Dany et sa bicyclette verte.

Dany le ( ex ) Rouge est le véritable patron des Verts.Il se repose chez nous à Lauret, dans l’Hérault, où il a reçu un journaliste de Libération.Pour lui dire intelligemment ce genre de banalité : «La transformation écologique passe par celle de nos modes de vie. Il va falloir consommer moins, rouler moins vite. Mais il faut que ce soit un changement librement consenti.» Ce que je fais, comme beaucoup d’autres, sans avoir attendu Dany, depuis belle lurette et sans y être contraint! Moins par souci écologique que par, disons…  » esprit de mesure « . Un style de vie qui n’a pas besoin, en effet, d’un  » nouveau modèle de société  » et que l’état de nos ressources environnementales et énergétiques finira bien, ça a déjà commencé, par imposer à tous nos gouvernants, de droite ou de gauche.De quoi faire pédaler encore longtemps, et sans efforts ( les vents étant porteurs ), Dany. Mais  pour aller où et avec qui? Lui même semble ne pas très bien le savoir. Son image, sa marque, suffit à  » construire un nouvel imaginaire « , comme le dit son ami Cochet ( Le Monde du 22 août ).C’est peut-être cela qui le rend si sympathique aux yeux de beaucoup d’électeurs de gauche ( pas seulement! ) de la classe moyenne fatigués d’entendre des discours programmatiques à la façon des 101 propositions de F.Mitterrand.Et qui le rend si dangereux pour la gauche classique divisée et en pleine crise existentielle.Dans cette conjoncture,les prochaines élections régionales placent des Verts coachés par Cohn-Bendit en situation idéale pour, effectivement,  comme 1500 sympathisants l’ont clamé à Nîmes le jeudi 20 août :  » casser la baraque à gauche « .

Risquer le coup de corne.

File:NRF n°588 COUV Le siècle de la NRF110.jpgLa féria de Béziers s’achève. Le prétexte pour reproduire ici un extrait  du mano à mano entre Michel Leiris et Vincent Delecroix publié dans le superbe numéro 588 de la NRF ( pages 274-277 ).
Michel Leiris, en janvier 1939 :  » Sans fioritures inutiles-juste ce qu’il faut pour montrer qu’on est maître de son art et qu’on n’hésite pas à prendre quelques risques de surcroît-, sans gestes de bravache,sans manèges de théâtre,Rafaelillo torée seulement avec toute son application, toute sa passion et son courage, n’admettant d’autre signature à l’ensemble de son travail q’une éraflure à son costume pour avoir approché la bête de trop près ou sa main droite baignée de sang pour avoir enfoncé l’épée avec une franchise totale. »
Vincent Delecroix,en février 2009:  » Vous n’aimez pas la tauromachie? Transposez, mettez un écrivain, vous même, si vous écrivez, en place du petit Rafael, et relisez l’article. S’exposer est l’acte- qui n’a rien à voir avec l’exhibition, qui n’interdit pas et même réclame l’étincelante parure, qui impose aussi de choisir ses figures- commun à l’écriture et à la tauromachie; c’est le terme absent mais central de ces quelques lignes…Ma signature, qu’elle est-elle, que sera-t-elle? Si je ne risque pas le coup de corne,à quoi bon? « 
Qu’ajouter à cela…

Marcel Gauchet et les « gauches »…

 
   
Extrait du très intéressant entretien de Marcel Gauchet avec Elisabeth Lévy. Le Point, n°1924, 30 juillet 2009
Elisabeth Lévy: Reste que beaucoup de gens ne savent plus très bien ce que signifient les mots «gauche» et «droite», d’où un sentiment de désorientation très répandu, notamment à gauche.

Marcel Gauchet: Toutes les gauches européennes sont confrontées à un impératif de redéfinition doctrinale dans une configuration globalement défavorable aux partis de gauche. Nous vivons un déplacement radical des repères intellectuels. La droite est devenue à la fois le parti du mouvement et celui de la réalité politique. D’une part, elle n’est plus conservatrice dans le sens où elle n’est plus préposée à la défense de l’autel, du trône, du sabre et du goupillon. Elle est revenue de la réforme à tout-va. Et elle est prête à intégrer des éléments de protection sociale dans son logiciel. Résultat, la gauche a perdu le monopole du changement. D’autre part, et c’est une nouveauté fondamentale par rapport à l’époque où la droite était largement catholique en France ou chrétienne ailleurs, elle est devenue le parti matérialiste, le parti de l’économie. Résultat, la gauche, qui revendiquait autrefois son matérialisme face à l’idéalisme mensonger de la droite, a perdu son instrument favori de démystification et se voit accusée à son tour d’idéalisme naïf. Enfin, la mondialisation offre paradoxalement à la droite une rente de situation politique. Car, face aux désordres dont elle s’accompagne, face aux flux migratoires qu’elle engendre, la droite incarne le réalisme et la fermeté, tandis que la gauche s’est laissé enfermer dans le seul registre de la générosité et de l’angélisme. »

E.L: Au sommet de la pile de livres sur votre bureau se trouvent « L’insurrection qui vient », attribuée à Julien Coupat, et « L’hypothèse communiste », d’Alain Badiou. Vous préparez-vous pour la révolution ? Que pensez-vous du succès des « intellectuels radicaux » ?

M.G: Je vais faire de la peine à Badiou, mais je suis bien obligé de constater que son succès prouve la persistance de l’identité française. Il montre que ce pays continue à vivre sur les acquis de son histoire. Qu’est-ce que Badiou ? Le communisme sans Lénine et Marx. Son propos réactive la promesse de l’égalité radicale qui a constitué la pointe extrême de la Révolution française et qui est restée depuis lors dans les gènes politiques du pays. Le cas de la bande à Coupat est encore plus amusant. Le mélange d’ultraradicalité subversive et de mépris aristocratique cultivé par le « comité invisible » relève d’un dandysme très français. Où, ailleurs qu’ici, réclame-t-on l’émancipation du genre humain tout en lui crachant dessus ? C’est l’un de ses charmes, la France est ce pays où les reliques d’un Guy Debord, grand maître du genre, peuvent être consacrées « trésor national ». J’en tire un conseil à la jeunesse : pour réussir, soyez toujours plus radical que le voisin, c’est un créneau d’avenir.


L’intégralité de cet entretien en cliquant sur le lien suivant: Marcel Gauchet

Garcia Lorca sur les murs de Narbonne.

 

 

 

Sur le mur d’un bâtiment public de la ville de Narbonne, on peut lire, dans sa version espagnole et sa traduction française, un poème de Fédérico Garcia Lorca. Qui le lit, personne ou presque? Jusqu’à ce qu’un  » poète  » du lieu, sur les conseils d’un  » lettré « , s’en avise pour nous signaler une grossière erreur de traduction de  » l’ancienne municipalité « . Et d’en appeler à la nouvelle pour que Garcia Lorca  » ne soit pas assasiné une deuxième fois « . Bref, une petite cuistrerie enrobée d’une vilaine sauce politicienne, mais qui a le mérite de surtout souligner les limites poétiques de nos deux compères. Car à gloser sur  » la rana  » ( la grenouille ), qui serait  » gênante  » au lieu de  » rama  » ( la branche ), qui serait elle plus seyante, du coup on tue bel et bien la lettre et l’esprit du poète andalous.
Concluons donc par ce petit bijou poétique, écrit le 12 juin 1921.

 » La lune s’en va sur l’eau
Comme le ciel est serein!
Elle fauche lentement le frisson du fleuve ancien
Cependant qu’une rainette la prend pour miroir à la main « 

PS: On trouvera ce texte dans Poésies IV, Gallimard édition de poche, page 40.

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