Une éducation politique.

 

 

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Mes pages :

 

Un jour, j’ai compris que la lecture de Stendhal ( je pense à « Lucien Leuwen » ) et de Flaubert ( notamment cette « éducation sentimentale » ) étaient plus éclairantes que l’essentiel de l’édition sociologique contemporaine, le style en plus… Cette courte page en témoigne…

  

Flaubert : l’Education sentimentale

  

« C’était une succursale intime de la rue de Poitiers. Il y rencontra le grand M. A., l’illustre B., le profond C., l’éloquent Z., l’immense Y., les vieux ténors du centre gauche, les paladins de la droite, les burgraves du juste− milieu, les éternels bonshommes de la comédie. Il fut stupéfait par leur exécrable langage, leurs petitesses, leurs rancunes, leur mauvaise foi, −− tous ces gens qui avaient voté la Constitution s’évertuant à la démolir ; −− et ils s’agitaient beaucoup, lançaient des manifestes, des pamphlets, des biographies ; celle de Fumichon par Hussonnet fut un chef−d’oeuvre. Nonancourt s’occupait de la propagande dans les campagnes, M. de Grémonville travaillait le clergé, Martinon ralliait de jeunes bourgeois. Chacun, selon ses moyens, s’employa, jusqu’à Cisy lui−même. Pensant maintenant aux choses sérieuses, tout le long de la journée, il faisait des courses en cabriolet, pour le parti.

 

M. Dambreuse, tel qu’un baromètre, en exprimait constamment la dernière variation. On ne parlait pas de  Lamartine sans qu’il citât ce mot d’un homme du peuple :  » Assez de lyre !  » Cavaignac n’était plus, à ses yeux, qu’un traître. Le Président, qu’il avait admiré pendant trois mois, commençait à déchoir dans son estime (ne lui trouvant pas  » l’énergie nécessaire  » ) ; et, comme il lui fallait toujours un sauveur, sa reconnaissance, depuis l’affaire du Conservatoire, appartenait à Changarnier :  » Dieu merci, Changarnier. Espérons que Changarnier… Oh ! rien à craindre tant que Changarnier… « 

 

On exaltait avant tout M. Thiers pour son volume contre le Socialisme, où il s’était montré aussi penseur qu’écrivain. »

Sans honte et sans fierté.

 

 

 

 

Comme Koz, j’ai du mal avec la honte. « Notamment avec la honte d’être français, trop rapidement brandie. Et trop souvent avancée par des gens qui ne se déclarent en revanche jamais « fiers d’être français ».Ou qui le faisant se posent en juges universels d’une République idéalement française adressant quotidiennement des « bulles » acides à la planète entière. Et qui s’étonnent, que d’Algérie, d’Iran, de Lybie, des Amériques et du Luxembourg, en ces temps hystériques, leur soient renvoyés l’image écornée de leurs prétentieuses insolences. Ce qui ne manque pas d’audace de la part de certains d’entre ceux qui pratiquent la torture et d’hypocrisie de tous ceux qui « cassent » du Rom en silence. Dans le silence de capitales européenne bien contentes de se refaire une santé morale sur le dos de la France. Une France qui, pour son bien et le nôtre, devrait s’abaisser à un peu moins d’arrogance pour s’élever à un peu plus de dignité. Sans honte et sans fierté.Enfin !

Les journalistes: une page de Balzac.

Lectures

 

 

 

Dans cette monographie de la presse parisienne, Balzac distingue plusieurs variétés de journalistes-hommes d’Etat. Celle qui suit est « l’Attaché ». Qui, bien entendu, est une oeuvre de pure imagination et ne saurait être confondue avec quelque personnalité qui prétendrait s’y reconnaître.J’ajoute, faut-il le préciser?, qu’il s’agit là d’un  » archétype  » social dont la vêture politique est indifférente à celle utilisée par Balzac dans cette miniature. Le propre du  » génie « , en littérature comme en d’autres domaines, étant de nous  » informer  » sur le caractère universel de certaines de nos pratiques sociales. Entre autres comportements propres à notre espèce…

 

 

…« Dans certains journaux à convictions (voyez plus bas), des gens désintéressés qui vivent, moralement parlant, par un système auquel ils ont voué leur vie, des gens à lunettes vertes,jaunes, bleues ou rouges, et qui meurent avec leurs besicles sur le nez, sont attachés au journal. On dit d’eux : « Il est attaché à tel journal. » Ces gens n’y sont souvent rien, ils en sont quelquefois les conseils, ils en sont souvent l’homme d’action. Aussi sont-ils toujours connus par l’énergie de leurs principes. Dans les journauxde l’Opposition ou radicaux,

ils inventent des coups de Jarnac à porter au pouvoir ; ils sont les chevilles ouvrières des coalitions, ils découvrent les actes arbitraires, ils se portent dans les départements aux élections menacées, ils troublent le sommeil des ministres en les taquinant. On leur doit les questions palpitantes, et les actualités : la réforme électorale, le vote de la garde nationale, des pétitions à la Chambre, etc. Ces gens de coeur sont les tirailleurs, les chasseurs de Vincennes de la presse; ils prennent des positions politiques dans leur parti, jusqu’à ce que, lassés de faire le pied de grue dans leurs positions, ils s’aperçoivent qu’ils sont les dupes d’une idée, des hommes ou des choses, et qu’il n’y a rien d’ingrat comme une idée, une chose et un parti; car un parti, c’est une idée appuyée par les choses. Il y a parmi eux des entêtés qui passent pour des hommes d’un beau caractère, des hommes solides, des hommes sur lesquels on peut compter. Quand, plus tard, on va chercher ces Attachés, on les trouve attachés à leur femme et à leurs enfants, jetés dans un commerce quelconque et tout-à-fait désabusés sur l’avenir du pays. Le parti républicain surveille ses Attachés, il les entretient dans leurs illusions. Un jour, un républicain rencontre son ami sur le boulevard, un ami que son attachement aux doctrines populaires maintenait dans une maigreur d’étique.

— Tu t’es vendu! lui dit-il en le regardant.

— Moi?

— Oui, je te trouve engraissé ! »…

 

Pages 27 et 28 de l’excellente version numérique proposée par les éditions du Boucher

TROISIÈME VARIÉTÉ

 

Le jardin d’Epicure.

 

 

Pour ouvrir cette nouvelle rubrique : « Mes pages », celle-ci, d’Anatole France, extraite du « Jardin d’Epicure », pages  20 et 21 en version numérique :

 

« C’est une grande erreur de croire que les vérités scientifiques diffèrent essentiellement des vérités vulgaires. Elles n’en diffèrent que par l’étendue et la précision. Au point de vue pratique, c’est là une différence considérable. Mais il ne faut pas oublier que l’observation du savant s’arrête à l’apparence et au phénomène, sans jamais pouvoir pénétrer la substance ni rien savoir de la véritable nature des choses. Un œil armé du microscope n’en est pas moins un oeil humain. Il voit plus que les autres yeux, il ne voit pas autrement. Le savant multiplie les rapports de l’homme avec la nature, mais il lui est impossible de modifier en rien le caractère essentiel de ces rapports. Il voit comment se produisent certains phénomènes qui nous échappent, mais il lui est interdit, aussi bien qu’à nous, de rechercher pourquoi ils se produisent. Demander une morale à la science, c’est s’exposer à de cruels mécomptes. On croyait, il y a trois cents ans, que la terre était le centre de la création. Nous savons aujourd’hui qu’elle n’est qu’une goutte figée du soleil. Nous savons quels gaz brûlent à la surface des plus lointaines étoiles. Nous savons que l’univers, dans lequel nous sommes une poussière errante, enfante et dévore dans un perpétuel travail; nous savons qu’il naît sans cesse et qu’il meurt des astres. Mais en quoi notre morale a-t-elle été changée par de si prodigieuses découvertes? centre de la création. Nous savons aujourd’hui qu’elle n’est qu’une goutte figée du soleil. Nous savons quels gaz brûlent à la surface des plus lointaines étoiles. Nous savons que l’univers, dans lequel nous sommes une poussière errante, enfante et dévore dans un perpétuel travail; nous savons qu’il naît sans cesse et qu’il meurt des astres. Mais en quoi notre morale a-t-elle été changée par de si prodigieuses découvertes? Les mères en ont-elles mieux ou moins bien aimé leurs petits enfants? En sentons-nous plus ou moins la beauté des femmes? Le cœur en bat-il autrement dans la poitrine des héros? Non! non! que la terre soit grande ou petite, il n’importe à l’homme. Elle est assez grande pourvu qu’on y souffre, pourvu qu’on y aime. La souffrance et l’amour, voilà les deux sources jumelles de son inépuisable beauté. La souffrance! quelle divine méconnue! Nous lui devons tout ce qu’il y a de bon en nous, tout ce qui donne du prix à la vie; nous lui devons la pitié, nous lui devons le courage, nous lui devons toutes les vertus. La terre n’est qu’un grain de sable dans le désert infini des mondes. Mais, si l’on ne souffre que sur la terre, elle est plus grande que tout le reste du monde. Que dis-je? elle est tout, et le reste n’est rien. Car, ailleurs, il n’y a ni vertu ni génie. »

Les moulins de la République.

Après la sécurité de l’Elysée déjouée par un déséquilibré, c’est au tour du commissariat de Nanterre (Hauts-de-Seine) de voir sa protection remise en question… Hier, au petit matin, un homme, le visage dissimulé sous une cagoule, est parvenu à s’introduire dans l’enceinte policière de Nanterre et a mis  le feu au véhicule ciblé, qui avait servi à transporter de la résine de cannabis, avant de quitter les lieux sans être inquiété. Nous sommes pourtant en plan Vigipirate renforcé ! Il est donc à présent établi que l’on peut s’attaquer à tous les « sanctuaires de la République », ses bâtiments et ses représentants, sans grandes difficultés. Dans l’échelle des valeurs symboliques, de la mise à sac d’une école maternelle par des « gamins des quartiers nord de Marseille » à l’effraction des portes de l’Elysée par un « déséquilibré », en passant par le tabassage d’agents des forces de police par des « jeunes », cet été aura été particulièrement significatif de l’état réel de notre société. Plus aucune « barrière psychologique et morale », ne parlons même pas des « juridiques », n’interdit désormais le passage à l’acte dans l’atteinte à tout ce qui peut incarner l’autorité de l’Etat. Une dissolution des esprits sur un fond d’explications sociologisantes « déresponsabolisantes  ou « diabolisantes » qui nous amène tout droit dans la zone de tous les dangers politiques. Et qui ne peut plus se satisfaire d’une offre politique de l’opposition républicaine, sur cette question « sécuritaire »,  aussi nulle et gesticulatoire que celle exposée par l’ineffable Montebourg, entre autres, ce dimanche . Pour cela, il est évidemment nécessaire qu’elle fasse tomber ses préjugés idéologiques et ses obstacles psychologiques. En aura-t-elle la lucidité et le courage ? Ses seuls intérêts partisans ne peuvent plus lui servir d’alibis pour refuser le passage à l’acte. Dans ce domaine, plus précisément, il en va de celui de l’avenir de notre forme d’Etat républicain et de la « santé mentale » de ses citoyens. Attention à ne pas jouer sur les nerfs des français en 2012 ! Le diable est déjà là , tapi dans toutes les consciences…

 

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