Les Barques à travers les films de Jean Eustache (1938 – 1981)

  mes-petites-amoureuses-1  
 

De 1951 à 1957, Jean Eustache habitait Narbonne place Albert Thomas (actuelle place des Quatre-Fontaines). Il se souvient de son adolescence narbonnaise dans un court métrage tourné dans notre ville l’hiver 1965-1966, Le père Noël a les yeux bleus, avec Jean-Pierre Léaud, et dans un film réalisé durant l’été 1974, Mes petites amoureuses avec dans les rôles principaux Martin Loeb et Ingrid Caven.

Découvrir Narbonne, l’été ! Les Barques …

 

liseuse-0535.JPG

Photo Michel Santo

Les Barques de Cité, ce matin. Tout est calme avant le feu du midi. Ombre et fraîcheur… L’espace est désormais ouvert sur la Robine et le cours Mirabeau. Plein champ sur la ville ! Un coup d’oeil suffit pour que s’offrent Bourg et ses Halles. Le Pont des Marchands aussi. L’espace est fluide, élégant ! Un miroir aux lignes fines ; un coeur recréé  . Qui le rend plus léger et le met en beauté. Comme jamais ! J’aime, le matin, ses jeux d’ombre. Le passé s’y mêle. Qui rend ces Barques encore plus belles… Les voix sont restées à peu près pareilles. Quelqu’un vient de passer. Il reste un soupir… 

 

Les martinets ! Il n’est pas d’yeux pour les tenir…

apusapus01.jpg

 

8 heures ! Et ce plaisir toujours renouvelé au spectacle de vols de martinets au nombre infini zébrant ce ciel de juillet . De petits groupes criant foncent droit devant ma terrasse pour  au dernier moment filer à toute allure dans un ciel plein d’arabesques aux formes inouïes. S’y mêlent parfois  le ventre blanc de quelques hirondelles comme affolées, perdues dans ces nuées sans cesse sifflantes . Le clocher de la cathédrale Saint Just disparaît lui aussi sous leurs fraternelles rondes  noires … et comme chaque matin , à la même heure, ils quitteront leurs joyeuses escapades urbaines pour laisser  place au lourd et écrasant silence d’un ciel d’été sur les toits de Narbonne… Il n’est pas d’yeux pour les tenir, en effet, comme le dit magnifiquement René Char :

 

 » Martinet aux ailes trop larges, qui vire et crie sa joie autour de la maison. Tel est le coeur.

Il dessèche le tonnerre. Il sème dans le ciel serein. S’il touche au sol, il se déchire.

Sa repartie est l’hirondelle. Il déteste la familière. Que vaut dentelle de la tour?

Sa pause est au creux le plus sombre. Nul n’est plus à l’étroit que lui.

L’été de la longue clarté, il filera dans les ténèbres, par les persiennes de minuit.

Il n’est pas d’yeux pour le tenir. Il crie, c’est toute sa présence. Un mince fusil va l’abattre. Tel est le coeur. « 

 

René Char : Le Martinet ( Fureur et Mystères ). 

Découvrir Narbonne, l’été ! Ma boulangerie…

 

photo-copie-1.JPG

C’est une boulangerie de quartier comme on en trouvait autrefois. Sa vitrine parle pour elle : on devait y entendre des accents occitans. Ce qui n’est pas le cas d’Adelyne, qui vient de loin… Chez elle, l’accueil est empreint d’attention et de simplicité :  le client n’a pas d’âge, et son statut est son prénom. Comment fait elle ? Chaque matin, je me pose la question tout en admirant – le mot n’est pas trop fort – les pains de Gilou, son mari. Une variété de formes, et des croûtes, à les voir, qu’on entend sous la dent… Ah ces pains ! Les meilleurs de la ville assurément. Les amateurs ne s’y trompent pas : ils viennent d’un peu partout ; et leurs commentaires suffisent à convaincre le client de passage de venir les rejoindre. Hier matin, j’ai choisi un pain à la « peau » couleur de miel : il est fait avec de la farine de blé dur du Lauraguais. Un gâteau ! Tendre et moelleux, d’une cuisson parfaite. Il ne m’en restait plus qu’une petite moitié au terme de mon tour de ville quotidien. Cette boulangerie respire l’amour du  métier et du plaisir à l’offrir en partage. On y entre ainsi comme dans un rituel : avec la certitude d’y trouver, dans la « croûte » choisie, de la bonne oeuvre. En cela, Gilou et Adelyne ont le sens de l’amitié… Si le hasard, un jour, vous emmène du côté de la place de Verdun, à Narbonne, poussez donc la porte de ma petite boulangerie ! 

La Fornaria de la plaça, 42 Rue Francis Marcero 11100 Narbonne

On commet toujours des erreurs d’interprétation.

imgres-copie-53.jpeg

Hier soir, tard, entre veille et sommeil, lu cette note d’ André Blanchard (Entre chien et loup: carnets):

« Quand on commet des erreurs d’interprétation à propos de tel ou tel de mes comportements, comme beaucoup j’en ressens du désagrément. Que traînent des idées fausses sur notre compte, même l’humilité a du mal à ne pas se froisser. Le hic, c’est que ces erreurs proviennent en grande partie de mon fait (la désinvolture, le peu de peine que je prends s’agissant de m’expliquer clairement, mon peu d’empressement pour rectifier quand j’en ai la possibilité, et ce au nom de cet «à quoi bon ?» chéri). On comprend que, confronté à ces opinions erronées, je pique alors des colères épiques, mais après coup, et après moi !  » 

Ces phrases, j’aurais pu les écrire. À l’exception de la dernière cependant . À quoi bon ces colères épiques, en effet. Rien ne peut faire que nous ne soyons à jamais exemptés d’idées fausses : en bien ou en mal ; sur notre compte et celui des autres …