le parti, pour la nation. »

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Un moment!

 

Un vent violent souffle au dessus des toits de Narbonne. Rien d’inhabituel. Il nous vient du Nord, comme d’habitude. Il pousse à grande vitesse vers la mer les eaux menaçantes de nos rivières. Le ciel a retrouvé son bleu lumineux aussi. Un bleu qu’éclairent les amandiers. Finie l’angoisse poisseuse de ces trois derniers jours. Comme si là bas les cerisiers allaient enfin fleurir…

Des mots pour faire enfin silence.

 

  

 

Deux jours sans écrire un mot. Des mots qui sans cesse retournent à leur intrinsèque pauvreté. A leurs limites. Et qui vous laissent muets face à la souffrance de tout un peuple. Un peuple qui vit sur une étroite bande de terre d’un archipel montagneux où tous les jours, tous les jours, tremble la terre et montent les eaux. Un peuple qui sait depuis des millénaires que sa survie dépend de la confiance donnée au groupe, du respect de la discipline collective et d’une solidarité sans faille. Cela, je l’ai compris lors d’un séjour au Japon. Comme j’ai compris leur fascination et leur culte de la floraison des cerisiers. Ce moment éphémère d’une tragique beauté qui manifeste leur profond sentiment d’une extrême vulnérabilité. Son courage et sa dignité ne m’étonnent donc pas. Mais ce qui me révolte, à l’inverse, ce sont les commentaires de nos journalistes qui cherchent, suscitent, provoquent et tordent l’information et les témoignages pour instiller dans nos esprits que la panique occuperait le leur. Le mercantilisme de nos entreprises de presse et la projection de nos propres peurs et faiblesses sur cette immense tragédie humaine faisant, comme d’habitude, cause commune. Je disais ma honte, avant-hier. Aujourd’hui je  n’ai plus de mots pour exprimer tout ce que révèle de futilité, de mesquinerie, de lâcheté et de fanfaronnade mêlés ces pratiques hypocritement compassionnelles. Sans doute, suis-je moi aussi dans l’excès. Mais il fallait que ces mots sortent. Qu’ils sortent pour que je puisse faire enfin silence…

Silence!

 

 

Une catastrophe qui me laisse encore sans voix. Un peuple qui souffre dans la dignité. L’apocalypse nucléaire surgissant comme un cheval fou dans nos salons. Des images de fin du monde. Et des images d’hommes et de femmes aussi affrontant des dictatures. A mains nues. Une aubaine pour des potentats embusqués : ils tuent. Sans scrupules. Cependant qu’en France, on glose sur DSK et les « cantonales ». Dérisoire, pathétiquement dérisoire. Ce matin, un vague sentiment de honte m’envahit. Silence !

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