Tous les matins que ce monde fait, je lis la presse quotidienne. En commençant par la " régionale "et son lot habituel de grotesques imbécillités abondamment empaquetées, en cette période de fêtes de Noël, par les pages de pub de la grande distribution. Des chapons et du foie gras, pour fêter la nativité. Et du G. Frèche, pour nous annoncer la lumière (le Midi Libre de ce jour). L’exacte mesure d’un temps où l’appel au dépouillement et l’invitation au respect de la dignité des hommes se confondent avec un désir insatiable de goinfreries et une débauche de mépris envers ses semblables.
Maryse est une amie d’enfance. Elle habite Bruxelles et me fait la gentillesse de compléter ma petite chronique: les objets ne sont pas neutres par l’envoi d’une information trouvée dans le " Canard enchaîné " de la semaine dernière. Information selon laquelle : " A NewYork,moyennant un abonnement annuel de 50 dollars,on peut équiper la poussette de bébé d’une plaque d’immatriculation, portant l’adresse d’un site internet à alerter si on estime que la nounou se comporte mal avec le lardon.La fondatrice du site explique: " les policiers ont un badge, les soignants passent un test anti drogue, les professeurs sont inspectés.Pourquoi une nounou ne serait-elle pas surveillée? et même en cas d’excès de vitesse, photographiée par des radars? "
Et Maryse d’ajouter: " Dans ton cas , tu aurais pu faire un constat. N’est çe pas formidable? "
Eh bien! je me le demande. Dans cette projection de l’avenir que préfigure ces grandes avancées du progrès technologique et l’infantilisation ( des esprits ) généralisée de notre société, je pense plutôt que le pilote et le passager m’auraient tout simplement envoyé aux " urgences ". Et ce au motif d’entraver la libre et légitime circulation de nos jeunes et modernes barbares urbains.
Le constat implique en effet un échange d’arguments à partir d’une situation de fait établie de concert. Elle suppose aussi la reconnaissance , à tout le moins implicite , de la notion de responsabilité individuelle. Vieilleries que tout cela, n’est ce pas ! Place aux jeunes et vive le progrès !Orwell est arrivé…
Sous des apparences bonhommes, mon coiffeur est un observateur avisé de la politique locale. En témoigne son ironique remarque, entre deux coups de ciseaux parfaitement ajustés, au lendemain d’une séance du conseil municipal qui, d’après la presse locale fut passablement agitée. « Ils s’amusent comme des gamins, n’est ce pas ? » me fit-il observer. « Comme des gamins dans une cour d’école » poursuivis-je. Que faisons nous de notre vie, en effet, sinon à nous la jouer dans le style épique et guerrier des « indiens contre les cow- boys ». Pour les mâles assurément ! Nous continuâmes ainsi dans une ambiance chargée d’odeurs de shampoings et d’ammoniaque. Juste avant de le quitter, il me fit aussi part de sa passion pour la chasse (tiens donc !). Et du perdreau. Qu’il traque en Espagne. La chasse et la politique comme le prolongement, par d’autres moyens, de nos inoffensifs jeux d’enfants. On tire toujours profit de son coiffeur.
Dans un de mes billets précédents : un tête à queue idéologique, je notais l’ambiguïté des thèmes de campagne de Sègolène Royal. Marc Lambron, dans son dernier ouvrage , est encore plus précis.D’après notre auteur, elle serait, comme François Mitterand," le révélateur de l’inconscient de droite,de la gauche…" En moins littéraire cependant. Ce qui expliquerait la condescendance hautaine et ironique d’une grande partie de la classe politico-intellectuelle. Qui la voue, avec Sarko,et au reproche de son populisme, aux gémonies. Assisterait-on à la fin d’un cycle marqué par un mode de pensée " aristocratique" et des pratiques politiques " élitaires" ?
Toujours à propos de Ségolène.Faut-il donner plus de compétences et de responsabilités aux Régions? Oui, pour Madame la candidate. Non, pour les français. C’est du moins ce qui semble ressortir d’un récent sondage de l ‘I.P.S.O.S selon lequel 45 % des Français jugent aujourd’hui que la décentralisation est allée trop loin, 31 % estimant qu’elle a atteint un niveau suffisant et 18 % qu’elle n’est pas allée assez loin. En trois ans, la défiance a ainsi progressé de 20 points. Il est vrai que le spectacle que nous donnent à voir, et à entendre, un certain nombre de grands féodaux n’est guère ragoûtant.
D’autant que le maquis institutionnel s’épaissit, les dépenses de fonctionnement s’envolent et le clientèlisme prospère… Dans son rapport,Pierre Richard, président du conseil de surveillance de Dexia Crédit local, en appelle donc à la sagesse des élus et à la maîtrise de la dépense publique locale: "une nouvelle gouvernance des relations entre l’Etat et les collectivités territoriales fondée sur la négociation et la responsabilisation" est nécessaire. Il invite aussi ces dernières à "s’engager davantage dans des démarches de rigueur financière et d’amélioration de la productivité de leurs services".
Sera-t-il entendu? Pour l’heure, on n’entend que des promesses de dépenses, à structure de coût identique… Espérons qu’elles n’engagent que ceux qui les écoutent…
Avant-hier soir, théâtre. A l’affiche, de la danse contemporaine. Le ballet de Lorraine y présentait cinq pièces. La meilleure, à mon goût, signée Mathilde Monnier et Jean François Duroure : Mama, Monday, Sunday or Always. Le programme nous invitait à y voir des danseurs (en réalité des danseuses dont deux hommes en longs tutus) ayant « des airs de détectives privés ». Que je n’ai pas vus. Je les ai pourtant longtemps cherché. Scrutant les moindres indices. Gestuels et vestimentaires. Les imperméables, peut-être ? La pièce ne durant que 20 minutes, j’ai vite abandonné. Vaincu ! L’art contemporain vous place souvent dans ce genre de situation. La création est une co-production. L’artiste assure la livraison des matériaux. Les spectateurs la « mise en quelque chose ». Forme (!!!), perspective (???), abyme (pourquoi pas), situation (forcément), concept (sans doute). Qui, chez les plus cuistres de nos amateurs, se résume à un « c’est intéressant » aussi vague que prétentieux. L’infiniment creux au service de l’infiniment vide…
Picasso Pablo (dit), Ruiz Picasso Pablo (1881-1973). Paris, musée national Picasso – Paris. MP72. Partager :ImprimerE-mailTweetThreadsJ’aime ça :J’aime chargement… […]