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« Nous n’avons pas besoin d’en promettre tant et plus »

 

 

 

Sur les retraites, « nous avons nos réponses » prêtes, a assuré Martine Aubry, l’ancienne ministre des Affaires sociales. Ouf ! Nous voilà rassurés. Mais : « … ce n’est pas nous qui sommes au gouvernement et nous ne souhaitons pas faire des propositions pour que le gouvernement en picore une ou deux, celles qui l’arrangent, et dont on sait qu’elles ne régleront pas le problème » Ciel ! On attendait des propositions sérieuses et c’est une mesquine esquive qu’on nous délivre. En se cachant derrière un calendrier, qui ne serait pas le même que celui de Fillon. Comme à l’école, ces « premières de la classe » qui se planquent derrière leur cahier de texte. A l’inverse d’un François Hollande, bien dans sa tête et sur de sa valeur, qui lui nous tient un discours de vérité (voir aussi son commentaire dans « Fugues et fougue ». Tout simplement responsable. Notamment sur les retraites : «  il n’existe pas des recettes miracles qui nous dispenseraient d’un effort contributif et productif pour préserver le niveau des pensions. Il faut avoir conscience d’une chose : avec le niveau actuel du déficit public – plus de 8 % du PIB – les prélèvements que nous lèverons là, nous ne les mettrons pas ailleurs ! C’est pourquoi l’avenir des retraites ne peut se résoudre uniquement par l’impôt. » Des propos dignes d’un homme d’Etat, quoiqu’on puisse penser par ailleurs de ses engagements idéologiques : «  Nous hériterons en 2012 d’une situation comme jamais la gauche n’en a connue : faible croissance, endettement record et compétitivité dégradée. C’est un quinquennat de redressement qu’il nous faut préparer. » Une autre musique que celle d’une candidate-virtuelle à l’élection présidentielle nouvellement acquise à la « société du care » et qui a reçu récemment de Jean Michel Apathie le prix de la « nunucherie avec palmes ». 

La prospérité du vice, de Daniel Cohen.

 

Conclusion de l’excellent résumé-critique d’Alain Sueur ( merci à Alain Argoul! ) de l’excellent livre de Daniel Cohen « La prospérité du vice-une introduction inquiète à l’économie ». Pour ceux qui n’ont pas le temps de lire ce genre d’ouvrage, qui ne connaissent pas son auteur et qui, peut-être, seront inciter à s’y intéresser d’un peu plus près… 

Extrait :

« Après une excellente critique du keynésianisme béat (p.244-46), Daniel Cohen voit le déclin de l’Europe par rapport aux Etats-Unis et au monde qui émerge dans quatre éléments : enseignement et recherche éclatés, dédain de la puissance militaire moteur de l’innovation, sentiment tragique de l’histoire qui incite à s’en retirer alors que les autres gardent l’optimisme des Lumières, incompréhension de l’économie du star-system qui permet seule une rentabilité sur les produits de l’immatériel.

La question du futur va être de passer d’un monde infini à celle d’un univers clos : l’inverse de l’expérience européenne du XVIIIe siècle. « Cet effort n’est ni impossible ni même improbable, mais plus simplement : il n’est pas certain » (p.280). A civilisation mondiale unique, danger d’erreur maximal !

Le lecteur parcourra l’histoire économique de haut, avec des résumés clairs des apports des chercheurs, auxquels il manque surtout Fernand Braudel. Les risques de l’économie sont clairement politiques : le nationalisme, les inégalités, les revendications sociales d’envie, le dédain de la planète, les incapacités à réguler la finance. C’est ce qu’il fallait démontrer et Daniel Cohen l’a fait brillamment. »

De l’art de la dispute.

     

Toujours d’actualité notre cher Montesquieu! Sa 36 ième lettre, notamment…:

 

 » Usbek à Rhédi, à Venise.

Le café est très en usage à Paris : il y a un grand nombre de maisons publiques où on le distribue. Dans quelques-unes de ces maisons, on dit des nouvelles ; dans d’autres, on joue aux échecs. Il y en a une où l’on apprête le café de telle manière qu’il donne de l’esprit à ceux qui en prennent : au moins, de tous ceux qui en sortent, il n’y a personne qui ne croie qu’il en a quatre fois plus que lorsqu’il y est entré.

Mais ce qui me choque de ces beaux esprits, c’est qu’ils ne se rendent pas utiles à leur patrie,  et qu’ils amusent leurs talents à des choses puériles. Par exemple, lorsque j’arrivai à Paris, je les trouvai échauffés sur une dispute la plus mince qu’il se puisse imaginer : il s’agissait de la réputation d’un vieux poète grec dont, depuis deux mille ans, on ignore la patrie, aussi bien que le temps de sa mort. Les deux partis avouaient que c’était un poète excellent ; il n’était question que du plus ou du moins de mérite qu’il fallait lui attribuer. Chacun en voulait donner le taux ; mais, parmi ces distributeurs de réputation, les uns faisaient meilleur poids que les autres. Voilà la querelle ! Elle était bien vive : car on se disait cordialement, de part et d’autre, des injures si grossières, on faisait des plaisanteries si amères, que je n’admirais pas moins la manière de disputer, que le sujet de la dispute. « Si quelqu’un, disais-je en moi-même, était assez étourdi pour aller devant un de ces défenseurs du poète grec attaquer la réputation de quelque honnête citoyen, il ne serait pas mal relevé, et je crois que ce zèle, si délicat sur la réputation des morts, s’embraserait bien pour défendre celle des vivants ! Mais, quoi qu’il en soit, ajoutais-je, Dieu me garde de m’attirer jamais l’inimitié des censeurs de ce poète, que le séjour de deux mille ans dans le tombeau n’a pu garantir d’une haine si implacable ! Ils frappent à présent des coups en l’air. Mais que serait-ce si leur fureur était animée par la présence d’un ennemi ? »

Ceux dont je te viens de parler disputent en langue vulgaire, et il faut les distinguer d’une autre sorte de disputeurs, qui se servent d’une langue barbare qui semble ajouter quelque chose à la fureur et à l’opiniâtreté des combattants. Il y a des quartiers où l’on voit comme une mêlée noire  et épaisse de ces sortes de gens ; ils se nourrissent de distinctions ; ils vivent de raisonnements et de fausses conséquences. Ce métier, où l’on devrait mourir de faim, ne laisse pas de rendre : on a vu une nation entière, chassée de son pays, traverser les mers pour s’établir en France, n’emportant avec elle, pour parer aux nécessités de la vie, qu’un redoutable talent pour la dispute.

Adieu.

De Paris, le dernier de la lune de Zilhagé 1713. »

Les généralistes sont des spécialistes!

 

 

Depuis 2004, les généralistes ont un diplôme de spécialité. Ce sont donc des spécialistes et, comme tels, ils ont droit aux mêmes honoraires que les autres spécialistes. Spécialistes qui, cela va de soi  pour les généralistes mais assurément pas pour les spécialistes, ont les mêmes honoraires que les autres généralistes. Bref ! entre nos généralistes spécialisés en médecine générale et nos spécialistes spécialisés dans une discipline médicale nous sommes priés de ne plus faire de distinguo. Et d’aller consulter le psychiatre du coin de la rue pour stopper une diarrhée chronique et le toubib du quartier pour éradiquer des convulsions névrotiques. On sait que le français est fier de sa langue, qui, soit dit en passant, n’est même plus parlée dans son hexagone, et qu’il tient celle des autres pour barbare. Une fierté qui tenait à la précision et à la subtilité de notre idiome national devenu depuis, hélas, dans des métiers où la vie d’autrui dépend pourtant de l’exactitude de leur vocabulaire, un affreux baragouin. Un de ces jargons pédantesques universellement répandus sur notre planète, et qui, comme le berlingot de Carpentras, est devenu depuis une de nos spécialités..

Mort aux vieux!

 

Bon, nous y voilà ! Devant l’abyme financier des divers régimes de retraites : 10 milliards d’euros cette année et, si rien n’est fait, en 2050, entre 72 et 115 milliards. Et qu’entend-on dans la bouche de nos experts ? Y a pas le feu, réfléchissons jusqu’au consensus ! Quel courage ! Trente ans qu’on entend cette berceuse. Trente ans que toute la classe politico-syndicale possède toute les informations et analyses sur l’avenir de notre régime de retraite par répartition. Trente année de perdue pour le sauver. Trente ans passés à la recherche miraculeuse d’un consensus que notre pays n’a jamais connu dans son histoire à l’exception de celui trouvé le soir d’une finale de la coupe du monde gagnée par nos footballeurs. Alors, si nous refusons toutes les solutions : le recul de l’âge de la retraite, l’augmentation des cotisations, celle de leurs durées, le recours à l’épargne, la diminution des pensions, la taxation de tels ou tels revenus, que reste-il ? Une croissance à la « chinoise » 7% et plus ! Ridicule, même le PCF n’ose l’évoquer. Bref, une défausse irresponsable de « nos compétents » et de ceux qui nous représentent à l’abri, eux, d’un  régime de retraite très spécial  (un député touche, après 5 ans d’activité, la même retraite que le salarié du privé qui a travaillé 40 ans !) et qui, pour l’immense majorité d’entre eux ne seront plus aux manettes en 2050. Une lâcheté collective qui, inconsciemment, semble prête à souhaiter une belle et mortifère série de canicules estivales et d’épidémies hivernales qui, en remplissant les cimetières de nos vieux, remplirait conséquemment nos caisses d’argent frais….

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