On ne quitte pas Proust ! Sa recherche du temps perdu est la nôtre.

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Page après page, depuis juin dernier, je passe l’essentiel de mon temps de lecture quotidien dans « … la Recherche du temps perdu ». Il ne me reste plus qu’une heure ou deux avant de terminer ce septième et dernier titre de mon édition numérique. Deux plutôt ! car je m’arrête – ou reviens – fréquemment sur un passage surligné. Comme pour retenir le temps d’en finir avec cette œuvre. Ce qui est impossible ! Immense roman-poème, y plonger, c’est en effet n’en jamais ressortir. On ne quitte pas Proust ! Sa recherche du temps perdu est la nôtre. Elle émeut, elle éveille, elle fait sourire. Ses personnages, des plus glorieux aux plus humbles, sont de tous les temps. Comme les « portraits » sociaux et psychologiques qu’en fait le Narrateur, d’une profondeur et d’une finesse admirables.
 

La tache !

   

Ce matin, c’est sur une placette déserte, bien nettoyée et très ensoleillée que j’ai grand ouvert les volets. Seul un petit paquet de papier humide et souillé, grisâtre, gâtait l’ensemble. Une « tache » bien accrochée au sol, qui résistait aux rafales d’un violent vent du « Nord » ; des rafales dont le bruit étouffait tous les autres, du plus proche au plus lointain environnement. Le ciel était aussi d’un beau bleu, sans nuages. Au sud cependant, dense et en grand nombre, ils filaient à toute allure vers la mer. Je jetai un dernier coup d’œil sur cette première image matinale quand mon attention fut attirée sur ma « droite » par deux hommes couverts de la tête aux pieds du même vêtement de travail fluo. Ils poussaient le même conteneur vert sur roulettes et se dirigeaient de l’autre côté de la place, en direction du centre-ville. Une pelle et un balai étaient rangés à l’horizontale sur leurs poubelles mobiles. Ils marchaient « au pas » et semblaient parfaitement synchronisés. Une impression que renforçait leur tenue de service sous l’épaisseur de laquelle était dissimulée leur identité physique. Ils allaient nonchalamment et devisaient comme deux amis, du moins je le pensais, de tout et de rien. La scène prenait alors à mes yeux un caractère quasi cinématographique et je me demandais si ce duo pédestre ne répondait pas, par miracle, à mon désir de voir disparaître dans l’instant cette inesthétique « tâche ». Sans elle, en effet, j’aurais pu rectifier ma première impression pour n’en garder qu’un souvenir heureux, idéal. Je me disais aussi que située sur leur trajectoire, ils ne pouvaient pas la « manquer ». Je me trompais, hélas ! Arrivés à sa hauteur, ils ont poursuivi leur chemin, tandis que la « tache », elle, demeurait et grossissait au rythme de leur éloignement. Quand je ne les vis plus, elle occupait tout l’espace.

     

Au sortir du sommeil tu cherches encore dans ton propre labyrinthe.

 
 
 
 
 
 
 
 
Au sortir du sommeil tu cherches encore dans ton propre labyrinthe.
 
Puis vient le jour
 
Un coin de ciel bleu au travers de la vitre
Une odeur de café
La chaleur d’une tasse sur le bord de tes lèvres
 
Et des pensées qui errent sur les rides du temps…
 
 
 
 
 
 
 

« Dans ce monde inventé par les hommes, seul le chien semble toujours à sa place. »

 
 
 
 
 
 
 
 
Rien ne vaut la lecture de trois, quatre pages du journal d’Éric Chevillard : « L’autofictif repousse du pied un blaireau mort (2019-2020) », pour égayer ma journée. Sous sa plume, le monde est renversé ; et son absurdité comico-tragique recouvre toutes les dimensions du réel… Jubilatoire !
 
« 28 septembre.
Il s’immobilisa, la tête renversée en arrière, la bouche grande ouverte. L’avaleur de sabres avait faim. L’épée de Damoclès finirait bien par tomber.
 
Il y a en effet une vie après la mort. Très active même, celle des nécrophores.
 
Ce plumage m’as-tu-vu, cet œil fixe et méchant, ce bec obtus, cette serre avide, le perroquet n’a pas besoin de répéter ses mots pour imiter l’homme à la perfection.
 
25 septembre
Toujours cette impression d’être suivi. Il accéléra le pas, s’élança brusquement dans le lacis des ruelles, bifurqua une fois, deux fois, s’engouffra dans une taverne dont il sortit par l’arrière-salle, zigzagua longtemps encore dans la ville. Le lendemain, l’office du tourisme lui retirait son habilitation de guide officiel et le licenciait sans préavis.
 
ELLE (perplexe). — Heu… Tu prétends avoir passé trois ans dans l’atelier d’un grand maître japonais de l’origami et que ton pliage représente un cygne ?!
MOI. — Mais oui, et même un cygne écrasé par un tracteur, déchiqueté par la charrue, puis à demi dévoré par le chien du fermier. »

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