La prospérité du vice, de Daniel Cohen.

 

Conclusion de l’excellent résumé-critique d’Alain Sueur ( merci à Alain Argoul! ) de l’excellent livre de Daniel Cohen « La prospérité du vice-une introduction inquiète à l’économie ». Pour ceux qui n’ont pas le temps de lire ce genre d’ouvrage, qui ne connaissent pas son auteur et qui, peut-être, seront inciter à s’y intéresser d’un peu plus près… 

Extrait :

« Après une excellente critique du keynésianisme béat (p.244-46), Daniel Cohen voit le déclin de l’Europe par rapport aux Etats-Unis et au monde qui émerge dans quatre éléments : enseignement et recherche éclatés, dédain de la puissance militaire moteur de l’innovation, sentiment tragique de l’histoire qui incite à s’en retirer alors que les autres gardent l’optimisme des Lumières, incompréhension de l’économie du star-system qui permet seule une rentabilité sur les produits de l’immatériel.

La question du futur va être de passer d’un monde infini à celle d’un univers clos : l’inverse de l’expérience européenne du XVIIIe siècle. « Cet effort n’est ni impossible ni même improbable, mais plus simplement : il n’est pas certain » (p.280). A civilisation mondiale unique, danger d’erreur maximal !

Le lecteur parcourra l’histoire économique de haut, avec des résumés clairs des apports des chercheurs, auxquels il manque surtout Fernand Braudel. Les risques de l’économie sont clairement politiques : le nationalisme, les inégalités, les revendications sociales d’envie, le dédain de la planète, les incapacités à réguler la finance. C’est ce qu’il fallait démontrer et Daniel Cohen l’a fait brillamment. »

Mort aux vieux!

 

Bon, nous y voilà ! Devant l’abyme financier des divers régimes de retraites : 10 milliards d’euros cette année et, si rien n’est fait, en 2050, entre 72 et 115 milliards. Et qu’entend-on dans la bouche de nos experts ? Y a pas le feu, réfléchissons jusqu’au consensus ! Quel courage ! Trente ans qu’on entend cette berceuse. Trente ans que toute la classe politico-syndicale possède toute les informations et analyses sur l’avenir de notre régime de retraite par répartition. Trente année de perdue pour le sauver. Trente ans passés à la recherche miraculeuse d’un consensus que notre pays n’a jamais connu dans son histoire à l’exception de celui trouvé le soir d’une finale de la coupe du monde gagnée par nos footballeurs. Alors, si nous refusons toutes les solutions : le recul de l’âge de la retraite, l’augmentation des cotisations, celle de leurs durées, le recours à l’épargne, la diminution des pensions, la taxation de tels ou tels revenus, que reste-il ? Une croissance à la « chinoise » 7% et plus ! Ridicule, même le PCF n’ose l’évoquer. Bref, une défausse irresponsable de « nos compétents » et de ceux qui nous représentent à l’abri, eux, d’un  régime de retraite très spécial  (un député touche, après 5 ans d’activité, la même retraite que le salarié du privé qui a travaillé 40 ans !) et qui, pour l’immense majorité d’entre eux ne seront plus aux manettes en 2050. Une lâcheté collective qui, inconsciemment, semble prête à souhaiter une belle et mortifère série de canicules estivales et d’épidémies hivernales qui, en remplissant les cimetières de nos vieux, remplirait conséquemment nos caisses d’argent frais….

Sous les ailes de Bilger et Debray.

 

 

 

 

Je reviens d’un « petit tour » chez Philippe Bilger, avocat général réputé et blogueur de grande qualité. Son indépendance d’esprit et sa plume aussi brillante qu’acérée ne sont plus à louer qu’auprès de ceux qui ne le lisent pas encore, et me permet, l’écrivant, de vous inviter à vous rendre le plus vite possible sur son site « Justice au singulier ». Dans un de ces billets, il se place sous les ailes de Régis Debray, comme je le fais aujourd’hui sous les siennes, et il note : « On lui demande (à R. Debray) quel regard il porte sur la politique d’aujourd’hui et il offre cette fulgurance caustique mais si lucide : « On peut prendre parti pour s’amuser. Mais prendre feu et flamme ? La politique a décroché de l’Histoire. C’est le rendez-vous des médiocres. Ceux qui rêvent d’une voiture avec chauffeur ». C’est dur, c’est vrai, c’est triste. » Et encore ceci : « Le langage de la politique et la politique du langage liés pour le meilleur et pour le pire. Aujourd’hui, pour le pire. La dignité réside en effet aussi bien dans les mots qu’on prononce, le style que dans les comportements, les tactiques et les orientations. Ayant oublié l’imparfait du subjonctif, on s’est condamné à un monde politique imparfait. La décontraction obligatoire a chassé le grave et l’important. »

Dur, très dur ! Mais si juste…

Les voix de l’Europe.




Pascal Lamy, le patron de
l’O.M.C , en spécialiste des négociations internationales et de l’Europe ( il fut le directeur de cabinet de Jacques Delors quand ce dernier présidait la Commission Européenne ), le dit : « Si un Européen prend la parole sur une sujet, puis un autre sur le même sujet, personne n’écoute. Personne n’écoute parce que, soit c’est la même chose et cela devient ennuyeux, soit c’est différent et, en fin de compte, cela n’influencera pas le résultat. Donc, la bonne solution, si je peux me permettre, c’est au moins de s’assurer qu’ils s’expriment au travers d’une seule bouche. Pas d’une seule voix, une seule bouche, sur chacun des sujets à l’ordre du jour. Ce serait un grand progrès ».

Et pourtant, en juin, pas moins de sept Européens participeront au sommet du G20 : Herman Van Rompuy, le tout nouveau président permanent du Conseil européen, dont le poste a été créé en décembre dernier, lors de l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne, José Manuel Barroso, président de la Commission européenne, José Luis Rodriguez Zapatero, le Premier ministre espagnol qui exerce ce semestre la présidence tournante de l’Union européenne et les dirigeants des quatre plus grandes économies européennes: Allemagne, France, Royaume-Uni et Italie.
Comment, dans ces conditions, parler d’une seule voix à travers la même bouche ? Et peut-on sérieusement envisager que ce groupe des  » sept  » aux voix discordantes soit entendu, compris et respecté. En Europe d’abord. Pour l’être ensuite dans le monde…
C’est à ce genre de détail, si je puis dire, que l’on mesure le chemin qui reste à parcourir à notre vieux continent pour se hisser à la hauteur des enjeux économiques et politiques du monde contemporain.
Un monde où les raisons de croire en un avenir meilleur s’affirment désormais sur les rives du pacifique et celles d’en envisager la fin dans les esprits de nos pays européens.

Des pays fatigués et vieillis dont l’arrogance diplomatique ne masque plus le  » désarmement moral  » de leurs peuples. A l’exemple du nôtre, qui n’a de cesse de jouer  » sa révolution  » et qui croit , se faisant, être dans le sens de l’histoire . Et qui l’est, sans doute aucun. Mais orienté vers le passé…